Chapitre 1 : La visite de l'homme aux bottes de cuir

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Le soleil traversait les rideaux de la chambre de Ezra, lui réchauffant tendrement la joue. Il dormait paisiblement, songeant à la merveilleuse journée qui l'attendait : un tant attendu examen de sciences pour lequel il avait travaillé toute la semaine. À cette pensée, il fronça les yeux, son agréable réveil venait d'être perturbé par l'affreuse tête de Madame Smith, professeure de sciences, lui indiquant que ses résultats étaient décevants. Pourtant, ce n'est pas faute d'avoir essayé, les sciences, n'étaient pas vraiment son point fort. À présent, Ezra était bien réveillé, il se tira de ses draps passivement, prit ses vêtements et son sac de cours puis sortit de sa chambre. Un rapide passage à la salle de bain et le voilà en train de descendre les escaliers pour rejoindre son grand-père Adrien qui l'avait élevé après la mort de son père. Ce-dernier était mort d'une maladie inconnue quand il était encore un bébé. C'est ainsi que Adrien avait élevé Ezra, seul, dans une petite province au sud de Bristol. Tous deux menaient une petite vie bien tranquille dans un quartier résidentiel très calme et sans agitations.

Au fur et à mesure que Ezra descendait les marches en bois de sa charmante petite maison, l'odeur de gaufres chaudes lui enivrait les narines. Il déposa son sac dans l'entrée et partit rejoindre son grand-père dans la cuisine. Celui-ci, tablier autour de la taille, finissait de dresser la table. Ezra s'assit à table et Adrien vint lui déposer, dans son assiette, le petit déjeuner :

- Alors, bien dormi ? demanda-t-il.

Ezra prit un bout de gaufre avec sa fourchette, l'avala puis répondit :

- Pas vraiment... J'ai révisé toute la semaine pour mon examen et j'ai comme l'impression que ça ne servira à rien.

En voyant la mine déconfite de son petit fils, Adrien lui remonta le moral :

-Le principal c'est que tu sois fier de ton travail, je crois en toi, tu vas y arriver c'est sûr !

Ezra eu du mal à croire ses paroles mais l'enthousiasme rayonnant de son grand-père lui réchauffa le cœur. Il finit son assiette en deux bouchées, salua son grand-père, prit son sac et se dirigea vers la sortie.

Sur le trajet qui le menait à l'université, il essayait de se remémorer ses formules de physiques et de maths tout en essayant de ne pas se laisser distraire par la musique qui rythmait ses pas. En approchant du bâtiment, il sentit son cœur se serrer petit à petit. Son anxiété ne s'était guère améliorée avec le temps. Il piocha tant bien que mal tous les souvenirs heureux qu'il possédait et essaya de se calmer. Après tout, ce n'était qu'un tout petit contrôle de routine, il avait surmonté bien pire que ça. En arrivant devant la salle, il crut réellement que son cœur allait le lâcher et qu'il allait tomber au sol. Heureusement pour lui, Josh, son ami et voisin de table posa sa main sur son épaule et le réconforta :

- Stresse pas, ça va aller. 

Ezra lui sourit et le suivit pour aller s'asseoir au fond de la salle. Stylos en mains, ils étaient tous prêts. 

//

Son contrôle avait été horrible, toutes ses formules s'étaient évaporées dans l'air comme la fumée qui s'échappait de la tasse de café de Madame Smith. En sortant de la salle, il avait pu sentir sur lui le regard insistant de cette dernière. La journée passa lentement pour Ezra. Pas même le cours de littérature, sa matière préférée, ne réussit à le débarrasser de sa mauvaise humeur. Josh, avait tout fait pour lui remonter le moral : lui raconter les meilleures blagues qu'il avait en sa possession, lui proposer de lui payer un verre « pour oublier », insulter la prof de sciences... Rien à faire, Ezra avait le moral au plus bas.

Le chemin du retour fut particulièrement horrible, la pluie avait commencé à tomber et Ezra n'avait pas prévu de parapluie. Le voilà qui marchait sous la pluie, portant son sac au-dessus de sa tête pour éviter d'être trop mouillé le temps de rentrer chez lui. Cependant, le ciel avait décidé de s'acharner sur lui, une voiture qui roule trop vite, une flaque d'eau et hop ! Le voilà trempé de la tête au pied. Son sac ne lui servant plus à rien, il le remit sur son épaule et continua son chemin en affichant au monde la meilleure mine désespérée qu'il pouvait faire.

Arrivé devant chez lui, il entendit des éclats de voix provenant du salon. Sauf que, chose étrange, Adrien ne recevait jamais de visite. Il s'avança prudemment et jeta un coup d'œil par la fenêtre pour voir ce qui s'y tramait. Il entendit deux voix, la première était la voix de son grand-père mais la deuxième lui était inconnue.

- Mais Adrien, il faut que tu fasses quelque chose. Elle le cherche partout ! S'écria la deuxième voix, elle devait provenir d'un homme déjà adulte.

- Où veux-tu que je le cache ? On a nul part où aller ! Répondit Adrien.

- Il vous reste encore un peu de temps avant qu'elle vienne fouiller de ce côté, dit la deuxième voix, profite de ce temps pour trouver une solution.

Ezra entendit des bruits de pas se rapprocher de la porte d'entrée. Son œil se tourna vers la haie de son voisin, monsieur Jack, un veuf qui ne vivait que pour ses chats et maudissait le livreur de journaux qui, à son goût, jetait trop violemment le journal contre sa porte. Un fois caché derrière cette haie, Ezra put apercevoir l'homme sortir de la maison. Il portait un long manteau brun avec un pendentif étincelant accroché dessus, contre sa poitrine. Un chapeau noir cachait son visage, Ezra ne put identifier cet homme. Ce dernier se retourna vers la haie et Ezra abaissa rapidement sa tête. Le bruit des bottes en cuir du mystérieux homme dans les flaques d'eau fut la seule chose que Ezra put entendre. Une fois l'homme partit, il décida de sortir de sa cachette et de rentrer chez lui. En ouvrant la porte, il découvrit son grand-père assis à la table de la salle à manger, les mains croisées sur celle-ci, l'air absent. Il décida de s'approcher de lui et déclara d'une voix calme :

-Tout va bien ?

Ce dernier fut surpris de voir Ezra et essaya de lui faire un grand sourire. Malheureusement, sa tentative donna lieu à un sourire crispé qui déstabilisa Ezra. Il en conclut que ce n'était pas le bon moment pour le questionner à propos de ce qu'il avait entendu auparavant, alors il le laissa seul  et monta dans sa chambre pour se reposer. Les événements de la journée l'avaient bouleversé. Ezra se laissa tomber sur son lit et essaya de mettre au clair ses pensées. De qui parlaient-ils ?

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Le réveil fut difficile pour Ezra. Il avait passé la nuit à cogiter sur les paroles du mystérieux homme. Ainsi, ses rêves avaient été ponctués de courses poursuites entre criminels dignes des plus grands films policiers américains. Sa tête se tourna lentement vers son réveil, il affichait sept heures trente. Il allait être très en retard s'il ne se dépêchait pas. Ses cours commençaient dans une demi-heure et il n'était pas prêt. Alors il s'habilla rapidement, ne faisant même pas attention aux vêtements qu'il prenait. Ensuite, il descendit les marches par deux, adressa un bref bonjour à son grand-père, qui semblait vouloir l'arrêter d'un geste de la main, puis partit pour son école. Sur le chemin, il regretta un peu de ne pas avoir trouvé le temps de le questionner à propos de ce qu'il avait vu et entendu hier. Pour dire vrai, l'état dans lequel il avait retrouvé son grand-père hier soir l'avait particulièrement troublé. En rentrant, il lui demanderai des explications.

//

Aujourd'hui pas de cours de sciences à l'horizon, seulement, le prochain cours était « histoire de l'Angleterre ». Ce dernier avait tout le potentiel pour être un cours formidable, à l'exception d'un détail près : Monsieur Brown. En effet, ce dernier avait pour réputation d'endormir tous ses élèves rien qu'en ouvrant la bouche. C'est ainsi que Ezra se retrouva assis au fond de sa classe à regarder par la fenêtre les branches des arbres s'agiter au contact du vent. Après de longues minutes d'observation, une d'entre elle attira particulièrement son attention : Elle s'allongeait et s'enroulait autour d'elle-même, elle vint s'approcher de la fenêtre et fit signe à Ezra de regarder dans la direction qu'elle indiquait. Ce dernier fut surpris et ouvrit grand les yeux pour s'assurer que ce qu'il était en train de voir n'était pas un rêve. Ce n'en était pas un, une branche était en train d'essayer de communiquer avec lui. Il secoua la tête, comme pour enlever cette vision de sa tête, et se concentra sur le cours de Monsieur Brown. Après quelques minutes, lorsqu'il tourna la tête en direction de l'arbre auquel la mystérieuse branche appartenait, tout était redevenu normal. L'arbre était un arbre ordinaire.

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La journée de Ezra avait été monotone et très peu différente de ses autres journées, à une exception près : cette étrange branche d'arbre qui s'était approchée de lui. Cette image était restée gravé dans sa tête jusqu'au soir. Si bien qu'à présent, sur le chemin du retour, sa tête bouillonnait essayant de chercher des explications. Une solution lui vint à l'esprit : il devenait fou. En soit, cela expliquerait ses pensées déprimantes et sa montée de stress. Il marchait sans trop savoir où il allait. Ses écouteurs enfoncés dans ses oreilles, les bruits alentours lui étaient inaudibles. Cela faisait maintenant une bonne demi heure qu'il marchait et le ciel commençait à s'assombrir. Il s'arrêta un instant et observa les alentours. Il ne reconnaissait pas cet endroit, la froideur des briques sur les murs des bâtiments ne le rassurait guère. Cependant, au fur et à mesure qu'il avançait dans cette ruelle, des branches d'arbres commencèrent à envahir la rue et à recouvrir les murs. À chaque pas qu'il faisait, le sol se transforma en tapis de verdure. Intrigué, il avança prudemment, pas à pas, et se trouva à présent entouré de feuillages et d'arbres. Il se retourna : la ruelle avait disparue. Il regarda devant lui, l'impasse en briques de la ruelle s'était transformée en trou noir. Il ne pouvait plus faire machine arrière, la seule solution était d'avancer. Il avança vers le trou noir, y pénétra et sa vue se troubla.

//

- Monsieur? Monsieur, vous m'entendez ? 

Au milieu d'une ruelle de briques, gisait le corps à moitié conscient de Ezra. Une femme tentait de le réveiller en secouant ses épaules. Il revenait à la raison, petit à petit, et commençait à prendre conscience des lieux qui l'entouraient. Il était persuadé d'avoir traversé cette ruelle sous une autre forme : un décor beaucoup plus champêtre que ce qui se présentait sous ses yeux. 

À sa droite, la dame cherchait activement quelque chose dans son sac, un téléphone sans doute, afin d'appeler les services de secours d'urgence. Ezra l'arrêta d'une main et tenta doucement de se relever. Il récupéra ses affaires et quitta les lieux comme si tout était redevenu parfaitement normal. 

Sur le chemin du retour, des milliers de questions polluaient sa tête. Avait-il rêvé? Était-ce réel? Les réponses lui parurent évidentes mais une partie de son esprit voulut croire à l'hypothèse de l'irréel. 

Après tout, il avait eu une longue journée, ce genre de phénomènes est complètement explicable et normal.

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