Que dire après ça ? Que faire après ça ? Recommencer. Pour toujours et à jamais. Tel est notre destin. Alors comme tous les matins je la réveille en douceurs. Un jour elle n’en pourra plus mais là, elle en redemande.

• Je peux avoir une autre gaufre ? Ça change des crêpes.

J’ai du mal à comprendre. Où est l’allusion ? Parce que ma belle, c’est pas n’importe qui. C’est la fille préférée, c’est la XV, c’est la dernière de sa race, on a cassé le moule comme ce matin où je lui ai gobé sa…

• Isabelle, je t’aime.

Et à l’Octogone, celles qui sont à l’écoute doivent se dirent : « Mais de quoi elles parlent ? C’est quoi le code ? » Mais on a plus besoin de parler. De l’extérieur nos conversations n’ont aucun sens, sauf la nuit entre deux extases où nos sens sont tellement azimutés qu’on ne peut plus s’écouter dans l’Invisible. Mais au brunch, avec tout cette énergie engloutie, on retrouve de la force, du réseau, de l’instinct et on se reconnecte. Et nos ventres en vibrent, des fois un peu trop fort, à en perdre l’équilibre, à se couper la respiration, à sentir la fin approcher sous une vague de plaisir.

• -Moi aussi je t’aime ma Paloma, toute entière et quand je vois ton derrière j’ai envie de te bouffer le…
• Curry ou aigre douce, la sauce, sur ta gaufre ?
• Aigre très douce voyons, ma chérie, je ne suis pas prête pour le curry.

Voilà nos moments à nous, dans l’éternité, quand on ne se mange pas l’une l’autre on est là autour de la table dans notre acte social du brunch. C’est pas le week-end, on devrait être au Couvent avec nos religieuses mais on s’en fiche, on les laisse tranquilles dans leur routine parce qu’avec nous chaque rencontre se solde de son lot de jouissance, on prêche la bonne lamentation et on répand notre chair, on partage nos fluides, on laisse notre empreinte en chacune de nos rencontres et on emporte avec nous un peu de notre soumise pour au final se retrouver toutes avec la même Humanité, passionnée, effrénée, turgescente. Alors, on va y aller ou pas ? Rien que le fait de se mettre en tenue nous excite déjà, elle avec sa croix, moi avec la mienne où à chaque fois j’ai une pensée pour Victoria qui m’affiche fièrement autour de son cou parfait de beauté avec celle que je lui ai offerte à Noël sous la bienveillance de Greta qui m’a léguée sa fille préférée, la meilleure, la plus belle, son Isa Love, ma belle Isabelle qui est là avec moi, qui me tient par le bras pour sortir de sa Maison 43 et aller de l’avant, vers l’Est, vers ce Couvent qui est et sera le lieu témoin de nos plus grandes, de nos plus belles, extases.