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Cela faisait plusieurs jours déjà qu’il était au palais. L’Empereur parvenait régulièrement à le voir, malgré son emploi du temps chargé. Il lui avait dit qu’à cause de ses occupations, il ne pourrait résoudre cette histoire dans l’immédiat, et depuis Tōru faisait tout pour masquer son impatience. Il avait découvert que le souverain était un homme très compréhensif et sensible, et qu’il ne manquait pas de raison. Il était membre des ora, ceux possédant une capacité spéciale rare : celle de contrôler les éléments. Il avait aussi appris avec surprise que son protecteur allait bientôt se marier. On disait que sa fiancée, qui arriverait prochainement d’un état voisin, était une mantis, ce qui signifiait qu’elle avait la capacité de rendre des oracles. C’était là un don encore plus exceptionnel.

Il passait ses journées à visiter le palais ou alors se rendait dans la bibliothèque et y restait des heures durant, oubliant ses inquiétudes. Il avait déjà lu les vingt volumes des Chroniques du continent, et orientait à présent ses lectures vers l’Histoire moins conventionnelle, à savoir les mythes et les récits d’exploits des héros d’un autre temps. Il était en ce moment en train de chercher un ouvrage susceptible de l’intéresser. Mais il ne trouvait aucun titre accrocheur, et hésitait. En désespoir de cause, il en choisit un au hasard. La couverture était rouge, sa couleur préférée. Il lut le titre inscrit en lettres dorées. Contes et légendes, par Krystal. Ses soucis quant au sort de Sakura et Sei lui revinrent. Il rangea l’ouvrage, comme si cela pouvait lui rendre sa sérénité. Ce livre était vraiment partout : chez lui, chez les Chasseurs, et enfin au palais.

Il décida de sortir pour se changer les idées. Les jardins étaient une vraie merveille, les plantes variées et savamment ordonnancées avaient le don de lui rendre sa sérénité. Lorsqu’il arriva sur la grande terrasse, il s’arrêta un instant comme à son habitude afin de contempler la magnificence des multiples couleurs, s’étendant sur une superficie si grande que l’on ne pouvait en voir l’extrémité. Il descendit l’un des escaliers menant à l’allée centrale. À cette heure-ci, c’était presque la tombée de la nuit, il n’y avait personne dehors. Il fit quelques pas et arriva à une gigantesque pièce d’eau sur laquelle les jours de fête naviguaient des bateaux spécialement construits pour cet usage. En cet instant y évoluaient des cygnes, ainsi que des poissons multicolores qui jouaient sous la surface de l’eau. Cet endroit lui rappelait le lac au fond du parc de l’Académie Impériale. Il continua sa marche, perdu dans ses souvenirs. Le ciel s’assombrissait progressivement en même temps qu’il se parait des dernières couleurs du jour. Lorsqu’il revint à la réalité, il faisait tout à fait nuit.

Il rentra au palais et se rendit au troisième étage où était sa chambre. Il y entra et s’assit sur son lit, toujours pensif. Quelques minutes plus tard, quelqu’un toqua à la porte. Sans même y réfléchir, il fit s’actionner la poignée, tout en restant assis. Il avait remarqué récemment qu’il avait cette aptitude à faire bouger les objets à distance par la seule force de sa volonté. Et comme il avait beaucoup de temps libre, il s’entraînait parfois à manipuler les objets de loin. Peut-être cela était-il lié au fait qu’il était capable de lire dans l’esprit des autres, bien qu’il évitât de le faire.

L’Empereur entra et Tōru se leva.

« S’il te plaît, Akihito, fais comme si j’étais quelqu’un d’ordinaire. Je t’ai déjà demandé d’ignorer le protocole lorsque nous étions seuls.

- Et de vous appeler par votre prénom. sourit le garçon. Cependant, je ne peux me résoudre à vous tutoyer.

- En ce cas, laisse cela de côté. Je suis venu pour te dire que d’ici peu de temps nous pourrons agir.

- Enfin. »

L’Empereur lui lança un regard amusé. Tōru rougit.

« Désolé…

- Tu n’as pas à t’excuser. Ta spontanéité me fait du bien après tous les froids mécanismes de la cour.

- J’ai tendance à oublier cette partie de la vie au palais.

- En même temps tu es bien seul la plupart du temps. Je m’en excuse.

- Vous ne pouvez faire autrement. Mais ne vous en souciez pas, la solitude ne me dérange pas.

- Dis-moi quand même si tu as besoin de quelque chose.

- Je n’y manquerai pas.

- À ce propos, je voulais aussi te demander conseil.

- Au sujet de ce que nous ferons pour mettre un terme à cette histoire ?

- Oui. Nous les connaissons tous deux aussi bien, je le pense, mais tu es le plus à même de nous deux pour trouver une stratégie. Je n’ai pas beaucoup d’expérience dans ce domaine...

- Nous pouvons y réfléchir ensemble. »

L’Empereur acquiesça.

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