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Il évoluait à la surface du lac gelé, ses patins y dessinant des motifs abstraits de toutes sortes. Il filait sur la glace, ses pensées défilant au rythme du paysage. Il se posait de nombreuses questions sur ce qu’il avait vécu, et sur l’étrange monde des adultes qu’il peinait à comprendre. La vie heureuse qu’il avait vécue à la cour de son père lui manquait. Souvent, il se remémorait des moments passés avec Akira et Kaneko. Pensaient-elles à lui ? Que faisaient-elles à présent qu’elles ne s’occupaient plus de lui ? Et son père, cherchait-il à le retrouver ? Et son oncle, que pensait-il de cette aventure ? En tout cas, s’il y avait une personne qui ne lui manquait assurément pas, c’était sa tante. Peut-être était-ce elle qui avait donné au roi l’idée de l’assassinat. Ses pensées le menèrent au soir où sa mère et lui avaient quitté le palais. Qu’était-il advenu de Liz après qu’elle les ait aidés à prendre la fuite ? Pourquoi les adultes étaient-ils si compliqués ? Il se fit la promesse qu’une fois devenu grand il chercherait toujours la vérité, et qu’il servirait la justice. Car lorsque l’on recherchait le bien, tout était simple puisqu’il n’y avait pas à mentir ou à manigancer des stratagèmes.

Un vent glacé souleva des flocons de neige et les emporta en un tourbillon. Il frissonna et décida de rentrer. Après avoir rejoint l’endroit où il avait laissé son sac et ses bottes, il retira ses patins pour se chausser, prit le reste et partit. Sur le chemin du retour, il s’amusa à marcher dans les empreintes qu’il avait laissées dans la neige à l’aller. Une fois revenu à la maison, alors qu’il rangeait ses affaires, il sentit qu’une ambiance étrange régnait dans la maison. Pas un son ne se faisait entendre et il ne voyait personne. Intrigué, il se fit attentif, et sans y réfléchir sonda les lieux au moyen de son pouvoir. Les autres étaient à l’étage, dans la chambre de sa mère. Il s’inquiéta immédiatement. Les épreuves qu’ils avaient traversées et son état l’avaient considérablement affaiblie. Était-elle tombée plus gravement malade ?

Il commença à monter les escaliers. Une porte s’ouvrit et quelqu’un arriva en haut des marches. C’était Liam, il avait l’air soucieux.

« Ah, tu es rentré.

- Que se passe-t-il ?

- Ne t’en fais pas.

- Est-ce que ma maman est en danger ?

- Non, Niels et Sylvia s’occupent d’elle. Viens, mieux vaut ne pas les déranger. »

Le neveu de Niels s’efforçait d’être rassurant. Nikita était fréquemment sur la défensive, ce qui n’était guère étonnant au vu de ce qu’il avait dû vivre, bien que ni lui ni sa mère n’aient raconté leur histoire. Les deux garçons se rendirent au salon, et le plus jeune questionna à nouveau :

« Qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi ne puis-je pas voir Maman ?

- Tu pourras après, mais pour l’instant il faut attendre un peu. »

Liam ne savait pas comment s’y prendre pour détourner son attention. Après un temps de réflexion il proposa :

« Pour patienter, tu veux que je te lise une histoire ?

- Je sais déjà lire. répondit l’enfant avec une fierté candide.

- Même l’alphabet de ma langue ? sourit son aîné.

- Pas très bien. concéda-t-il.

- Alors nous allons choisir un livre facile. »

Le plus grand soupira intérieurement. Heureusement que son interlocuteur était si jeune, sinon sa diversion n’aurait pas fonctionné. Il attrapa un livre de contes sur une étagère de la bibliothèque. Tous deux prirent place sur le canapé et il ouvrit le volume à la page de garde.

« Peux-tu lire le titre ?

- Conteset… déchiffra l’enfant. Quelle est cette lettre ?

- Un ‘‘L’’.

- gendes. Contes et Légendes.

- C’est ça. C’est probablement l’un des livres les plus connus de l’Empire. Et tu arrives à lire le nom de l’auteur ?

- Krysta ?

- Krystal, s’amusa Liam, tu as oublié une lettre.

- Ah, c’est un ‘‘L’’ minuscule ?

- Oui, pourquoi ?

- Dans ma langue maternelle, il y a une lettre semblable, mais qui ne se prononce pas en fin de mot si elle est précédée d’une voyelle.

- Ça a l’air complexe.

- Oui, elle est assez compliquée, même pour les natifs.

- Tu me l’apprendrais ?

- Je ne sais pas si j’y arriverais, mais on pourra toujours essayer.

- Après avoir lu un peu de Contes et Légendes, alors. Comme ça, je pourrai t’aider aussi à progresser dans ma langue.

- Ce sera comme un échange. » sourit le petit garçon.

Liam était touché qu’il ait accepté de lui enseigner. C’était signe qu’il lui faisait confiance. Lorsqu’il employait cette langue étrangère à l’Empire, c’était pour parler avec sa mère, comme pour se couper quelques instants de ceux chez qui ils vivaient.

Les deux garçons lurent ensemble une première histoire. De temps en temps, Liam expliquait un terme à Nikita, puis ils échangeaient leurs impressions sur le récit et en discutaient les péripéties. Alors qu’ils commentaient le dénouement ils entendirent un cri. Nikita se leva d’un bond et regarda anxieusement vers l’escalier qui menait à l’étage.

« Ne t’en fais pas, commença Liam, il n’y a rien de grave.

- Que se passe-t-il ? questionna à nouveau son cadet.

- Eh bien… ta mère… va bientôt accoucher.

- Elle est en danger ?

- Non, je ne pense pas. Mais mon oncle ou ma mère nous diront quand ce sera terminé. »

Un silence pesant fit suite. Lentement, le plus jeune s’assit à nouveau, le regard sombre et inquiet.

« Veux-tu reprendre la lecture ? proposa Liam.

- Si cela me permet de me changer les idées, autant le faire. »

L’aîné eut un petit temps de surprise. Nikita faisait parfois preuve d’une étonnante maturité pour son âge. Ils continuèrent à lire, mais l’ambiance était tendue. Même s’ils faisaient mine de s’y intéresser, il leur était difficile de se concentrer sur l’histoire. Finalement, après un moment infini, des pas lourds se firent entendre dans les escaliers. Niels entra dans le salon, l’air exténué. Les deux garçons attendirent qu’il parle, inquiets. Il s’adressa au plus jeune :

« Tout s’est bien passé, tu peux aller voir ta mère. »

À ces mots, l’enfant se leva vivement et se précipita à l’étage. Une fois devant la porte de la chambre, il hésita. Il toqua timidement. Sylvia lui ouvrit et lui dit avec un sourire :

« Entre, elles t’attendent. »

Il fit quelques pas dans la pièce. Sa mère était dans son lit, et tenait un tout petit nourrisson dans ses bras. Elle paraissait très fatiguée, mais aussi infiniment heureuse. Il s’approcha du lit et regarda avec curiosité le nouveau-né. Leur mère prit la parole :

« Nikita, je te présente ta petite sœur. Elle s’appelle Alisa. »

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