17 - Un cœur en péril. (1/2)

18 minutes de lecture

Quelle journée... en ce début d'après-midi, la chaleur est absolument insoutenable ! Je peinais à retenir la sueur s'écoulant de mon front. En ce 17 juin 2017, j'attendais nerveusement dans la salle à manger. Je faisais les quatre cents pas, revenant en avant, en arrière. M'arrêtant, reprenant ma marche sans but. Tout cela était nerveux car... j'attendais quelqu'un.

Le 17 juin. Un samedi, donc je n'avais pas cours et j'avais ainsi tout le temps possible. Cette journée est spéciale puisqu'il s'agit de la fête des pères !

Je n'ai jamais eu de bonnes relations avec lui, ni même de relations tout court en fait. Il est tellement occupé par son travail qu'il ne daigne même pas m'adresser la parole car ce serait sûrement une perte de temps pour lui. Les seules fois où nous parlons, c'est lors du dîner. Et c'est toujours à propos de mes notes qui devaient atteindre la "perfection" selon lui.

Mes notes, sans vouloir me vanter, sont excellentes. J'y attache énormément d'importance, elles sont ce qui me définissent : la perfection.

Je comprends pourquoi la plupart des gens de mon lycée sont plutôt méprisant envers moi. Ce n'est pas du harcèlement, non, c'est bien plus subtil que ça : ils me font comprendre, par l'intermédiaire de quelques remarques, que je n'ai rien de parfait.

Tout ça me hante. Je veux tellement devenir ce que mon père idolâtre, il pourrait alors me voir non pas comme un être humain mais comme... son propre fils.

Les remarques des autres me font plus de mal que je ne le laisse paraître. Je n'ai pas envie que mon image de bon élève soit sali par une jalousie maladive et probablement contagieuse vu le nombre de personnes qui ne m'aiment pas et qui ne font qu'augmenter à mon plus grand regret.

Heureusement, j'ai tout de même pas mal de personnes de confiance que je considère même comme des amis. Ayant d'excellentes notes, la plupart de mes camarades sont heureux de pouvoir être aidé par quelqu'un s'y connaissant dans le domaine qui les intéresse. J'aime ça en fait. Leur rendre service est quelque chose de plaisant. Voir des gens qui me remercient pour quelque chose que je leur ai apporté est tellement gratifiant et satisfaisant. Je fais du mieux que je peux pour ignorer les remarques déplacées de certaines personnes.

C'est également pour ça que j'adore la cuisine. Ce n'est pas parce que mon père à une chaine de restaurant que j'ai décidé de cuisiner durant mon temps libre.

Non. C'est quelque chose que j'aime.

Vraiment.

Je pourrais passer tellement de temps à lister les choses que j'aime lorsque je cuisine que je ne m'arrêterai plus...

C'est donc dans cette optique que j'attendais dans le salon, vêtu d'une chemise blanche bien repassée, une cravate noir droite et impeccable ainsi qu'un pantalon allant avec le haut : noir et tout aussi bien entretenu.

Bref, je m'étais surpassé. Même si c'était à la base une idée de ma mère qui voulait que j'aie une discussion père-fils... Chose qui n'est jamais arrivé auparavant.

Je prenais la cravate dans les mains, continuant de la "dépoussiérer" ce qui était plus un tic nerveux qu'autre chose. Je faisais toujours des allers-retours entre la table et le canapé ce qui semblait amuser ma mère :

« Ne t'inquiète pas Haron. Tu n'as pas à être aussi stressé, ce n'est pas un entretien d'embauche hahaha ! »

Ma mère avait suivi ces paroles d'un rire que je sentais légèrement forcé. Elle aussi, inconsciemment, doit penser que la réaction de mon père sera comme d'habitude, c'est-à-dire l'indifférence la plus totale...

Alors que ma mère venait de terminer son rire, un bruit de porte se fit entendre. Sauf qu'il n'était pas comme d'habitude, il était bien plus énergique :

« Ces saletés... cette génération d'enfants mal élevé sont si pénibles ! »

Il était de mauvaise humeur, clairement. Et lorsqu'il est comme ça, mon père peut être vraiment effrayant ce qui était loin d'être une bonne nouvelle.

« Qu'est-ce qu'il s'est passé ? demanda timidement ma mère.

— Une famille de riches. Ils sont venus avec leur gamin qui doit avoir l'âge d'Haron. Ils ont été les clients les plus pénibles que j'ai pu rencontrer ! Ils ne faisaient que critiquer l'endroit, la nourriture alors que tout est impeccable puisque je m'assure moi-même de la propreté des lieux. Et puis leur gamin ! Ce petit mal élevé qui n'avait que des commentaires déplacés et vulgaires avec ses parents qui ne le corrigeaient même pas ! J'ai vraiment passé une sale journée ! »

Il est vrai que mon père part rendre visite à certains de ses restaurants pour y faire, justement, l'état des lieux et il se trouve qu'une certaine famille s'est trouvé au mauvais endroit, au mauvais moment.

« Enfin bon, je suis revenu plus tôt aujourd'hui. Allez savoir pourquoi, ma secrétaire tenait absolument à ce que je rentre. »

Si tu ne sais pas pourquoi... en tout cas, je la remercie, ta secrétaire.

« Eh bien, c'est un jour un peu spécial aujourd'hui... »

Mon père tourna son regard froid vers moi :

« Ça tu peux le dire ! Jamais je n'ai eu affaire à une famille aussi méprisable !

— Ce... ce n'est pas vraiment ce que je pensais...

— Alors quoi ? »

Visiblement, mon père ne voyait pas que j'étais mieux habillé que d'habitude, qu'un gâteau fait par mes soins était présent sur la table et qu'un cadeau était disponible sur cette même table. En moi, je bouillonnais de rage, j'avais l'impression qu'il le faisait exprès mais avant même que je prenne la parole, ma mère fut celle qui m'en empêcha :

« Enfin Fabien ! Tu vois bien ce qui se passe non ?! Haron s'est donné tellement de mal et tu ne vois rien ?!

— Mais qu'est-ce qu'il se- »

Mon père s'arrêta net de parler en apercevant le gâteau sur la table avec le cadeau encore emballé à côté :

« Ah... c'est vrai que c'est la fête des pères aujourd'hui. »

Son attitude stoïque et sa manière de parler ne faisaient que contribuer à ma rage :

« Je verrais ça plus tard. Je suis fatigué et j'ai pas mal de boulot...

— Mais... tu-

— Silence Haron ! On verra plus tard. »

Alors que j'étais sur le point d'exploser, ma mère m'attrapa le bras, je me suis retourné vers elle pour la voir secouer la tête l'air de dire "ça n'en vaut pas la peine" avant de me serrer dans ses bras.

Mon père s'en allait vers sa chambre sans même se retourner ce qui me faisait mal, bien plus mal que je ne l'imaginais. Cette façon impassible qu'il a de réagir est tellement frustrante quand je sais à quel point cela comptait pour moi.

Ma mère, qui me tenait toujours dans ses bras, me consola en me chuchotant :

« Ne t'en fais pas, j'ai adoré ton gâteau à la fête des mères et je suis sûre que celui-ci est merveilleux. Il y goûtera, je peux te l'assurer ! »

C'est ce que je pensais alors que j'étais dans une espèce de dimension parallèle. Je ne suis pas un grand fan de tout ce qui est fantastique mais ma situation actuelle me faisait penser à ça. Sauf que c'était loin d'être paradisaque puisque des hurlements se faisaient entendre de partout ! Ils semblaient même venir directement de ma tête ce qui je l'espère était une impression...

J'ai tenté de me boucher les oreilles, en vain... ils continuaient ! Ces cris étaient insupportables et les écouter en boucle était tellement ignoble.

Lorsque soudainement, je me suis mis à apercevoir mon père devant moi. Ma vision était assez trouble dans cette espèce de dimension mais je reconnaissais la forme mince et ferme de son visage et en particulier ce regard ne laissant transparaître aucune émotion.

« Pa.. Papa ? Comment est-ce qu-

— C'est ça qui va continuer à faire vivre les restaurants Mélono ? C'est cet homme faible d'esprit et en particulier de coeur ?! »

Je n'en revenais pas, mon père se trouvait là, devant moi sans même se poser de questions sur ma condition actuelle :

« Mais... Papa ! Aide moi ! Je suis piégé dans un bâtiment où on est obligé de s'entretuer ! Pourquoi est-ce que tu es là ?! Pourquoi est-ce que tu ne fais rien ?! »

Mes cris désespérés étaient vains puisqu'il s'est contenté de hausser les sourcils :

« Tu avais osé me cacher ça ?! Que tu fais de l'arythmie ?! Ma progéniture n'est donc qu'un enfant raté et faible ?!

— Je t'interdis de dire ça ! Tu ne sais pas à quel point c'est un complexe pour moi et pour les gens comme moi ! Tu ne sais rien ! Rien du tout !

— Et moi je t'interdis de me parler sur ce ton ! Tu dois être parfait tu m'entends ?! Parfait ! Et j'apprends maintenant que tu as ce défaut ?! C'est impardonnable !

— Tu crois que c'est de ma faute ? Tu crois que je l'ai choisi ?! Jamais je n'ai voulu de ça ! T'as qu'a l'accepter comme Maman l'a fait ! Elle au moins, elle a su me réconforter !

— Ta mère est faible tout comme toi. Voilà pourquoi nous ne sommes plus ensemble. Il ne me reste donc plus qu'une chose à faire... »

Mon père s'était retourné, je ne voyais pas ce qu'il faisait. L'environnement est si bruyant de tous ces cris, mon adrénaline ne faisait qu'augmenter et je sais que c'est un mauvais signe car si mon coeur bat trop vite...

Tout à coup, mon père se retourna avec une vitesse impressionnante et un air malsain sur le visage, tout ça avec une paire de ciseaux à la main :

« Pa...pa ? Qu'est-ce que tu comptes faire avec ça ? »

Mon père poussa un ricanement puis répondit d'une simplicité déconcertante :

« Je vais réparer cette erreur. »

C'est alors qu'il s'est rué sur moi, et par ruer, j'entends qu'il m'avait sauté dessus, les ciseaux pointés vers le coeur :

« Laisse toi faire ! Ça ne durera que quelques instants !

— Papa ! T'es complètement fou ! Tu essaies de tuer ton propre fils ?! Tu-

Une baffe me fit ravaler mes dernières paroles :

« La ferme ! Tu n'es qu'un déchet ! Bon à jeter ! Alors laisses-toi faire ! »

La force de mon père était bien plus imposante que la mienne, je sentais que dans à peine quelques secondes, les ciseaux transperceraient ma poitrine pour atteindre l'objet attirant autant l'attention que les malheurs.

Cependant, au milieu de tous ces cris, alors que j'allais être tué par mon propre père, j'ai senti quelque chose me cogner la tête assez brutalement.

Et c'est là que tout s'est arrêté : les cris, mon père essayant de me tuer...

J'étais revenu dans cet endroit accompagné des cinq autres et la première chose que j'entendis fut la voix de l'amie de Sorel :

« Pourquoi maître ?! Pourquoi l'avoir- regardez ! Il n'est même pas assommé ! »

Je m'étais retourné vers le reste du groupe tout en me rendant compte que j'avais dans les mains une paire de ciseaux.

Je n'y comprenais plus rien.

« Haron ! Derrière toi ! »

Sorel me hurla cette indication qui me sauva d'ailleurs la vie puisqu'en faisant un pas sur le côté, je vis une hache s'abattre sur le sol d'une vigueur à couper le souffle :

« Rends-les-moi ! Rends-les-moi !! »

Une voix d'outre-tombe provenant de la petite fille me fit sursauter à tel point que je fis tomber la paire à terre.

La fillette s'est alors précipité dessus à une vitesse inhumaine avant de les brandir devant moi qui étais maintenant totalement sans défense :

« Je... veux voir ! » me cria-t-elle avant de donner un coup d'estoc en direction de mes yeux.

Alors que je ne pouvais réagir à cause de la rapidité de l'action, quelque chose se mit à retenir la fillette dans son action l'empêchant alors d'atteindre son objectif :

« C-Claria ! »

Claria tenait la gamine par les épaules, une expression d'effort intense se dessinait sur son visage :

« Dépêche Haron ! Je ne tiendrais-

Effectivement, la fillette s'était mis à pousser un hurlement assourdissant avant de projeter Claria contre le mur. Celle-ci fit un vol plané avant d'atterrir violemment sur une des portes dans un bruit sourd.

S'ensuivit alors son cri de douleur puis un rire venant de la fillette.

« Eneko aura toujours le dernier mot. »

Cette voix féroce qui semblait provenir de la fillette est toujours aussi étrange, elle ne me fait pas peur personnellement mais je la trouve terriblement dérangeante.

La situation s'emporte rapidement ici, je me devais de faire quelque chose puisque c'est de ma faute si "Eneko" se trouve là. J'ai été celui qui a été possédé, je suis donc l'entier responsable de ce qui se passe.

Je vais assumer mes responsabilités.

Le coeur battant toujours la chamade, j'ai serré le poing pour me donner du courage avant de prendre une pierre sur le sol. Je vais tenter ce que venais de faire Sorel :

« Prends ça ! » ai-je hurlé avant de lui asséner avec une pierre un coup violent sur la tête.

Je me suis, malgré moi, retenu... comment pouvez-vous frapper une fillette comme ça avec toute votre force ? Une once de pitié avait fini par ressurgir en moi ce qui a considérablement réduit la puissance du coup.

"Eneko" s'est retourné(e) presque aussitôt abandonnant alors Claria à son sort funeste. Sur son visage, un rictus de douleur (et de colère) clairement visible même avec la pénombre se dessinait. Les ciseaux dans sa main se mirent à faire des cliquetis de plus en plus rapides et violents.

J'ai dégluti ma salive, je viens sûrement de faire une erreur.

Non. J'ai fait ce qu'il fallait ! Je viens de sauver Claria ! Ce n'est pas une erreur non ?

Comme pour me répondre, "Eneko" me fit un grand sourire avant de lancer d'un air déterminé :

« Tu es le prochain. »

Je n'ai pas attendu qu'elle bouge ou qu'elle fasse quoi que ce soit, je savais ce qu'il me restait à faire puisque je connaissais déjà sa réaction : j'ai commencé à courir dans la direction opposée.

Là où tout est sombre, là où l'inconnu nous empêchait jusqu'à maintenant d'avoir un libre arbitre dans cet endroit.

J'ai couru tout en hurlant :

« Partez vous cacher ! »

Sorel me répondit presque immédiatement :

« Haron ! Ça ne sert à rien ! Tu vas mourir si t'es seul ! »

Les autres criaient également mon nom tandis que j'entendais déjà la petite me courir après mais je ne me suis pas retourné. J'ai simplement eu un sourire : pour la première fois dans ma vie, je me sentais important.

Ce n'est qu'une tentative clichée de jouer le "héros" mais cela me suffisait. Je ne les connais que depuis quelques heures certes mais au moins... je n'aurai pas montré que mon côté faible.

« Bonne chance ! »

Céleste venait de crier à travers les couloirs de sa voix fragile. Elle croyait en moi et je suppose que c'est également le cas des autres alors je ne les décevrais pas.

Et dire que j'ai essayé de la tuer à cause de mon stress...

Ce n'est pas le temps pour des remords aussi stupide qu'inutiles : ce qui est fait est fait et ça ne sert à rien de se lamenter.

Je me suis donc mis à courir du mieux que je pouvais à travers les couloirs sinueux et labyrinthiques m'orientant tant bien que mal. C'était d'ailleurs assez difficile puisque la luminosité est toujours aussi basse. Nous sommes en plein milieu de la nuit après tout, tout cela ne sera sûrement pas terminé au lever du jour...

Pendant ma course, j'entendais derrière moi les bruits de ciseaux. Ils étaient en quelque sorte rassurant parce que je les entendais de loin ce qui m'indiquait alors partiellement la position de la petite. J'espère que le petit garçon est tout aussi éloigné, je ne veux pas qu'il me fasse revivre un cauchemar pareil...

Continuant sur ma lancée, je suis finalement arrivé devant ces escaliers que nous ne sommes au final jamais allé voir. Je me suis donc empressé de les grimper pour accéder à une sorte de mini-étage supérieur tout en espérant que la petite ne me suive pas...

Tout est si sombre que j'arrive à peine à distinguer l'endroit : c'est en tout cas assez petit. Il y a deux portes sur le côté gauche du mur dont une qui était ouverte sans que je puisse voir ce qu'il y avait à l'intérieur. Sur la droite, une petite table qui n'avait plus de pieds et qui gisait au sol. Il n'y avait même pas de chaises. Cela ressemblait, pour moi, à l'endroit où des employés prendraient leurs pauses café.

Il n'y avait rien d'intéressant sur la droite et c'est la gauche qui m'intriguait de par la présence de ces nouvelles pièces. Je me disais qu'en me cachant, je pouvais également en découvrir plus sur cet endroit.

Je ne servirai pas à rien, ou du moins, je pourrais essayer de faire quelque chose qui ne nuit pas aux autres.

J'ai donc pris la direction de la porte fermée, écoutant chaque petit bruit pouvant trahir la présence de quelqu'un à proximité : la petite est en bas. Je l'entends, ou plutôt, je les entends.

Les ciseaux.

Elle est toujours en bas donc je suis à priori en sécurité. Prenant mon courage à deux mains, je me suis avancé vers la porte. J'ai tendu la main vers la poignée, tremblant légèrement.

Allez ! Quand faut y aller... pensai-je pour me donner du courage.

Déterminé, j'ai tiré la poignée vers moi et ait ouvert la porte avec une certaine rapidité qui faisait grincer les gonds.

Ce que j'ai vu à l'intérieur me paralysa de peur : une chose qui faisait approximativement ma taille se dressait devant moi. Le haut de la chose était ébouriffé cachant alors son visage mais ce qui me fit réagir, c'est le rapprochement soudain de cette créature aux cheveux en pagaille.

Il ne se rapprochait pas, il me sautait dessus !

Par réflexe, je me suis protégé en mettant mes mains devant mon visage. Je ne pouvais donc plus voir cette chose.

La chose heurta mon visage avec vigueur puis... plus rien.

« Hein... ? »

Soudain, je me suis rendu compte à quel point j'étais stupide et peureux en attrapant la "créature" de mes deux mains : ce n'était qu'un balai !

Un placard à balais ! Voilà de quoi j'avais eu peur !

« Quel abruti... je me fais vraiment des idées. »

La "pièce" n'était qu'un vulgaire placard avec rien de bien intéressant dedans mais ça avait suffi à me flanquer une frousse aussi intense qu'inutile.

Le scénario de ce qui venait de se passer prit alors place dans ma tête : le balai m'était juste tombé dessus vu qu'il reposait sur la porte et j'ai pris ça pour une créature me sautant dessus.

Le cerveau peut vraiment nous jouer des mauvais tours... ai-je pensé tout en soupirant, exaspéré de ma bêtise.

C'est avec une certaine honte envers moi-même que je me suis placé devant la seconde porte : je ne pouvais pas voir ce qu'il y avait à l'intérieur mais la pièce était plus profonde donc il y a quelque chose à l'intérieur.

Je me suis accroupi pour fouiller les alentours lorsque je me suis rappelé de la table à ma droite, j'ai donc tourné mon regard vers elle :

« Les pieds-de-table sont toujours là ? Parfait. »

Tout en m'armant de ce que je venais d'emprunter à la table, je me suis approché de la pièce sombre puis j'ai chuchoté :

« Sachez que si quelqu'un se cache, je suis armé et j'hésiterais pas à me défendre ! »

...

Pas de réponse.

J'ai fait en sorte de ne pas parler trop fort donc je suppose que ça n'a pas attiré la fillette. Enfin, je l'espère...

D'un côté, ce n'est pas un simple bout de métal rouillé qui allait me permettre de me défendre mais l'avoir me rassurait en quelque sorte.

« Il n'y a personne, je crois. »

Pensant à voix haute, j'ai lentement commencé à lever le pied pour m'approcher de l'entrée de la pièce.

« Ah... on n'y voit vraiment rien... »

Franchir le pas de la porte a sûrement été la pire erreur que je puisse faire puisqu'à peine après avoir mis les deux pieds dans ce qui était l'objet de mes interrogations, mon collier se mit à vibrer avant de dégager deux "bip".

« Qu'est-ce que-

— Bonjour Haron. »

Une voix me fit frissonner, elle semblait provenir directement de ma tête :

« A-Aftovma ? »

Un rire assez prononcé fut la réponse que j'ai obtenue, je ne comprenais pas vraiment ce qui m'arrivait :

« Non pas du tout. Je suis encore vivant contrairement à lui.

— Vous êtes...

— Exactement ! Je suis le "type de la télé", ou du moins c'est ainsi que vous m'appelez. »

Je sentis mon poing se serrer :

« Qu'est-ce que vous me voulez ?

— Eh bien. Tu vas directement à l'essentiel toi. Sache que cette pièce, comme tu l'as deviné, n'est pas vide puisque vous êtes deux à l'intérieur. »

Cette fin de phrase me glaça le sang, je ne bougeais plus ne serait-ce que le moindre petit muscle. J'étais littéralement tétanisé :

« Tu as peur ? Je te comprends. La peur est une réaction naturelle surtout quand j'annonce l'air de rien une chose pareille. »

Je ne lui répondais pas, à la place, je cherchais des yeux le moindre signe de vie. Sans succès à cause de cette fichue pénombre bien trop envahissante.

« Ne t'en fais pas, je n'ai pas besoin que de balais pour te faire peur. Je peux aller bien plus loin, regarde. »

Alors que j'étais concentré dans ma recherche, quelque chose qui semblait être un écran s'alluma subitement me révélant alors, grâce à la lumière qui s'en dégageait, la seconde personne ici.

J'ai fait du mieux que j'ai pu pour retenir mon cri de terreur devant le spectacle qui se déroulait sous mes yeux : un homme était assis sur une sorte de chaise devant une petite table en bois qui semblait avoir été rajoutée au vu de la différence entre celle-ci et l'environnement.

Ce qui me fit retenir d'hurler au secours, c'est le fait que le type avait un bras qui lui manquait et il avait d'ailleurs le visage bien amoché tout ça en baignant dans une mare de sang !

Sang qui coulait encore même si c'était à un débit très faible. Sur le bras (qui était le gauche), une brûlure très importante était présente le long du moignon. Ce type, qui qu'il soit, a dû terriblement souffrir !

Incapable de prononcer le moindre mot, le type reprit :

« Sache que si tu songes à t'échapper, ce sera alors ta dernière erreur. Au moment même où tu franchiras cette porte, un poison s'injectera dans tes veines te tuant alors dans les secondes qui suivent. Et sache que pour l'avoir déjà testé, il paraît qu'on ressent très bien la douleur.

— Vous... vous tuez des gens... vous êtes une ordure ! Qu'est-ce que vous attendez de moi ?!

— Ah ! J'y viens mon garçon ! Attends, j'aimerais l'annoncer de façon classe.

— P-pardon ?! »

L'homme se tut pendant quelques secondes avant de prendre une voix très grave puis de sortir :

« On va jouer à un jeu. »

Puis il continua de sa voix naturelle :

« Pfiou ! J'ai toujours rêvé de le faire et voilà chose faite.

— Que... quoi ? Un jeu ? »

L'homme se racla la gorge puis repris :

« C'est bien simple, à la base, celui d'entre vous qui rentrait devait jouer sa vie face à ce malheureux devant les yeux impuissants de ses camarades mais je vois que personne ne cherche mes indices ! Je me suis donné du mal pour les cacher tu sais...

— Ce n'est pas un jeu de piste ! Vous vous croyez où ?! Vous pensiez vraiment que nous allions nous plier à vos exigences ?!

— Dit le type qui a failli tuer une fille faisant pratiquement la moitié de sa taille. On se la raconte moins quand on se fait corriger par un garçon de son gabarit hein ? »

Je me suis retenu de l'insulter pour finir par soupirer :

« Ou-oubliez ça.

— Bref, je me suis dit qu'on allait changer les règles mais d'abord, regardons à quel jeu nous allons jouer. Derrière l'homme se trouve une petite boîte, va la chercher et pose là sur la table. »

Je me suis exécuté bien que passer juste à côté de ce type me faisait froid dans le dos. En m'approchant de derrière cet homme, j'ai aperçu un petit coffre en bois d'à peine trente centimètres de longueur.

En soulevant le coffre, j'ai compris qu'il n'était pas vide puisque quelque chose remuait à l'intérieur, cela semblait métallique et même assez lourd :

« Qu'est-ce que c'est ?

— Ce avec quoi nous allons jouer. Ouvre-le. »

Méfiant, j'ai lentement ouvert le coffre pour y trouver l’objet métallique : un revolver !

« "Colt Python" un revolver américain tirant des balles de .357 magnum, un moyen rapide et efficace pour se défendre au corps-à-corps. »

Je ne savais pas vraiment comment réagir : une partie de moi me disait que j’étais en sécurité même si je n’ai jamais tiré avec une arme à feu et l’autre partie demandait des explications :

« Pourquoi me donner une telle chose ? Je n’ai jamais…

— Voyons Haron, c’est ce que je t’ai dit avant : c’est avec ça qu’on va jouer. Un revolver n’est pas un jouet certes mais il sera l’outil principal du jeu avec l’homme devant toi.

— Mais… il est mort non ?

— Ce serait bien dommage tu ne crois pas ? »

Tout à coup, l’homme devant moi se mit à avoir un sursaut assez intense avant de lever les yeux vers moi puis de prononcer sur le ton du désespoir :

« Arrêtez... je veux que ce cauchemar cesse ! »

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