Chapitre 1 (partie 2)

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L’homme avait enfin terminé son installation. Il vérifiait une dernière fois le cadrage. L’intérêt était de ne montrer son masque qu’à la fin, lorsqu’il éteindrait sa caméra. En attendant, il devait intéresser la foule pour qu’elle l’écoute. Il aurait bien tenté un « Oyez ! Oyez ! », mais ça faisait trop ancien, il serait alors tourné en ridicule. C’était le seul problème de son plan, il n’avait pas de phrase d’accroche pour que les villageois le regardent. Il tenait à ce que tout le village le regarde, l’observe, pose ses yeux sur lui. Il voulait se sentir regarder. Il voulait que l’attention se porte sur lui. Mais il ne savait pas comment. Il avait passé la nuit entière à réfléchir, c’est pour cela que deux trous noirs s’étaient posés sous ses yeux.

Il se décida enfin à utiliser ce qui l’avait toujours perturbé. Ce qui l'a fait vivre dans le malheur. Cette sorte de pouvoir que lui seul possédait. Il soupira, mais c’était le meilleur moyen pour mettre son plan en exécution.

—Chers villageois, pense-t-il fortement, rejoignez-moi sur la place de la mairie dans une demi-heure. Tout retardataire sera positionné au premier rang.

Les habitants sur la place s’arrêtèrent de marcher pour répondre un « oui » en chœur. La deuxième réaction fut un enchaînement de surprise en tout genre. Une femme cria puis cacha sa gêne en posant ses mains sur sa bouche, les yeux toujours écarquillés. Plusieurs hommes et femmes rejoignirent son cri. Certaines et certains s’arrêtaient, d’autre continuaient. Mais le plus étonnant fut sûrement les autres réactions. Les personnes qui n’avaient pas de voix pour crier, celles qui tombaient, celles qui couraient les mains en l’air et jambes écartées. Il y avait même un vieux monsieur qui jeta sa canne en l’air et une vieille dame en profita pour lui taper la tête à la manière des dessins animés.

L’homme à la caméra avait déjà commencé à enregistrer. Il souriait face aux réactions de chacun. Il vit prêt du bistro une jeune femme élégante qui riait. Il se frotta les yeux et lâcha un petit « Candice » presque inaudible. Il se tapota les joues pour essayer de se reprendre. Il secoua sa tête, se disant que ça ne pouvait pas être-elle. Il se racla la gorge, les trente minutes étaient passé. L’heure de la vengeance allait commencer.

La première étape de son plan était de vérifier que tout le monde était réuni et les haut-parleurs étaient bien allumés. Ce ne fut pas un problème, tout était installé. Il alluma son microphone et commença à parler.

—Bonjour à tous les habitants de ce village. Je me présente, je suis le Conducteur. Dans quelques instants vous goûterez à ma sauce froide : vengeance. Ne dit-on pas que la vengeance est un plat qui se mange froid ? Alors, pourquoi chers villageois êtes-vous ici ? C’est très simple. Depuis mon plus jeune âge je subis la haine parce que je suis différent. Il est grand temps pour les personnes différentes de s’assumer. Ma seule différence c’est d’être supérieur et je compte bien vous le montrer.

L’homme réajuste son masque. Il sent les regards des villageois sur son corps comme ci il bronzait sur un transat au soleil. La sensation de chaleur s’empare de lui et il hume l’air satisfait de celle-ci.

—Un jour on m’a dit « qu’il est normal d’être différent, car comme tous les êtres humains je suis unique » Je ne vais pas le nier. Ma seule présence sur terre est un miracle pour les autres. Vous êtes les plus privilégiés. Vous allez pouvoir tester en premier ce miracle. Chacun d’entre vous boit mes paroles comme on boit de l’eau. Je vous les intègre dans votre cerveau pièce par pièce, jusqu’à ce que vous ne puissiez plus vous contrôler vous-même. Vous serez à ma merci car je suis le contrôleur de ce monde. Je suis celui qui vous conduit vers l’illumination et l’au-delà. Je vous ferais découvrir un autre monde. Mon monde idéal. D’ailleurs, à chaque fois que vous entendrez le mot marché, peu importe le sens vous vous prosternerez en criant « Oui, Ô Grand Conducteur ». Je serais toujours auprès de vous. Où que vous soyez, je saurais si vous avez mal agi et alors, par un simple geste vous disparaîtrez de la surface de cette Terre, Ma Terre. A mon claquement de doigt, vous serez libéré de ce discours.

Il claqua des doigts, laissant la foule cligner des yeux énergiquement. Le discours était terminé. Il rangea ses affaires et retourna chez sa grand-mère, il était l’heure pour lui d’aller se coucher.

La nuit commençait à arriver. Sa vengeance ne faisait que débuter. L’étape deux était plus personnelle. Elle concernait ses parents.

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