L’âme de la famille c’est le nom que l’on porte pour l’honorer (1)

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Au petit matin, les rayons du soleil pénétrèrent dans la chambre à travers les volets fermés. Rina porta ses mains à son visage et se frotta doucement les yeux, elle n’avait aucune envie de se lever à cause de la fatigue qui avait encore le contrôle sur son corps mais elle n’aimait pas recevoir le soleil à son réveil. Elle entrouvrit tout de même un de ses yeux bleus et regarda l’horloge qui indiquait huit heures du matin. Elle soupira et s’assit dans son lit, elle avait dormi seulement trois heures et elle se demandait comment elle allait tenir toute la journée comme ça.

- Je dois avoir des cernes affreuses.

Elle ouvrit les yeux complètement cette fois-ci et passa une main distraite dans ses cheveux, bien entendu ils étaient pleins de nœuds, puis de sa main gauche elle passa sa main sur le côté du lit pour sonder l’éventuelle présence d’un corps. Tin ? Le baume n’était plus sûr le bureau, il l’avait récupéré.

- Il est où ? Il ne peut pas déjà être levé ! Ragh.

Elle se leva rapidement mais peu motivée. Sa main droite se leva et fit ouvrir à distance les portes de l’armoire pendant qu’elle baillait, espérant chasser un peu de sommeil. Tout à coup une robe sortie du meuble pour se déposer avec légèreté sur le rebord du lit, elle était violette comme la lavande et elle était légèrement brodée au niveau de la taille pour que ça cintre la tenue. La robe lui arrivait presque aux bas des chevilles, elle était relativement évasée pour souligner les rondeurs du corps de la jeune demoiselle. Le vêtement avait aussi des manches longues, tout de même nous étions en hiver.

Grâce à sa magie elle fit son lit rapidement mais elle alla elle-même ouvrir ses volets pour ne pas abuser. La cour et sa serre étaient blanche de neige et de gros flocons tombaient encore, un sourire traversa son visage, elle n’avait pas froid même s’il faisait aussi frisquet que le soir précédent, ils avaient l’habitude à présent dans ce royaume où l’hiver régnait durant de très longs mois. Elle ferma sa fenêtre peu après, pour ne pas que trop de froid pénètre dans la chambre et elle partit en direction de la porte quand elle se rappela soudainement qu’elle devait faire quelque chose. Envoyer une lettre à Tessa. Elle songea à aller la faire dès maintenant mais son ventre criait déjà famine, tant qu’elle décida de le faire plus tard. Quand elle émergea dans le couloir elle entendit que des gens s’affairaient déjà dans la cuisine. Apparemment Mino aussi était levé ce qui était étonnant avec le calmant du baume qui agissait de longues heures.

- Et bah il est motivé pour une fois.

De loin Rina voyait que la porte de son petit frère était entrouverte mais avant de descendre elle alla dans la salle-de-bain pour se doucher car elle n’avait pas eu le courage d’y aller la veille après tout le remue-ménage qui avait régné.

La salle-de-bain était vaste, dans différentes teintes de gris et elle comportait à la fois une grande baignoire et une grande douche comme celles des Italinos, des confrères d’Italina qui avaient ses douches caractéristiques. Elle enleva sa robe qu’elle posa sur un porte-manteaux et alluma l’eau avant de s’y glisser. L’eau chaude contrastait avec les températures hivernales de l’extérieur mais aussi celles du manoir, naturellement certaines parties était plus difficiles à chauffer en raison de la grandeur des pièces. Rapidement elle termina pour attraper une serviette de bain, sa douche avait était rapide car sa curiosité faisait qu’elle voulait savoir ce que fabriquait ses frères à l’étage inférieur si tôt le matin. Elle se sécha et enfila de nouveau sa robe, attrapa au vol sa brosse à cheveux pour arranger tous les nœuds qu’ils contenaient mais au bout de quelques minutes, quand elle en eu marre de tout cela, elle prononça une incantation qui eut l’excellent effet de les rendre extrêmement soyeux, la magie avait bien des avantages. Satisfaite, elle sortit joyeusement de la salle-de-bain et se dirigea au pas de course au travers du couloir pour descendre les escaliers pour enfin voir ce que mijotait ses deux frères, quand elle fut à la moitié de l’escalier elle s’arrêta et observa, d’ici nous pouvions avoir une vue sur la cuisine qui était de l’autre côté du salon. Elle chercha des yeux les personnes concernées et contre toute attente elle entendit plusieurs voix différentes. Au lieu de deux, il y en avait quatre.

Intriguée elle descendit doucement les marches et suivit les voix qui menaient au jardin, qui pouvait être là à cette heure ? Elle priait intérieurement que ce ne soit pas Kizune qui se retrouvait nez à nez avec son frère. Elle prit le temps de prendre son châle de la veille qui était resté sur la chaise du salon et de le mettre. En écartant doucement le rideau de soie, de la grande porte menant du salon au jardin, elle écarquilla les yeux. Elle ouvrit la porte à la volée et se précipita dans les bras d’une mystérieuse femme qui était en train de discuter avec ses frères.

- Maman !

Rina se blottit dans les bras de cette grande dame avec joie, elle qui serrait la jeune fille qui s’était jetée dans ses bras avec force et émotion. Des légères larmes coulèrent le long des joues des deux femmes qui semblaient très heureuses d’enfin se retrouver.

- Ma Rina, enfin. Tu n’as pas eu de soucis avec Zluna ?

Elle avait murmuré pour que seule sa fille entende, celle-ci s’était raidie avant de lui répondre avec douceur légèrement lassé de devoir en parler dès son arrivée.

- Nous en parlerons plus tard si tu le veux bien maman.

Qu’elle attaque ainsi l’avait déstabilisée, surtout qu’elle la soupçonnait de savoir déjà toute la vérité sur ce qui s’était passé.

Pendant quelques secondes encore, Rina serra sa mère dans ses bras puis se décolla pour la regarder avec tendresse, elle s’appelait Jeanne Grintofk. Elle avait d’adorables rondeurs du haut de son mètre quatre-vingts et elle avait des cheveux d’un noir de jais qui qui lui arrivait à la taille. Son visage avait aussi de magnifiques yeux vert émeraude, c’est elle qui avait donné à Mino ses cheveux noirs et à Tin ses yeux verts. De très légers sillons marquaient son visage ce qui la rendait encore plus radieuse mais c’était une femme imposante qui savait se faire respecter surtout en tant que capitaine dans l’armée impériale. Juste après elle se hâta de s’envelopper dans ceux de son père. Jonas Grintofk. Un grand homme d’un mètre quatre-vingt-dix qui possédait des cheveux blonds en queue de cheval et des yeux bleus comme l’océan soulignés par les pattes d’oies de son regard.

- Papa… Vous m’avez tant manqué.

- Toi aussi tu nous as manqué ma chérie.

Quelques secondes plus tard, elle se détacha du lieutenant et recula pour se placer à côté de ses frères qui étaient à quelques pas, cependant elle se retourna vivement sur eux avec un regard qui les dévisageait de toute leur hauteur.

- Pourquoi vous ne m’avez pas réveillé vous deux ?!

- On vient à peine de descendre, on est descendus en même temps et ils sont arrivés deux secondes avant que tu arrives.

Mino la regarda et à mieux y voir elle constata qu’effectivement ses yeux étaient encore embrumés de sommeil, il devait commencer à déjeuner quand ils sont arrivés. Elle se retourna de nouveau vers ses parents et croisa ses mains sur le devant de sa robe en leur adressant un regard intrigué.

- Mais, dites-moi, Tin nous a dit que vous deviez arriver cet après-midi, il n’est que huit heures.

Rina vit ses parents se regarder du coin de l’œil comme pour se parler mentalement, s’ils comptaient être discrets c’était peine perdue surtout avec cet air grave sur leurs visages. La maman de la petite fratrie posa sa main droite sur sa hanche et se mit à rire.

- Disons que nous avons contourné un contre-temps !

- C’est-à-dire maman ?

- Rien de bien fabuleux on a juste détourné des brigands qui souhaitaient nous rencontrer mais ça a été simple pas vrai Jonas ?

- Oh oui bien sûr ! Vu que nous ne voulions pas être ralenti, nous avons fait un petit détour.

Rina regarda du coin de l’œil son grand frère qui fronça les sourcils. Il ne les croyait pas ça se voyait mais il n’en montrait trop rien car Rina vit le regard que lança sa mère à Tin pour qu’il ne dise rien. Rina et Mino se lancèrent un regard entendu mais ne dirent rien non plus de leur côté.

- Maman j’ai fait des nouveaux gâteaux !

Rina se mit à sourire et remercia intérieurement Mino de son intervention pour changer le sujet.

- Et heureusement qu’avec Tin nous étions là pour ranger

- Un véritable capharnaüm !

Le rire de Tin résonna dans le jardin ainsi que ceux de ses parents, Jeanne posa sa main sur l’épaule de son aîné et de son autre main elle ébouriffa les cheveux de son plus jeune enfant avec malice.

- Montre-moi tout ça jeune cuisinier Grintofk !

Jeanne commença à partir avec Mino et Rina posa un regard sur Tin pour qu’ils les suivent, elle voulait parler à son père sur tout ce qui se passait en ce moment. En voyant le regard de sa sœur, Tin ne chercha pas à répliqué et il hocha la tête positivement pour lui dire qu’il allait respecter sa demande et parti à la suite de sa mère et de son petit frère vers la cuisine. A peine avait-il passé la porte que Rina entendait déjà des rires, ce qui eut le mérite de lui réchauffer le cœur. Elle qui était dos à son père se retourna et lui adressa un sourire timide, elle ne savait par où commencer.

- Que se passe-t-il chérie ?

Rina regarda son père avec gratitude qu’il ait commencé la conversation, elle ne confiait que peu à lui en temps normal mais elle pensait qu’il serait plus apte à gérer cela.

- Je peux te parler de quelque chose ?

- Bien sûr viens, assis toi là je t’en prie.

Rina s’installa sur un banc en pierre qui se trouvait non loin d’eux puis son père s’installa près d’elle, elle croisa ses genoux et posa ses mains nerveuses dessus. Elle triturait ses doigts, elle s’inquiétait sûrement pour rien mais elle avait besoin d’en parler à quelqu’un.

- Papa... je suppose que vous êtes au courant pour hier ?

- Oui Tin nous en a parlé vaguement avant que Mino ne se précipite dans les jupes de votre mère. Tu veux m’en parler ?

Pendant qu’il avait dit cela il avait passé une main dans ses cheveux blonds, signe qu’il manifestait une gêne par rapport à cela et sans doute par son manque d’informations, pour un militaire c’était dur surtout quand ça concernait sa propre fille.

- Disons que je ne veux pas vraiment parler de cela, c’est terminé et le mal a été fait je…

- …Mais ce n’est pas ta faute chérie !

- Mon dieu papa je sais, laisse-moi parler !

Pour toute réponse, il fit un petit moulinet de sa main droite pour l’inviter à continuer.

- J’aimerais te montrer quelque chose qui pourrait nous aider dans la vie de tous les jours mais aussi j’aimerais savoir si vous avez eu des... échos par rapport aux vies que j’ai pris ?

- Alors non pour le moment nous n’avons rien eu mais on ne va rien avoir je pense, les gens ont trop peur pour ça. De plus, ils ne sont pas assez bêtes pour divulguer ça à l’armée du pays qui est en majorité remplie de Sokl. Que veux-tu me montrer ?

Elle pensa que c’était une bonne chose mais elle souhaitait continuer dans la voie qu’elle commençait à prendre.

- Tu sais bien que pour le moment ils sont aveuglés papa.

- Je sais bien ma fille.

- Ce que je veux te montrer pourra peut-être vous aider pendant vos missions, j’ai montré cela à Tin hier et il m’a en quelque sortes approuvé.

- C’est quoi exactement ?

- Des baumes.

- Des baumes ?

- Oui, quand je me suis rendu compte que je me blessais, je me suis dit qu’il fallait que je trouve un moyen de me guérir par moi-même étant donné que je ne pourrais pas aller chez le médecin, que Mino ne serait pas toujours là et que ma magie serait trop dangereuse sur moi-même. Attends, laisse moi finir. Grâce à Mino j’ai créé des baumes pour toutes sortes de maux, en passant de la petite brûlure à la grosse fracture.

- C’est intéressant en effet.

Bien qu’elle ait parlé assez rapidement pour empêcher son paternel de répondre, celui-ci passa sa main sur ses cheveux blonds et regarda sa fille d’un air empli de fierté.

- Tu as réussi à dompter Zluna on dirait ? Enfin partiellement si elle te laisse vivre ainsi.

- Disons que si je me guérie je la guérie aussi et donc si elle ne veut pas périr je dois prendre soin de « nous ».

Rina fit des guillemets quand elle prononça le « nous » car oui elle étaient liées dans le même corps mais elles étaient en tous points différentes. La jeune fille adressa un sourire radieux à son père tout en se replaçant correctement sur le banc gelé, ses mains commençaient à devenir rouges à cause du froid et ses lèvres légèrement bleutées.

- C’est Tin qui m’a fait comprendre ça et je l’en remercie fortement. Grâce à lui, je n'ai pas fait de monstrueuses folies.

- Je vois ça, je n’ai pas de réelles questions de m’inquiéter si je comprends bien ?

- Pas réellement papa, mais dis-moi... vu que j’arrive à la contrôler du moins partiellement est-ce que vous pouvez revenir à la maison comme avant ?

Son père se frotta la nuque, signe de réflexion et Rina n’aimait pas vraiment ça. C’était tout ce qu’elle voulait, que tout redevienne comme avant.

- Disons que je ne peux rien te promettre, en ce moment le gouvernement est strict avec les combats internes et honnêtement avec ta mère on se demande si on pourra revenir plus souvent.

- Je vois, mais ça n’a rien à voir avec Zluna ?

- Non je ne penses pas chérie mais tu sais quoi ? Demande à ta mère, elle est plus gradée que moi elle saura mieux te répondre je pense. Je n’ai pas envie de te dire de fausses informations.

Rina hocha la tête et se leva, elle était frigorifiée par ce temps qui devenait de plus en plus maussade.

- Viens papa on rentre, je suis sûre qu’ils sont en train de dresser la table.

- Allons-y.

Monsieur Grintofk s’était donc levé et avait épousseté son pantalon pour enlever les éclats de givre qui le maculaient. En passant à côté de sa fille, il toucha d’une main son épaule gauche avec douceur et ses sourcils se froncèrent légèrement.

- Hm rappelle moi de te remettre ta température interne en état.

Tout en acquiesçant, la jeune fille poussa la porte du salon pour pénétrer dans l’immense manoir, qui peu à peu, grâce à ses anciens habitants, reprenait vie.

(1) Citation de Sonia Lahsairi.

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