Chapitre 10

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Lorsque Pippa ouvrit les yeux, la pièce était plongée dans l’obscurité. Même la lune peinait à baigner les lieux de sa douce lueur. La jeune femme s'agita, incapable de trouver le sommeil. Elle suffoquait dans sa robe droite un peu trop serrée.  Elle songea à se lever pour ouvrir la fenêtre, mais elle se ravisa. Elle ne voulait pas prendre le risque de réveiller Tom. Se déshabiller n’était pas non plus la solution adéquate. Il suffisait qu’un membre du personnel la trouvât à demi endormi pour qu’elle soit l’objet des commérages les plus désobligeants. 

Une porte claqua bruyamment et Pippa hoqueta.

— Tout va bien ? demanda une voix dans la pénombre.

Pippa remonta le drap sur sa bouche. Décidément, la discrétion n’était pas son fort...

— Pourriez-vous ouvrir la fenêtre ? Il fait une fournaise, lui chuchota-t-elle.

Un bruit sourd, similaire à un coup porté contre un meuble, retentit. Pippa aurait pu jurer que Tom s’était cogné contre la table de chevet. Elle l'imaginait, serrer les dents à s'en faire saigner la gencive pour ne pas vociférer. Elle l’entendit se redresser. La fenêtre s’ouvrit dans un bruit sec. Une légère brise s’engouffra dans la chambre et l’ambiance lui parut soudainement moins étouffante.

— Merci Tom, souffla Pippa. 

Une goutte de sueur descendit le long de son dos.

Demain, tout cela ne serait qu'un mauvais souvenir, songea-t-elle. 

Pippa ferma les yeux et glissa ses mains moites sous le traversin. Son cœur bondit à nouveau lorsque la voix de Tom brisa le silence.

— Je ne m’attendais pas à ce que cette journée prenne un tel tournant. Si j’avais su nous aurions pris le car, constata-t-il.

Pippa gloussa. Tom n’avait rien d’un homme qui prenait le bus.

— Pourquoi riez-vous ? lança-t-il, visiblement vexé.

Elle l'imaginait déjà passer sa main dans ses cheveux bruns pour dissimuler sa contrariété. Elle rit encore. Incapable de se retenir. Ses nerfs lâchaient, elle ne pouvait rien y faire.

Tom se tourna sur la droite, espérant découvrir la raison à cette hilarité.

— Excusez-moi Tom. Mais... Je ne vous vois pas prendre les transports en commun.

Pippa fut à nouveau prise d'un fou rire. 

— Bien. Vous avez gagné. Je retire ce que j’ai dit. Jamais je n’aurais pris ou prendrais l’autocar. 

Puis, il se mit lui aussi à rire, jusqu'à ce qu'un craquement, proche de celui d'un craquement d'os, mette fin à leurs éclats.

— Vous avez entendu Tom ? S'inquiéta Pippa.

— Je crois que je me suis coincé le dos, marmonna-t-il.

Sa respiration était plus vive. Pippa se glissa vers la table d’appoint et alluma la lumière. Tom se tenait le dos avec fermeté. Son visage était si blanc qu'elle crut ne pas le reconnaître.

— Oh mon dieu, Tom ! réalisa-t-elle.

Ses yeux, ébahis, formaient deux énormes billes. Elle se jeta hors du lit et se pressa à ses côtés. Elle se laissa tomber sur les genoux puis posa doucement sa main sur son épaule. 

— Vous pouvez-vous lever ? lui demanda-t-elle, inquiète.  

Tom se mordit la lèvre. Sa mâchoire était aussi crispée que la reine mère. 

— Je crois que oui, bafouilla-t-il.

Pippa entoura la taille de Tom avec ses deux bras. Ainsi, elle lui servirait mieux d'appui. Tom se releva. On aurait dit qu’il était à deux doigts de tomber dans les pommes.

— Allongez-vous sur le lit. Vous y serez mieux. 

Elle l’aida à s’assoir puis le libéra de son emprise. Elle s’installa à ses côtés sans le quitter des yeux.

— Vous faites peur à voir, lui dit-elle.

Un sourire se dessina au coin de ses lèvres. Tom la regarda sans rien dire. Il n’avait pas la force de prononcer le moindre mot. Ses cheveux ondulés lui tombaient dans les yeux tandis que son visage pâle ruisselait de sueur. Pourtant, malgré son apparence maladive, Pippa ne put s’empêcher de le trouver attirant. Très attirant même. Si bien que son cœur s’emballa.  Elle pouvait même sentir ses battements remonter le long de sa gorge. Elle serra son pendentif entre ses doigts, appréhendant la possibilité que Tom puisse déchiffrer ses pensées. Il toucha la chevelure rousse de Pippa et enroula ses doigts autour d’une de ses mèches. Pippa n’osait plus respirer, de peur de fauter. Elle ne s’était encore jamais retrouvée dans une telle situation. Et elle était perdue. Tom dénoua la mèche de son index et la glissa derrière l’oreille de Pippa. Leurs visages n’étaient plus qu’à quelques centimètres l'un de l’autre. Elle pouvait sentir le souffle de Tom effleurer ses lèvres. Malgré que sa peau fût parcourue de frissons, Pippa ne bougea pas d’un iota. Elle attendait que les choses passent, comme si elle n’était que spectatrice et non auteure de ses actes. 

— J’ai très envie de vous embrasser, souffla Tom alors qu’il s’approchait davantage de Pippa.

La jeune femme se pencha en arrière, intimidée. Ses mains s’accrochèrent fermement à la couette, sans quitter Tom des yeux. Ils semblaient comme inexorablement attiré l’un par l’autre. Tom posa sa main sur celle de Pippa. 

Il portait encore son alliance. 

Elle ne l’avait jamais remarqué jusque-là. Pour la première fois, Pippa ressenti une certaine forme de jalousie. Elle releva les yeux, feintant d’ignorer ce geste. Et c'est alors que leurs lèvres se rencontrèrent.  Ce baiser n’était pas doux, ni même fougueux. Mais pressé. Comme si Tom était attendu à une partie de tiercé. Pourtant, Pippa ne le repoussa pas. Au contraire, elle aurait voulu que Tom lui vole un autre baiser. Peut-être cette fois-ci serait-elle moins déçue ?

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