Chapitre 1 - Louis -

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Ce soir-là j’ai terminé à dix-huit heures. J’étais avec mes amis, à attendre mon bus quand cette j’ai vu cette fille un peu plus loin, dans un coin reculé des autres lycéens. Elle était avec quelqu’un de grand, et bien plus costaud qu’elle. Il portait un sweat à capuche qui lui recouvrait le visage et ça le rendait d’autant plus menaçant. Il avait le poignet de cette fille dans sa main, qu’il ne cessait de resserrer. J’étais bien plus grand et fort que lui, ça je pouvais l’affirmer, pourtant, si j’étais à la place de cette fille, j’en mourrais de peur.

Le ciel était teinté de violet et le bus tardait à arriver. Je continuais de suivre ma conversation avec mes amis mais j’étais un peu distrait. Mon attention était d’autant plus porté sur le garçon dont je ne voyais pas le visage à cause de l’obscurité, et cette fille tournée dos à moi. Ses longs cheveux bruns s’étalaient en éventail sur son dos, seul le vent les faisait voler. Baptiste aussi semblait les avoir vu, mais il n’y a pas prêté davantage d’attention. Je commençais à me dire que je devrais en faire autant, que ce n’était pas mes affaires et que je devais probablement me faire des idées, ce n’était peut-être pas ce que je pensais. Puis, tout à coup, la main du garçon s’est levé et son poing s’est refermé sur le visage de la fille. Sans plus attendre, le cou de cette dernière se tord et pivote vers la droite, elle remonte une main libre sur sa joue. Aussitôt, je vais à leur rencontre, suivi de près par Baptiste qui tente de me retenir. Je lui en toucherais deux mots plus tard. J’interpelle la fille, lançant quelques regards préoccupé au garçon :

— Eh ! Tout va bien ?

— Ça va, merci, me répond le garçon.

— C’était à elle que je demandais, je rétorque.

— Et c’est moi qui te réponds. Maintenant dégage.

Je m’apprête à les laisser, mais je me ravise. Je m’approche alors un peu plus du garçon et lui signifie de partir d’un mouvement de tête. De loin, il semblait très grand mais depuis que je suis face à lui, je me rends compte que ce n’est qu’une question d’attitude. Il doit mesurer un mètre soixante-quinze, à peine, et de mon mètre quatre-vingt-cinq, je le domine complètement. Il ne demande pas son reste et part, non sans menacer la fille d’un regard noir, et je la reconnais désormais. Il s’agit d’Aurore, à un moment elle était amie avec des filles de ma classe, aujourd’hui, je ne les vois plus jamais ensemble. Elle est dans mon lycée, en terminale aussi, depuis trois ans. Je ne lui avais jamais parlé, ou alors très brièvement.

Je m’assure à nouveau qu’elle aille bien et lui propose de venir avec moi, avec mes amis. Elle me lance un regard plein de dédain et, pendant un instant, j’ai envie de l’insulter, presque même de lui dire qu’elle avait finalement méritait le coup qu’elle avait pris. Je viens de la sortir d’une telle situation et elle ose me traiter de la sorte ? Mais c’est parce que je sais dans quelle situation elle vient d’être que je ne la force pas et que je me contente de comprendre son geste. Je sais qu’au fond d’elle, ce n’est pas une fille méchante, bien au contraire. Nous sommes dans un petit lycée, et on se connait tous, même sans se parler, nous entendons les histoires de tout le monde constamment. La plupart des autres élèves disent d’Aurore que c’est une fille gentille, qui ne cherche jamais les problèmes et qui a même tendance à apaiser les conflits. C’est une fille simple et sans histoire, drôle et intelligente. Mais elle se méfie de moi, et je ne peux pas lui reprocher, au vu de la réputation que j’ai ici. Je suis plutôt l’inverse, un garçon populaire avec tous les clichés qui vont avec. Alors je lui fais un dernier signe de tête et rejoins mon groupe.

Peu de temps après, le bus arrive. Je monte, passe ma carte et me réfugie dans le fond, mon sac sur un siège à côté. Je connecte mes écouteurs à mon téléphone et lance ma playlist de rap. Par la fenêtre, je vois Aurore, le regard dirigé vers le ciel. Ses joues sont humides et la trace du coup qu’elle a prit est imprimée sur son visage. Elle doit sentir mon regard qui la scrute puisque ses yeux descendent et viennent finalement se poser sur moi. Elle esquisse un sourire, il me semble gratifiant.

À la pause de dix heures ce matin, j’arpente les couloirs du lycée à la recherche d’Aurore. Je voudrais la voir pour m’assurer qu’elle va bien. J’ai déjà passé tout le premier étage en revue, en vain.

— Tu cherches quoi comme ça ? Me questionne une camarade de classe avec qui je m’entends plus ou moins bien.

— Rien qui ne te concerne, puis je réfléchis et me rappelle les avoir déjà vu se parler plusieurs fois avec Aurore. Attends.

— Quoi ? Faut savoir, me répond-elle visiblement vexée.

— Tu connais Aurore, pas vrai ?

— Ouais, on était amies en seconde. Pourquoi ? T’es plus avec Jeanne toi ? Me lance-t-elle avec un sourire mesquin.

— Quoi ? Si. C’est une longue histoire, est-ce que tu as son numéro ?

L’histoire n’est pas si longue, en fait, mais je n’ai ni envie de lui raconter ce qui s’est passé la veille, ni envie d’ébruiter les problèmes personnels des autres. Enora, ma camarade, me tend alors son téléphone déverrouillé sur le contact d’Aurore. Je rentre le numéro dans mon téléphone et la remercie. En me rendant à mon casier en bas, j’envoie un message à Aurore. Je ne sais pas vraiment pourquoi je fais ça, mais je le fais sans trop me poser de questions.

De : Louis À : Aurore

Salut, c’est Louis. Tu vas bien ?

J’hésite à préciser que je la cherche mais je me dis que c’est mieux si je m’abstiens Quand je déverrouille mon cadenas, je vois une petite tête brune arriver, le visage tourné vers le sol. Elle s’arrête deux rangées après moi. D’un air désinvolte, je lui adresse un salut, qu’elle ignore complètement.

— Tu vas bien ? Je t’ai envoyé un message il y a quelques minutes justement !

— Je sais. J’ai vu, me répond-elle avec détachement.

— Mais tu n’as pas répondu.

— Non. Écoute, je pense que tout ça te fait du bien à la conscience mais tu n’as pas besoin de faire ça. Alors c’est gentil et je t’en suis reconnaissante. C’est bon, tu as fait ta bonne action, tu peux... avancer.

Son ton est assez cinglant et je ne sais pas vraiment quoi répondre. Alors qu’elle referme la porte de son casier et part déjà, je reste là, au milieu du couloir, comme un idiot. Sa réponse m’a fait l’effet d’une gifle.

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