Par le trou de la serrure

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Après un rapide petit déjeuner et une douche, nous nous mîmes une dernière fois à la recherche de Marie et de Jacques, qui restèrent introuvables.

« Une chose m’étonne, fit remarquer Eloïse. Lorsque j’ai réservé notre séjour, je l’ai fait par internet. Or, il n’y a, ici, ni téléphone, ni ordinateur.

—Exact ! Approuva Christophe. De plus, nous ignorons où logent nos hôtes. En tout cas, pas dans cette aile de la maison.

—Vous avez remarqué cette autre aile, sur le côté ? Questionnai-je. Nous n’avons même pas pensé à y jeter un coup d’œil !

—À vrai dire, remarqua Camille, elle semble tellement abandonnée… Les volets sont fermés et il n’y a pas de porte. Par où peut-on y accéder, si ce n’est d’ici.

—Quelque chose nous échappe, c’est évident, renchérit Fred. Nous n’avons trouvé aucune porte ni dans le salon, ni dans le hall, ni dans les deux cuisines.

—Cherchons encore. Il faut éclaircir ça. Cette maison est pleine de surprises. Ne laissons pas échapper la prochaine. » Fit Éric en nous faisant signe de le suivre.

Après avoir sondé les murs de tout le rez-de-chaussée, nous finîmes par découvrir une porte cachée sous le grand escalier. Elle s’ouvrit sans résistance ; nous nous engageâmes à la queue leu-leu dans un étroit et long couloir qui se terminait en cul de sac, fermé par une autre porte. Nous nous étions imposé silence et, blottis, l’oreille collée à la porte, nous épiions le moindre bruit pouvant venir de l’autre côté. Il nous sembla saisir l’écho lointain d’une conversation sans pourvoir assurer que ce n’était pas le bruit de nos respirations dont nous retenions le souffle à nous en étouffer, ou celui du vent. Fred eut alors l’idée de coller un œil devant le trou de la serrure. Lorsqu’il se releva, un doigt sur la bouche, il nous fit signe de déguerpir en silence.

En sortant du couloir, la porte du placard fut soigneusement refermée et nous suivîmes Fred jusque dans la deuxième cuisine. Pressé de questions, il fit un peu durer le suspense mais finit par nous révéler ce qu’il avait vu.

« Rien de très significatif, nous avoua-t-il.

—Quoi, quoi ? Protesta Eloïse. Tu as vu quelque chose, oui ou non ?

—Oui, j’ai vu quelque chose. Mais je ne suis pas sûr que ce soit réel. Expliqua-t-il. Enfin, je veux dire… C’était sombre et je n’apercevais qu’une infime partie d’une pièce ; une ombre est passée, comme si quelqu’un se déplaçait.

—Ah ! Donc, il y avait bien quelqu’un dans cette pièce ? Questionna Éric.

—Oui…Enfin, je pense que oui.

—Donc, nous pouvons penser que nos hôtes, pour une raison que nous ignorons, jouent à cache-cache avec nous et s’amusent à nous effrayer. Conclut Christophe.

—C’est fou !

—Incompréhensible !

—Mais dans quel but ?

—Moi, ça me fout la trouille !

—Pas de panique, jusqu’à présent, aucun mal ne nous a été fait. Je pencherais plutôt pour une escroquerie ou quelque chose du genre. Prenons les choses du bon côté et essayons de prendre nos adversaires à revers. »

Nous avions parlé tous en même temps et Christophe, avec son calme habituel, avait émis cette dernière hypothèse qui avait calmé d’un coup nos exclamations.

Dans le doute, Nous décidâmes de nous rendre au village voisin pour alerter la police.

La grille du parc était toujours cadenassée, nous barrant le passage. Les garçons secouèrent furieusement la chaine, tirant et tordant les maillons rouillés qui finirent par céder. Ouvrir la gille ne fut pas une mince affaire, lourde et coincée sur toute sa longueur par des paquets de terre et d’herbe. Il fallut s’y mettre tous les six pour la dégager de cette gangue et tirer avec force sur les deux panneaux pour obtenir un passage suffisant pour notre véhicule.

« C’est quand-même bizarre, toute cette herbe et cette terre qui la coincent, remarqua Fred entre deux efforts.

—Plus que bizarre, en effet, dit Éric.

—Oui, elle était ouverte, quand nous sommes arrivés. Comment tout ça a pu pousser en deux jours ?

—On veut nous empêcher de partir ! Oh là, là… Y’en a marre ! Pleurnicha Eloïse. »

Personne n’eut le courage de la rassurer, nous étions tous aussi inquiets qu’elle.

Lorsqu’enfin nous pûmes quitter le parc, nous étions épuisés mais heureux de partir. Pourtant, nous allions devoir revenir, car nous avions laissé nos affaires dans la maison.

La route qui menait au village serpentait à travers bois. Le temps s’était amélioré et un soleil encore frileux, jouant entre les branchages, dessinait des arabesques sur la chaussée. L’endroit était charmant, serein, bucolique et reposant après toutes ces émotions. Nous roulions en silence, chacun dans ses pensées, profitant du calme, rassurés d’être ensemble en sécurité. Après un dernier virage, nous atteignîmes un plateau surplombant le manoir que nous apercevions au fond de la vallée. De la fumée s’échappait de la cheminée. Éric arrêta brusquement le véhicule sur le bas-côté et nous en descendîmes pour nous assurer que ce que nous voyions était bien réel.

« As-tu allumé le feu dans la cheminée, ce matin ? Demanda-t-il à Fred.

—Que nenni, mon bon monsieur, fit Fred. Et il n’y restait pas la moindre braise, je peux l’affirmer pour avoir vérifié avant de partir.

—Nous sommes partis depuis moins d’une heure, en comptant le temps qu’il nous a fallu pour ouvrir la grille. Ce qui signifie que nos hôtes nous épiaient et attendaient notre départ !

—Qu’est-ce qu’on fait ?

—On va à la police ! S’écrièrent Camille et Eloïse, à bout de nerf.

—Que dire ? Quelle plainte déposer ? Questionnai-je. Pour l’instant, à part ce jeu de cache-cache imbécile, nous n’avons subi aucun préjudice, si ce n’est celui de gâcher nos vacances. Mais ce n’est pas un délit. Nous sommes logés et nous avons de quoi nous restaurer. En dehors de l’absence de nos hôtes et des bruits bizarres, le contrat est respecté.

—Exact. Affirma Éric. Je suis d’avis qu’il faut retourner au manoir et voir venir. Qu’en pensez-vous ?

—Ok, ok, nous allons faire comme ça. » Répondirent Fred et Christophe.

Malgré le manque d’enthousiasme des trois filles, nous reprîmes le chemin du manoir après avoir fait une halte dans la forêt. Nous avions besoin de nous oxygéner avant d’affronter l’adversaire.

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