Chapitre 9 | Ezra

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Ezra effectua une longue série de pompes, la sueur dégoulinait le long de son dos, sur lequel était tatoué l’emblème des Nevada Wolves. La clé pour tenir en isolement... c’était de s’occuper l’esprit !

N’ayant jamais été un grand passionné des études, la lecture ne l’intéressait pas du tout. Le sport demeurait donc son unique exutoire pour évacuer sa frustration. Il lui restait aussi la branlette mais, à présent qu’il avait fait parvenir la photo de Lil’Bird à Jai afin qu’il la remette à Strike lors d’un parloir, ses séances de branlette n’avaient plus de la même faveur. Il se rappelait pourtant des moindres détails de son visage, des tatouages sur ses bras. Il avait besoin de la voir et la toucher... bordel de merde ! Il voulait lui parler, la toucher, la palper. Par manque d’entrain, il ne s’était pas masturbé depuis quelques jours. Ça lui manquait ! Atrocement. Ces parties de sexe solitaires étaient presque devenus compulsives. Il s’ennuyait à mourir, tournait en rond comme un loup en cage, alors il se masturbait, fumait une clope avant de faire du sport.

L’Animal lui avait dit, lui avait promis... une semaine, plus qu’une semaine ! Mais il avait perdu la notion du temps surtout quand il s’adonnait à ses siestes pour juste passer le temps.

Au moment où Ezra commença ses abdominaux, Reese apporta son plateau-repas de midi mais le Nevada Wolf l’ignora, poursuivant sa séance de sport afin de le contrarier.

— Shotgun, arrête ton manège, le prévient Reese à bout de patience.

Ezra en était à une centaine d’exercices.

— Shotgun, bordel de merde. Ne me fais pas perdre mon temps, putain ! Cette situation m’emmerde autant que toi, renchérit le maton.

— Quand est-ce que je sors de ce trou à rat, bordel ? demanda Ezra en bondissant sur ses pieds.

Il campa devant la porte, s’appuyant sur le chambranle.

— Tu sors à la fin de la semaine comme il était initialement prévu.

— Sans déconner. Je vais croupir jusqu’à la fin de ma peine.

— En raison de ce qui est arrivé dans les douches, c’est mieux comme ça, concéda Reese.

Ezra s’humecta les lèvres puis passa la main sur son crâne qui se recouvrait d’un fin duvet noir. Puisqu’il allait sortir, Ezra avait pris la décision de se laisser pousser les cheveux. Pas comme quand il avait atterri en prison ! Être un chevelu à la Kurt Corben ne l’intéressait plus.

— L’administration agit pour ta propre sécurité. L’Animal ne veut pas qu’il t’arrive quelque chose tant que tu seras sous ma garde. La mission qu’il t’a confiée est très importante pour l’avenir d’Orangewood.

— Je veux sortir d’ici, espèce de trouduc, s’énerva Ezra.

Reese n’ignorait pas pourquoi il voulait sortir d’isolement.

— Je ne peux pas faire ça, Shotgun ! Et tu le sais, bordel ! Si l’Animal apprend que tu es sorti d’isolement, ne serait-ce un quart d’heure en dehors de tes promenades réglementaires, il me coupera les couilles. Tu comprends ça ?

Ezra l’observa d’un air narquois. Il inclina la tête sans se départir de son sourire moqueur. Il s’en balançait totalement.

— DJ Ricch a voulu me refroidir dans les douches, je veux les noms des trois enculés pour les dézinguer !

Reese s’assura que personne ne les écoutait. Un détenu en train de faire le ménage... un collègue en pleine ronde.

— Ne fais pas cette connerie, tu risques vingt ans de taule pour une histoire puérile de vengeance, le sermonna.

— Hé, mon gars ! Vous avez vos règles et nous avons les nôtres. Seulement ta petite cervelle de fonctionnaire ne pige pas cette réalité ! cingla Ezra, l’air mauvais.

Il rapprocha son visage de la grille.

— Trois prospects des Black Soulles One m’ont attaqué à trois semaines de ma sortie de taule alors que je me douchais pénard. Puis on m’enferme en isolement avec pour seule visite des Démocrates à la con qui me sermonnent en longueur de temps. Je ne pense pas trop réagir, mon connard, rétorqua Ezra en sentant un sentiment d’injustice l’envahir.

Cédant à la colère, Ezra frappa la grille qui recouvrait la porte.

— Je veux sortir d’ici, espèce d’enfoiré de merde ! hurla le Nevada Wolf.

Reese recula de quelques pas, le laissant se défouler contre la porte comme un forcené.

— Ça y est, tu es calmé, le sermonna Reese. L’Animal a été clair. Tu termineras ta peine en isolement pour t’empêcher de faire une connerie et de compromettre ses projets. Même une fois que tu seras dehors, tu as intérêt à te tenir à carreaux. L’Animal te facilite la vie alors ne lui complique pas la tâche. Ne repousse pas son amitié pour une stupide question d’amour propre !

Ezra écouta son foutue prêchât, il ne pouvait pas s’empêcher de sourire voire même de rire tant cette situation était surréaliste.

— L’Animal t’encourage même à te dénicher une gentille nana pour t’aiguiller sur le droit chemin, lui conseilla l’agent pénitentiaire.

— Ferme ta gueule avec ton sermon à deux balles. Je jurerai entendre mon connard de grand-père qui crèche en Californie. T’inquiète pas pour ma bite, j’ai bien l’intention de me taper une jolie nana dès ma sortie de taule. J’en ai même une dans le collimateur, mon pote. Je vais la baiser en long et en large durant des heures. Elle me suppliera d’arrêter. Comme j’en aurai strictement rien à foutre de ce qu’elle me dira, je lui foutrai ma bite dans la bouche juste pour qu’elle la boucle !

La mine sombre, Reese ne décrocha pas un mot durant tout son speech.

— Ravi de te l’entendre dire, le railla cet enfoiré. Maintenant au fond de ta cellule, à genoux, face au mur et les mains sur ta caboche d’attardé mental, lui ordonna-t-il.

Ezra éclata de rire puis lui exhiba un doigt d’honneur sous le nez, sans se départir de son sourire. Néanmoins, il lui obéit. Le maton déverrouilla la porte puis pénétra à l’intérieur de la cellule pour déposer son plateau-repas sur le bureau.

— Il y a quoi au menu ? demanda Ezra, à genoux, face au mur, les mains sur la tête.

— Devine, le railla Reese.

— Putain de purée liquide, petits-pois et nuggets de merde, pesta-t-il.

— Tout à fait. Bonne appétit !

— Va te faire mettre, enculé de Démocrate à la con ! insulta Ezra.

Après son déjeuner infect, il réfléchit à la liste des membres du club qui pourraient vendre des femmes blanches au Cartel de Rosarito. Il énuméra chaque membre dans sa tête.

Dita dirigeait une maison close, elle faisait la coupable idéale... trop évident ! La belle Dita était bien trop maligne pour faire ça et, d’un autre sens, il n’y avait rien de plus ingénieux de faire ça sous le nez d’autrui.

Trini... seul les combats de chien et ses pitbulls comptaient.

Ezra eut une pensée pour son pitbull Rex. Il était mort dans les premières années de son incération. Malgré lui, l’émotion lui écrasa la gorge.

Cal... cette tête de nœud, classé délinquant sexuel de classe 2, fantasmait et bandait en photographiant des nanas à poil qu’il revendait à des magazines pornos.

Morgan... plutôt du genre à cogner une meuf si Zack le lui demande en ajoutant un s’il te plaît.

Kendall... c’était le nouveau dealeur du club.

Strike... c’était son pote depuis les bancs du cours préparatoire comme Archie. Il ne les imaginait pas une seule seconde impliqué dans ce genre de trafic.

Diana... elle boxait tous ceux qui manquaient de respect à une femme.

Trish... la mère du club pour avoir été la régulière de leur précédent officer Chad Baxter que Cam, le nain de jardin, grand amateur d’araignées, remplaçait depuis plusieurs mois.

Zack...

Reuben... pas lui ! Pas Reuben ! Ce mec l’avait pratiquement élevé après la mort de sa mère.

Il bondit sur ses pieds puis fixa le mur sur lequel il marquait une barre pour chaque jours écroulé. Il restait seulement quelques jours... il restait quatre jours !

Ezra frappa le mur de son poing gauche. Il déchargea toute la violence et la frustration contre les briques. Les impacts laissaient des taches de sang sur la peinture blanche, il poussa un hurlement de rage en continuant à taper de toutes ses forces.

Son club ne pouvait pas faire ça. Mettre des meufs sur le trottoir non plus ! Les filles du Venusia passaient les entretiens et les auditions par appât du gain car la petite ville d’Orangewood offrait des perceptives d’avenir plutôt réduites. Mais les habitants étaient attachés à leur ville.

Son club trafiquait les armes, dealait de la meth, vendait leur protection aux commerçants mais la vente d’êtres humains. Pas question !

Ses phalanges le faisaient atrocement souffrir mais il s’était déchargé de sa frustration, de sa colère et de son impuissance. S’il n’avait pas atterri en taule, Ezra aurait vu l’affaire venir. Il connaissait bien Zack et Reuben.

Il s’adossa au mur puis se laissa glisser jusqu’au sol. Il plia ses jambes et posa les bras sur ses genoux.

— Dix ans, tête de con, se réprimanda-t-il en se tenant la main.

Il appuya l’arrière de son crâne le mur. Il était en train de vriller, c’était la raison pour laquelle il soupçonnait son club de trafic humain.

— Ils ne peuvent pas faire ça, bordel de merde, gémit-il en prenant sa tête entre ses mains dont la gauche enflait déjà.

Les larmes de désespoir ruisselaient le long de ses joues. Il s’interdit de se laisser aller, il devait se montrer fort. Sinon c’était la fin pour lui ! Les autres détenus le sentiraient et s’en servirait pour l’asservir, l’aveulir. Pas question ! Il était un Nevada Wolf... il était le sergent d’armes des Nevada Wolves ! Il essuya du revers de la main ces larmes intempestives, cette démonstration de faiblesse.

— Bordel de merde, pesta Montgomery depuis la porte. Tu as pété une durite ou quoi ?

Ezra détestait ce mec... si bien qu’il lui adressa un doigt d’honneur en éclatant de rire.

Le médecin de la prison examina sa main puis lui fit faire un cliché. Rien du tout ! Il constata toutefois son état de déshydratation. Le médecin le perfusa et le garda en observation pour la nuit, menotté au lit. Le gros Black Soulless One qui avait essayé de le violer dans les douches avait été passé à tabac durant ses heures de travail à la buanderie. Son pote Jai s’était donc occupé de lui !

C’était le moment rêvé ! L’infirmier devait du fric à un cercle de club de poker. Ezra eut alors une brillante idée !

L’infirmier vérifia sa perfusion puis glissa quelque chose dans sa main. Il se retira en lui souhaitant une bonne nuit. Ezra sourit en constatant les clés de sa paire de menottes. Il se libéra puis récupéra un ciseau dans l’un des tiroirs. Enfin, il se dirigea directement vers le Black Soulless One, s’assurant que personne ne le voyait. L’infirmier montait la garde devant la porte. Ezra plaqua sa main contre la bouche du mec puis enfonça le ciseau dans la gorge grasse de son agresseur. Il le poignarda plusieurs fois, interloqué par la soudaineté de l’attaque, le Black Soulless One ne réagit même pas, se laissant tuer.

Ezra se pencha sur son oreille puis lui rappela la promesse qu’il lui avait fait.

— Je t’avais promis de te crever si tu t’approchais trop de mon cul, espèce de connard !

Enfin il le laissa se noyer dans son sang. L’infirmier se débarrassa de toutes les preuves et administra un sédatif à Ezra en falsifiant l’heure de la prise du médicament afin de le mettre hors de cause.

— Mon ardoise est effacée ?

— Elle l’est, affirma Ezra en se couchant.

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