Chapitre 53 - 1301*

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Chapitre 53

En rentrant cette nuit-là, je suis excité comme une puce et tellement fier d’avoir assuré avec la petite Éva. La seule question qui demeure est : qu’est-ce que je vais bien pouvoir foutre d’elle demain matin ?

Je ne peux pas la larguer comme ça, et je ne veux surtout pas m’emmerder avec une copine. Je suis coincé entre la culpabilité de lui briser le cœur sauvagement et la peur de me retrouver enchaîné à elle. Je cherche en vain comment gérer la situation. Je déambule dans les allées, en m’interrogeant sur la décision que je vais prendre. Je réfléchis à ce que Paulo ferait à ma place. Il serait lâche, j’en suis certain. Il ne quitterait pas la fille avant d’en avoir trouvé une autre. C’est peut-être une bonne solution. Je ne dois pas l’écarter.

Le camping est totalement endormi. Seules les branches des arbres secouées par un léger vent sec dansent dans le ciel. Tout est calme. La nuit porte conseil !

En arrivant devant le mobil-home de mon cher voisin, je découvre que monsieur a sorti sa poubelle. Parfait, j’ai besoin de laisser exploser ma joie.

C’est comme ça que je me retrouve à deux heures du matin en train de disperser ses déchets ménagers sur son emplacement. D’un coup de pied, j’éventre le sac noir bien fermé par un lien. Une fois ouvert, je le secoue pour le vider complètement, de l’escalier de sa terrasse à sa voiture garée sur le côté, en le traînant derrière moi. Je m’applique à répartir équitablement les détritus sur la pelouse.

Un coup de sifflet me rappelle vite à l’ordre : Paulo et Max, morts de rire, me font signe que ça suffit et que j’en ai mis assez partout pour me faire engueuler.

— Tsssttt, insiste Paulo qui m’éclaire désormais avec la torche de son téléphone.

Je finis par lâcher le sac vide et tout laisser en plan pour traverser l’allée. Je me lave vite fait les mains au robinet extérieur accolé au mobil-home de ma tante. Puis je plonge dans ma chambre.

— Tu ne peux pas t’en empêcher ! me reproche Max sans quitter son portable des yeux.

— Quoi ?

Je fais l’innocent en retirant mes chaussures et en cherchant ma batterie externe pour mettre mon iPad à charger.

— De foutre la merde !

Il ne va pas me saouler en pleine nuit pour ce crétin de voisin qui n’a que ce qu’il mérite. De toute façon, ce n’est qu’une bataille. La guerre est loin d’être terminée avec lui.

— Je ne peux pas le voir, il est con comme une bite !

— Mais fais comme nous, laisse pisser le mérinos ! dit Paulo en se tournant vers moi.

— Ta gueule, je dors !

Mes frères se taisent l’espace d’une minute. Je me jette sur mon coussin pour mimer que je tombe de sommeil. Je ne ferme pas ma toile pour mieux profiter du spectacle qui se déroulera au petit matin.

— C’était qui, ces meufs, revient à l’attaque Paulo, qui est au moins aussi curieux que moi.

— Chuuutttt, je dors !

Il est à peine huit heures quand j’allume mon portable pour consulter mes notifications. Évidemment, je reste immobile pour ne pas risquer de réveiller mes frères, mais je piste régulièrement ce qui se passe dans le voisinage. À ma grande déception, l’heure tourne et rien ne vient. Lorsque dix heures arrivent, je décide de rejoindre Éva et Claire à la piscine.

Malgré l’heure tardive à laquelle nous nous sommes couchés, elles sont déjà là. J’en déduis qu’Éva devait être pressée de me revoir. Notre salade de langues a dû lui plaire. Je m’avance vers Claire pour lui décocher deux bises et je fais un bisou instinctif sur la bouche d’Éva. Il est évident que si je ne voulais pas sortir avec elle, je n’avais qu’à tout simplement me planquer dans ma tente. Mais ce matin, je souhaite la revoir, alors pour une fois, je choisis d’assumer. Je m’assois même sur la chaise longue à côté d’elle. Elle est toujours aussi jolie avec ses cheveux blonds remontés en chignon. Ça me fait bizarre d’imaginer que c’est ma copine officielle.

— Tu vas faire quoi aujourd’hui, m’interrompt Claire dans mes pensées.

— Journée piscine, et vous ?

Je n’ai pas entendu ma tante parler de quelconques sorties. Mais le camping offre un grand nombre d’activités, et nous ne devrions pas nous ennuyer.

— Pareil, et nos valises… me répond Éva avec un air triste.

Valises, elle a bien dit valises ou j’ai rêvé ?

— Vos valises ? je la fais répéter.

— Ouais, on repart demain, m’avoue-t-elle d’un ton complètement désespéré.

Finalement, c’est quand même une bonne nouvelle pour moi. Je suis totalement soulagé par son annonce. Moi qui me voyais attaché à elle, à devoir lui obéir et faire mille concessions pour lui faire plaisir, voilà qu’elle m’informe de son départ… Oh, putain, dans cette histoire, j’aurai eu de la chance jusqu’au bout !

— Mais, on est quel jour ?

— Vendredi.

— Ah, c’est possible que moi aussi je parte…

Je réfléchis à la date à laquelle nous devons nous rendre à Paris. J’essaie de me remémorer combien de temps ma tante avait prévu de rester sur Nice, mais je suis incapable de me souvenir de ce qu’elle m’a dit. Une fois de plus, je ne l’écoutais pas quand elle me parlait.

Vers midi, je ne traîne pas avec les filles. J’ai trop hâte de connaître la réaction de mon cher voisin. Je parodie parfaitement l’indifférence en m’approchant du mobil-home, même si je constate que les déchets ont été ramassés. Toute ma famille est réunie autour de la table et mes deux frères sourient largement en me voyant. Ces deux cons sont repérables à un kilomètre à la ronde, avec leurs gueules qui m’accusent de tous les vices. J’évite au maximum leurs quatre yeux dénonciateurs en m’asseyant à côté de Clothilde.

— Tu t’es baigné ? m’interroge-t-elle.

— Faut bien qu’il se lave de temps en temps… me tacle direct Max en éclatant de rire.

L’enfoiré, il me cherche, il va me trouver…

— Fais pas chier ! Je vis presque dans la piscine ! Pas besoin de passer en plus à la douche !

— Beuuurrrkkk ! font ensemble mes cousines avec des airs horrifiés.

Non mais c’est bon, c’est les vacances. Je reste dans l’eau du matin jusqu’au soir. C’est quoi le problème ?

— Tu t’es douché quand pour la dernière fois ? s’enquiert à présent ma tante.

— Mmm ? Avant-hier !

— Mais il faut tout te dire, c’est pas possible ça, Tonio ! s’énerve-t-elle en gesticulant, une cuillère dans les doigts.

Elle me sert une assiette de spaghettis bolognaise que je m’empresse de dévorer. Je me moque de les voir tous s’indigner de mon hygiène corporelle du moment.

— Quoi ? je continue la bouche pleine. Le chlore, ça désinfecte, non ?

— Ce soir, tu passes à la douche ! m’ordonne tata en faisant un signe de la main au voisin qui s’étire sur sa terrasse.

Ce trou du'c lui répond alors que je le nargue en faisant moi aussi un geste pour le saluer hypocritement.

— Tonio, te fous pas de sa gueule ! me reproche ma tante qui m’oblige à baisser la main. Et j’espère bien que tu n’y es pour rien dans le merdier qu’il y avait ce matin chez lui.

— Quel bordel ? je demande en prenant ma tête d’innocent.

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