Bien qu'il connût le circuit par coeur, il avait à chaque fois, le sentiment d'un nouveau départ ; d'une autre aventure. C'en est ainsi de tous les commencements sans doute : celui d'une nouvelle journée, comme celui d'une nouvelle année. Simple continuation mais dans notre esprit, l'illusion d'une nouvelle vie dans tous les cas.

Il avait renoncé à la convaincre de reprendre leur vie commune et se demandait chaque jour, pourquoi il se faisait ainsi complice, d'une relation qui ne serait jamais celle d'une simple amitié. Il avait enfreint la règle absolue qu'il appliquait pour chaque rupture : couper définitivement avec la personne concernée, seule condition pour avoir une chance de commencer quelque chose de nouveau ; et non pas de "re-commencer" quelque chose, car toute histoire est différente de la précédente.

Il le ferait. C'est ce qu'il se disait chaque matin. Puis il la rappelait pour convenir d'une destination de balade, ou d'un repas qu'ils prendraient ensemble.

Ainsi filaient les années ; lui, témoin de cette impuissance qui le conduisait impitoyablement vers une vieillesse âpre et solitaire, sort qu'il savait ne pas avoir choisi, destinée imposée, telle une sentence dont il ne pouvait s'affranchir.