10 - Les conséquences de mes actions.

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« Chr-ahem... Monsieur ? J'ai entendu des hurlements. Que se passe-t-il ? »

Alice qui venait visiblement de se réveiller vint dans la pièce de Christophe afin de lui faire part de ce qu'elle venait de vivre. Ou plutôt pour demander des explications au vu du visage interrogatif de cette dernière.

« Tu sais... pas mal de choses. On dirait que la petite se montre enfin sous sa vraie forme et, oh ! Regarde ça ! Quelle force impressionnante ! »

Christophe avait l'air ravi, voir la fillette agir avec autant d'agressivité le faisait sourire sournoisement :

« Oui... On le sait bien. Bien plus que Sorel... »

Alice soupira profondément, elle semblait en manque cruel de sommeil. C'est ce que n'importe qui remarquerait au vu du teint blafard qu'avait cette dernière :

« Monsieur... vous devriez aller dormir. Vous avez très mauvaise mine. »

L'homme qui se tenait près de Christophe venait de prendre la parole. Son ton de voix n'allait pas de pair avec ses dires, cela ressemblait plus à une espèce de forme de politesse.

« Nan... Je vais très bien voyons ! Regarde ! »

Christophe prit une sorte de seringue posée sur son bureau puis commença à l'examiner comme s'il découvrait l'objet :

« Tant que j'ai ça, je peux très facilement tenir la nuit. Je suis l'organisateur après tout, je me dois de surveiller le jeu durant les moments les plus intéressants.

— Je vous déconseille de trop en abuser. Vous connaissez très bien les effets secondaires.

— Roh ! "Paranoïa" "hallucination" c'est bien ça que l'on avait noté la dernière fois ? Je ne suis pas aussi faible que ce type. Je suis un jeune en pleine santé ! C'était un vieux et sans abri qui plus est. Il y a une différence avec moi.

— Je préfère vous prévenir. »

L'homme alla finalement s'assoir dans un fauteuil à proximité, un vieux fauteuil en cuir qui craquelait rappelant sa vieillesse.

« Je suis pour ma part épuisé. Vu tout ce que l'on a fait aujourd'hui, je pense me coucher plus tôt. Faites attention à vous monsieur.

— Monsieur ! Allez dormir un peu ! Vous n'avez pas fermé l'oeil depuis au moins trois jours ! »

Christophe, ignorant la remarque d'Alice, s'approcha de l'écran :

« Oh. "Eneko"... ? »

Tous les visages excepté celui de Christophe se figèrent d'effroi à l'entente de celui-ci :

« Sorel a tout de même réussi à le mettre en colère. Vu la facilité de la chose, je ne pense pas qu'il mérite des félicitations. »

Alice poussa de nouveau un soupir :

« Ce "Eneko"... sans lui... »

Christophe se retourna vers Alice, se fit une injection avec la seringue puis déclara presque en criant :

« Hahaha ! Exactement ! Rien de tout cela n'aurait été possible ! Ce jeu n'existerait même pas !! »

La fillette me fonçait dessus l'air plus déterminé que jamais. Ses yeux n'étaient pas visibles à cause de ses longs cheveux mais je pense que c'est une chose dont je me serais passé tant elle était effrayante. Il fallait que je réagisse et vite ! J'allais mourir d'un coup de hachette bien placée au niveau du crâne !

Malheureusement, j'avais beaucoup trop mal suite à l'impact que je venais de subir. Mon dos était en feu et j'étais d'ailleurs encore sonné par le choc.

En l'espace de quelques minutes, j'ai subi plusieurs étourdissements sauf que je ne pense pas pouvoir ressortir indemne de celui-là.

J'ai alors fermé les yeux. Stupide, n'est-ce pas ?

J'entendais les cris de peur de Valya mêlés à ceux de colère de la fillette. C'était effroyable. Malsain. Ils résonnaient à l'intérieur de mon crâne, je ne voulais pas essayer de m'en sortir. La douleur que je ressentais était la seule chose qui occupait mon esprit en plus des hurlements.

J'abandonne cette fois. Tu as gagné fillette.

Je vais devoir affronter de nouveau la souffrance que j'ai connue lors de la première "partie".

Je n'en peux déjà plus. Ce jeu est une torture qui ne finira jamais... combien de temps durera-t-il ? De toute façon, je vais ressusciter comme les autres fois... mais, peut-on vraiment dire que je meurs dans ces cas-là ? Ah... j'aurais le temps d'y penser après :

« Sorel ! Tu ne vas pas mourir comme ça ! »

Je fus surpris d'entendre Haron hurler cette réplique. J'ai ouvert mes yeux qui étaient fermés pour voir la fillette à seulement un ou deux mètres de moi, l'air toujours aussi menaçant :

« Laisse... moi voir ce regard ! Laisse... moi admirer tes yeux ! »

Cette voix ! Mon Dieu qu'elle est atroce à écouter ! Une voix de démon, c'est la seule façon de la décrire !

« AAAAAH !! »

Dans un hurlement assourdissant, Haron se précipita sur la fillette qui avait levé en l'air sa hachette. La fillette, visiblement surprise par le courage que venait de prendre Haron, se retourna pour lui faire face mais...

« Prends ça ! »

Haron venait de ramasser le tournevis encore légèrement rouge de mon sang pour le lui asséner un coup directement dans le dos.

Dans le cou aurait été plus efficace mais je suppose que dans le feu de l'action, il a agi sans vraiment réfléchir.

« GRAAAAAH !!! »

Les cris déchirant de la fillette emplirent le couloir, des cris de douleur atroces. Ce bâtiment accueillera beaucoup de ce type de hurlement à l'avenir à mon avis...

« Viens Sorel, on s'enfuit !

— J'espère que t'es préparé...

— Q-quoi ? »

La fillette repris de sa voix terrifiante :

« Vous.... allez regretter d'avoir touché à Eneko !!

— Voilà pourquoi ! »

Tout en m'étant relevé difficilement durant le temps qu'avait gagné Haron, je commençai à me diriger vers la fin du couloir où Claria, Céleste et Valya nous attendaient :

« Partenaire ! Venez avec moi ! Nous devons échapper à cette créature ! »

Valya, tout en agitant les bras frénétiquement, commençait déjà à courir dans le long couloir sombre sans ma lampe torche.

D'ailleurs, où est Ophélia ? Elle n'est pas avec nous... Mais où est-ce qu'elle est partie ?! Pourquoi s'est-elle enfuie seule ?! Elle signe son arrêt de mort sans lumière ni aucun moyen pour se défendre !

Malgré mon dos qui était en feu combiné à ma blessure à l'épaule, j'ai commencé à courir tant bien que mal. Il faut dire que j'étais dans un sale état en ce moment.

C'est à mon tour d'avoir besoin de repos maintenant... à ce rythme, nous ne commencerons jamais à chercher les indices laissés par l'organisateur. Je veux en savoir plus sur ce maudit endroit ! En savoir plus sur ce que nous faisons ici, la raison de notre capture et pas mal d'autres choses...

Beaucoup trop d'autres choses...

Tout en allumant la lampe torche, j'ai cherché des yeux les gens proches de moi :

il y avait Valya qui était toujours à côté de moi, Haron qui courait un peu en avant et le duo Céleste-Claria qui couraient devant nous. La seule qui manquait était donc bien Ophélia...

« Où est... puff puff Ophélia ? »

Nous courions dans le bâtiment en entrant dans une partie que même moi ne connaît pas alors, tout pouvait nous arriver.

J'étais déjà essoufflé mais ma question avait été clairement formulé pour que Haron l'entende :

« Je ne sais pas... elle s'est enfuie en première. Il ne faut pas trop que je force sur ma course sinon... »

Pas besoin de finir ta phrase, je comprends. Je lui ai fait un signe de tête pour lui montrer que j'avais compris. Celui-ci me répondit en baissant les yeux, l'air coupable.

Nous étions arrivés dans un autre couloir, ou plutôt devrais-je dire une intersection :

sur les côtés, un autre couloir s'allongeait dans les ténèbres. À l'horizontale donc, comme une croix. Le couloir dans lequel nous étions continuait vers le fond sans pour autant que je puisse en deviner la longueur sans l'éclairer. Il fallait vite prendre une décision sur où nous devions aller.

« Moins... moins vite s'il vous plaît... puff puff je suis crevé...

— Je suis désolée de ne pas pouvoir vous porter sur mon dos maître... vous êtes trop lourd. »

Claria, suite à ce que venait de dire Valya, se retourna vers moi :

« "Maître" ? Qu-

— Par ici je vous prie, je pense que c'est le chemin qu'Ophélia a emprunté. »

Céleste coupa la parole de Claria pour pointer du doigt le fond du couloir que j'éclairais.

En effet, au bout, nous pouvions apercevoir une porte légèrement entrouverte. Ça ne se serait pas remarqué dans une autre situation mais lorsque toutes les autres portes du couloir sont fermées, cela saute aux yeux. Nous avons donc continué dans le couloir que nous empruntions de base sans faire de détour dans l'intersection.

Nous étions en train de courir tout droit vers notre destination quand un bruit métallique suivi d'un hurlement se fit entendre :

« Elle a dû enlever le tournevis que je lui ai planté.

— Que-quoi ?! Tu ne l'as pas gardé ?! »

Cela se sentait dans ma voix que je n'étais pas aussi "fort" que d'habitude :

« Non... je... écoute, au moins, tu es encore là pour t'en plaindre, d'accord ? »

Il avait raison, j'étais légèrement capricieux mais au moins, j'étais en vie et c'était grâce à lui.

Nous nous étions arrêtés quand nous avions entendu le bruit puis le cri, après avoir dit cela, personne ne voulait visiblement parler donc nous nous sommes dirigés vers la porte où nous pensions trouver Ophélia.

Plus j'avançais, plus je me sentais mal. J'avais cette douleur au dos qui m'empêchait de bien me mouvoir mais il y avait surtout ma blessure à l'épaule qui semblait s'être aggravé...

Il fallait que je me soigne, il le fallait à tout prix car la brûlure est insupportable !

Sans que personne ne fasse quoi que ce soit de particulier, nous étions arrivés devant la porte. Celle-ci était bien entrouverte mais nous ne pouvions pas voir ce qu'il y avait à l'intérieur.

Un autre hurlement se fit entendre. La fillette était proche, très proche...

« Bon, on rentre. J'y vais la première. »

Claria, dans un élan de courage, ouvrit la porte assez rapidement pour ne pas être surprise par quoi que ce soit :

« Mhhh... On dirait que c'est vide... il n'y a pas grand-chose ici. C'est une sorte de bureau je pense. Oooooh non ! C'est l'infirmerie ! »

Ô joie ! Si nous étions dans une histoire, je remercierais le scénario.

« Une infirmerie ? Pourquoi est-ce qu'il y en a une ici ?

— C'est vrai qu'on ne sait pas dans quel genre de bâtiment nous nous trouvons mais c'est sûrement un ancien hôpital au vu de l'architecture. Donc, y trouver une infirmerie n'est pas étrange du tout. »

Claria, tout en ayant parlé, avait levé le doigt en l'air, sûre d'elle.

« Raaah... je m'en fiche. On rentre, j'ai besoin de me soigner ! Mon épaule me fait un mal de chien sans parler de mon dos... »

Alors que je venais de terminer ma phrase, Claria et Céleste se tournèrent vers moi :

« Oooooh.... mais c'est vrai que tu perds du sang... Ton gilet se tâche à vue d'oeil ! »

Il faut dire que j'étais habillé de manière assez classique : un jean noir, un t-shirt de la même couleur avec par-dessus le fameux gilet qui avait une petite capuche à l'arrière au cas où il pleuvait (qui était noir aussi). J'aime bien ce gilet car il me sert tous les jours et il est plutôt simple vu que je ne suis pas excentrique du tout. En ce qui concerne les vêtements, je reste dans le neutre absolu.

Je jetai un coup d'oeil rapide à mon épaule pour m'apercevoir que mon gilet se tâchait de sang.

Je saignais, plus que tout à l'heure. Mauvaise nouvelle...

« Rentrons, c'est pas comme si la fillette nous suivait à la tr-

Comme pour me contredire, des petits pas très rapides se firent entendre suivi d'une respiration saccadée et assez lourde.

Elle était là.

Mon épaule commençait au même moment à sérieusement me brûler, tant et si bien que je fus obligé de m'agenouiller pour supporter la douleur. C'est en relevant la tête que je compris que tout le monde était rentré dans "l'infirmerie" sauf moi à cause de mon agenouillement.

Je commençais à avoir peur, même Valya était entrée car je ne la voyais pas autour de moi. J'étais seul dans le noir quasi complet avec une petite fille meurtrière à mes trousses... Belles raisons pour commencer à paniquer je trouve...

Je sentis mon pouls s'accélérer. Je n'osais même pas me retourner car je pouvais l'entendre très proche de moi. J'avais toujours la lumière allumée. La fillette ne pouvait pas me louper, j'étais clairement en grand danger ! Je n'avais vraiment pas envie de mourir après tous les efforts que j'avais fait ! Je ne voulais pas tout recommencer !

Je veux vivre !

Je commençais à diriger le faisceau lumineux vers moi pour essayer de l'éteindre mais lorsque je l'avais tourné vers ma droite où se trouve donc la supposée infirmerie, je vis un visage me fixant.

J'eus un léger sursaut avant de me rendre compte que c'était Claria. Celle-ci avait l'index devant sa bouche, signe que je devais garder le silence.

Je vis également ses lèvres remuer doucement, plus encore qu'un chuchotement, je parvins tant bien que mal à lire sur ses lèvres la phrase :

« Ne... bouge... surtout... pas... »

J'ai suivi son conseil et malgré ma peur plus qu'évidente, je n'ai pas bougé ne serait-ce que le petit muscle.

Je mis ma main devant ma bouche pour essayer au mieux de couvrir ma respiration. Je ne devais pas faire le moindre mouvement brusque car je pouvais alors faire du bruit, chose qui me serait fatale.

J'étais là, à fixer du regard Claria qui avait visiblement la trouille au vu de la tête qu'elle faisait. Je pouvais le lire dans son regard, je pouvais le voir que la fillette était juste derrière moi. Je ne pouvais m'empêcher de trembler, de douleur mais aussi de peur. Je ne pouvais même pas savoir à quel point elle était proche : de quelques centimètres ? De quelques mètres ? Aucune idée et c'est ça qui me faisait peur.

Cependant, quelque chose n'allait pas : pourquoi ne fait elle rien ? Elle devrait me voir normalement ! Alors pourquoi attend-elle ?

Je sentis d'un coup sa respiration s'approcher, de plus en plus... de plus en plus...

Là, je pouvais le deviner qu'elle se trouvait à moins d'un mètre de moi.

Tout voulait me faire bouger et c'était une torture de me forcer à rester en place complètement immobile : mon épaule me faisait très mal ce qui me faisait trembler, la peur accentuait ce tremblement et j'avais l'impression que ma respiration se faisait beaucoup trop forte. Je faisais de mon mieux pour respirer le moins souvent possible et surtout de faire en sorte qu'elle ne soit pas bruyante.

Combien de temps ce petit jeu a duré ? Aucune idée. Je suis resté combien de temps agenouillé, la main droite sur ma bouche, la gauche tenant la lampe qui était dirigée vers Claria avec mon regard posé sur elle.

Non pas que j'avais envie de la regarder mais j'avais l'impression que ne serait-ce que touner la tête ferait trop de bruit...

Je pouvais sentir les battements de mon coeur très distinctement. Le silence complet avec pour seul ambiance les pulsations régulières de ce qui me gardait en vie.

Si je ne m'étais pas agenouillé, je n'aurais jamais eu à vivre cette situation ! Pourquoi suis-je aussi faible ?! Et pourquoi la situation dure autant ?! Une... deux... minutes passèrent et elles me semblaient durer une éternité.

Claria avait les yeux qui changeaient de place passant de moi à quelque chose derrière. Elle prenait toujours cet air effrayé quand elle regardait derrière moi. Et ça ne me rassurait pas.

cliquetis cliquetis

Ce bruit nous fit sursauter Claria et moi. Ce qui m'avait effrayé, c'était le fait que je les avais senti passer au-dessus de ma tête. J'avais limite l'impression que la paire de ciseaux venait de me couper deux-trois épis...

« Où... êtes-vous... ? Je veux vous voir... »

Ce n'était plus la voix horrible de démon que nous venions d'entendre mais une voix de petite fille. Je ne comprends rien à ce qu'elle raconte : je suis juste devant toi ! Tu ne peux que me voir alors arrête de m'ignorer ou de me faire attendre !

cliquetis cliquetis

« Eneko va revenir... »

La fillette parlait d'un ton triste, elle semblait être sur le point de s'effondrer en larmes.

C'est ce que je pourrais croire mais je sentis d'un seul coup les petits pas qui recommencèrent... en s'éloignant !

Claria me fit signe au bout de plusieurs secondes de rentrer, chose que je fis immédiatement.

Une fois à l'intérieur, Claria ferma doucement la porte.

Enfin ! C'est terminé !

Je ne pus m'empêcher de pousser un soupir de soulagement. Je venais de connaître une situation où je ne pouvais même pas voir la menace... mon coeur bat toujours la chamade mais il devrait se calmer dans un petit moment...

« Pour te faire encore plus peur Sorel, elle était à seulement deux pas derrière toi... avec un grand sourire. »

Je pus voir Valya sursauter. Elle n'avait sûrement pas vu non plus... et je dois dire que ça me fit quelques frissons supplémentaires pas vraiment agréables :

« Puis, son sourire s'est arrêté d'un seul coup, juste après qu'elle ait fait ce bruit avec ses ciseaux... elle avait l'air... triste. »

Je le savais. J'avais pu le sentir au ton de sa voix.

Soupir de la part de Claria :

« Mais c'est fini, on est en sécurité je pense. Regarde la salle avec ta lampe au cas où il y aurait d'autres surprises comme le pendu. »

Malgré ma douleur qui s'aggravait, je fis une petite inspection de la salle avec ma lampe en faisant un balayage :

effectivement, on dirait bien une infirmerie : la pièce n'était pas grande mais pas vraiment petite non plus. Elle était plus grande que la chambre du pendu en tout cas.

Sur la droite, trois lits alignés qui servaient sûrement à accueillir les anciens malades. Je précise ancien car tout était pourri : comme si le lieu avait été abandonné pendant une dizaine d'années.

La pièce était faite en carrelage blanc, les murs comme le sol. La crasse et la moisissure composaient la majeure partie de l'endroit. Les trois lits avaient leurs matelas déchirés rendant impossible leurs utilisations. Il y avait des étagères au-dessus des lits qui semblaient être remplis, une bonne chose je pense.

À côté des lits se trouvaient ce qui semblaient être des rideaux. Difficile à dire maintenant vu qu'il n'y a que la moitié qui en reste. Des déchirures çà et là lui donnaient vraiment cet aspect "film d'horreur".

Cet endroit est la définition même du "glauque", manquerait plus que du sang et ça serait parfait...

Au moment où mon faisceau atteignit les lits, des pleurs se firent entendre.

Ça nous à tous glacé le sang. Plus personne n'osait bouger. Mon faisceau restait sur les lits, je n'arrivais pas à comprendre la provenance de ces pleurs mais une chose de sûr, ils appartenaient à Ophélia.

Elle était dans la pièce.

« O-Ophélia... ? T'es là ? »

J'ai tenté de manière assez maladroite de l'appeler. Maladroite car ma voix tremblait légèrement. Seuls ses pleurs me répondirent.

« Attendez... je crois savoir où elle est... »

Céleste, de manière assez surprenante, se dirigea vers les lits. Elle n'avait même pas l'air d'avoir peur !

Elle s'approcha d'un des matelas, retira une des couvertures déchirées qui s'y trouvaient pour y trouver une Ophélia en boule.

Elle était recroquevillée sur elle-même.

Celle-ci faisait vraiment peine à voir, je me mis à sentir une espèce d'empathie pour elle.

« Mademoiselle Sokovy ! Pourquoi vous êtes toute tristounette ? Est-ce que c'est la méchante fille qui vous met dans cet état ? Il ne faut pas... »

Valya, qui s'était approchée de Céleste et qui s'était agenouillée avec elle, essayait de la réconforter. Ophélia ne répondit pas. Elle ne faisait que sangloter doucement.

« Pourquoi je ressens autant de compassion en la voyant ainsi ? Ce n'est pas mon genre... » me disais-je intérieurement.

Céleste tendit sa main vers Ophélia :

« Allons, allons. Tout ira bien Ophélia. Nous sommes ensemble et en sécurité pour le moment. C'est tout ce qui compte, c'est tout ce qui importe. Tout ira bien tant que nous serons ensemble. »

Céleste parlait d'une voix étonnamment tendre. Ça me fait bizarre de le dire comme ça mais il n'y a pas d'autres mots. On aurait dit qu'elle parlait à sa fille.

En y repensant, Céleste et Ophélia étaient celles qui s'étaient disputées la "dernière fois". C'est perturbant de voir Céleste agir ainsi surtout quand on se souvient du discours qu'elle avait tenu...

« Et tout ira mieux quand je n'aurais plus cette maudite blessure. »

Les regards se tournèrent vers moi :

« Oh non ! Beaucoup trop de problèmes à la fois ! Mon maître est blessé et Ophélia est toute triste... Ça, c'est une mission pour Valya ! »

D'un ton enjoué tout en gardant une voix assez basse, Valya se dirigea vers moi :

« C'est à cause du tournevis, c'est ça ?

— Bien sûr. Quoi d'autre ?

— Hmmm, vu que c'est une infirmerie, on peut sûrement trouver des pansements pour guérir ce bobo. »

Non Valya, ce n'est pas aussi simple... Ne vas pas dire que tu irais faire un bisou magique non plus, tu te retrouverais la bouche ensanglantée et puis... Ce serait très malsain.

« Il faut d'abord trouver du désinfectant, ensuite, on peut mettre un bandage. »

Claria s'approcha de moi, l'air confiant pour me chuchoter à l'oreille :

« Faudra que tu nous expliques pourquoi elle t'appelle "maître". C'est un peu étrange comme façon de se nommer entre amis... »

Je lançai un regard noir vers Claria qui ne put s'empêcher de sourire :

« Alors en retour, tu m'expliqueras pourquoi tu me boudais à ce point tout à l'heure ? »

Donnant-donnant. Je n'aime pas quand les gens me détestent sans aucune raison valable donc je voulais au moins comprendre pourquoi elle avait fait ça :

« Peut-être un jour... »

Sa réponse vague ne me satisfaisait pas. Sois directe et dis-moi "non" par exemple ! Au lieu de me laisser dans le flou !

Et puis pourquoi je me sens autant concerné ?! C'est sa vie et si elle n'a pas envie d'en parler, c'est normal après tout ! Mais vu qu'elle connaissait mon "passé" que moi-même ignorait, il fallait au moins que je connaisse celui des joueurs et donc le sien.

« Levez-vous Ophélia, il n'y a rien à craindre. Rien ne vous fera de mal ici alors vous pouvez sortir de là. »

Ophélia ne répondait toujours pas. Seuls quelques sanglots occasionnels prouvaient qu'elle était toujours consciente. Céleste ne bougeait pas. Elle était toujours agenouillée vers Ophélia ou plutôt vers le lit.

« Je vais essayer de me rendre utile. Faut qu'on te trouve des bandages dans tout ça... »

Haron, qui n'avait pas ouvert la bouche depuis que nous étions en train de courir dans les couloirs, voulait se rendre utile.

Il doit sûrement penser qu'il doit réparer ses erreurs car après tout, c'est à cause de lui si j'ai l'épaule en feu comme ça.

« Il faut donc un désinfectant pour éviter une infection et un bandage ou un linge propre pour laisser agir. Vu que ça a l'air d'être assez profond, il faut absolument les deux... »

Heureusement que Claria s'y connaît un peu car je ne saurais pas quoi faire de moi-même en tout cas.

« Il faut faire ça en moins de vingt minutes aussi. On ne peut malheureusement pas rester ici éternellement... »

Je n'avais pas envie d'avoir l'air de vouloir presser tout le monde car ça aurait l'effet inverse, ils n'aimeraient pas aider quelqu'un qui soit désagréable. Mais je disais la vérité, il fallait se dépêcher car notre temps de répit ne sera pas très long.

Céleste, dans son coin, continuait de dialoguer avec Ophélia. Celle-ci ne lui répondait même pas mais Céleste ne la laissait pas seule. Elle avait l'air d'y tenir. Céleste semble être une fille patiente, une qualité rare.

« Par contre Sorel, je ne dis pas ça pour te rendre mal à l'aise ou quoi mais il va falloir que tu enlèves ton haut. Pour te soigner, va falloir qu'on admire la vue de ton corps. »

Claria redevient comme avant. À faire ses blagues inutiles mais qui détendent toujours l'atmosphère malgré le fait qu'il n'y soit pas propice :

« Si tu penses que je vais réagir en étant gêné, tu te trompes. Je m'en fiche tant que ce n'est que le haut...

— Ah... eh bien à ce propos...

— Quoi ?! Ne me dis pas que je dois complètement me déshabiller quand même ?!

— Il faut bien. »

Elle plaisante j'espère ?! Je ne vais pas retirer mes vêtements ! Jamais de la vie !

« C'est hors de question !

— Hahaha ! Bien sûr que non ! Je voulais juste voir ton visage gêné que je n'ai pas eu avec ma première demande. »

Soupir de ma part.

« D'ailleurs, pourquoi la fillette ne t'a pas... tu sais... tué ? »

Pendant qu'Haron regardait un peu la pièce, il me posa cette question qui je l'avoue était intrigante :

« C'est vrai ça... elle était juste derrière moi d'après Claria et je pouvais même entendre sa respiration. Pourquoi elle n'a rien fait... ? »

J'étais assis par terre pour ma part, Claria était à côté de moi et Valya restait debout sans rien faire. Elle ne sait sûrement pas quoi je pense...

Celle-ci prit d'ailleurs la parole :

« Peut-être qu'elle n'avait pas envie ? Pourquoi tuer mon maître après tout ? Il est gentil ! »

Claria eut un léger sourire :

« Si tu le dis... mais, vous n'avez vraiment rien remarqué ? »

Cette fois, toutes les têtes se tournèrent vers Claria y compris celle de Céleste qui lui répondit :

« Vous l'avez vu vous aussi ? Je pense que c'est pour "ça" qu'elle n'a rien fait.

— Pourquoi ? Arrêtez les devinettes et dites nous ce que vous pensez non ? »

Céleste se leva, essuya sa jupe puis continua :

« En fait, il ne faut pas chercher trop loin. C'est relativement simple.

— N'est-ce pas ? Ça c'est ma loli ! Elle a déjà compris !

— Ahem... bien que je n'en sois pas certaine.

— Mais c'est le plus probable. Et est-ce qu'on pense à la même chose en fait ? Je suis sûre que oui !

— Soit. Je vous laisse exprimer le fond de votre pensée la première.

— Héhéhé ! Merci Princesse Céleste ! »

À l'entente de ces mots, Céleste détourna le regard sur le côté, l'air sûrement gêné.

Mais je la vis esquisser un demi-sourire, chose qui prouve qu'elle a tout de même bien aimé le compliment.

« Très simple : je vais la poser sous forme de quiz ! »

Du Claria tout craché :

« Question : pourquoi Sorel n'a pas été tué par la fillette qui l'avait pourtant sous les yeux ? »

J'eus soudainement l'illumination, je venais moi aussi de comprendre ce qu'elle pensait :

« Ne me dis pas que c'est simplement... parce qu'elle est aveugle ? »

Claria me regarda droit dans les yeux, l'air ravie, puis fit avec un grand sourire :

« Correct ! »

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