La solitude

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Être seul et ne pouvoir tomber amoureux, voilà le triste constat d’un nouveau dimanche d’été. 

Un spectacle absurde, absent de tout plaisir, où le temps ne fait que passer, inévitablement, sans qu'il n'emporte rien d'autre avec lui.

Seconde après seconde, la solitude s'installe. Et puisque la vie ne se suffit pas, je vole cet instant au temps pour en faire un écrit, une nouvelle fois.


Enfermé et désespéré, je me fais témoin de mon errance d'esprit. Je suis un spectateur impuissant que le recul oblige à la passivité. 

La culpabilité de l'inaction me ronge-t-elle encore ?


Cela fait bien une éternité que je ne ressens plus. Je ne suis plus que corps parmi les fous. 

Mais je l'ai voulu. Comme une dernière fulgurance avant de partir, tout détruire et  faire de mon esprit une belle œuvre d'art existentielle. 

J'ai rêvé que mes larmes soient belles.

Alors, méthodiquement, j'ai tué mes rêves et mes dieux. Un par un, calmement, n'éprouvant qu'une légère douleur en les voyant partir.

Puis, dans un dernier élan, je l'ai tué, elle. 

Elle, ce soleil qui inondait de sa pleine lumière mon monde dévasté. Elle, mon seul secours. Elle, qui se définissait encore par l'émotion. Elle que je trouvais belle au milieu de toutes mes ruines.



Oui, j'y suis arrivé, et je me vois touchant la vérité, la liberté, le sentiment originel ! 

Le fond, je l'ai atteint, enfin, la racine de l'univers, elle se dresse face à moi !

L'autodestruction à sa phase finale, l'introspection absolue, la pure conscience. 

Une totale réussite, l'oeuvre parfaite et mes yeux magnifiques, qui, soudainement, inévitablement, s'inondent de détresse. 

Je suis seul, pour la première fois.

Je suis seul, mes cris ne portent plus.

Je suis seul et personne ne pourra me sauver.


Enfermé dans ma solitude, piégé dans ma schizophrénie, condamné au vide, au vide qui m'entoure, que me ronge, qui se lie peu à moi. Je me sens fondre en lui, et pour demain, je le sais, je ne faire qu'un pour disparaître, totalement.


Sans terres où me reposer, tourmenté inlassablement, jusqu'à la démence, jusqu'à l'oubli total de mon être. Je subis mon inexistence, au milieu de mille certitudes, où ni Dieu ni mère ne viennent consoler mon âme saccagée.



Ainsi soit ma vie, ainsi soit le monde.

Seul au centre de l’univers, je ne sens que mes larmes.

Et il y a ces visages que j’aimais, où je me perdais dans leurs beautés sans nom, paisiblement. Oh oui, de ses amis qui me composaient autrefois, il n’y a plus rien à espérer, puisqu’il n’y a plus rien à fuir. 


Quand le vide te prend, il ne laisse rien.

Et je contemple ce drame immense, en y prenant toute la mesure. 

Si seulement... Si seulement j’arrivais encore à paniquer, à me battre, à désirer y sortir.

Mais non, tout est mort. 
De mon existence au monde, mes plénitudes et la force du combat, tout est mort, perdu, éventré par ma seule raison.


Mais la lucidité ne dure qu’un temps.

Non, je ne rêve plus, mais je me souviens, parfois.


De la contemplation du ciel et ses étoiles, je me rappelle de cet autre que j’ai dû être. 

Maladroit souvenir d’un enfant qui avait appris à aimer, qui adorait aimer et se sauvait du monde grâce à ces yeux à elle.

Elle qui n’existait pas mais qu’il admirait tout entière.

Elle qui défiait l’empire; qui terrassait le mal d’un regard savoureux, sans un mot, sans un bruit, lorsqu’ils croisaient avec douceur mes yeux contemplatifs.

Et ce grand sourire, porteur de mille projets indécents.

Et cette complicité que nos dieux ne savaient expliquer.

Et ces folles aventures qui n'arrivait qu’a nous.

Elle, la fuite parfaite vers laquelle on se retourne, fatalement.


Cet enfant magicien n’avait comme seule certitude un amour pour une fille, comme seule satisfaction de l’admirer, elle. 

Le bonheur simple, la naïveté poétique et son monde, magnifique.


Cet enfant-là, je l’ai tué, comme toutes ces belles choses d'antan. 

Et je le pleure aujourd’hui, comme un regret impardonnable, que je porterais, jusqu’a la fin.



La solitude, c'est faire face à son inexistence.

Le seul combat, le centre de l'univers entier,

Et au moment de toucher le fond, tu le découvres.

Si lutter, c'est exister, je ne suis plus rien. 


Et je terminerais mon errance, seul, en m'imaginant ses yeux, encore une fois, avec l'espoir fou qu'ils pourront me rassurer.

Une dernière fois, savourer une vie qui m'a échappé.

Une dernière fois, pour y chuchoter nos douces prières :

“Juqu'ici, tout va bien... Jusqu'ici, tout va bien...”

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