Chapitre 13 - Dilemme

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Marina

Vicente m’ouvre la porte quelques secondes après que j’ai frappé à celle-ci. Je serre la hanse de mon sac à main pour cacher ma gêne.

Dans un premier temps, j’ai été bouleversé de le voir débarquer au café. Je ne m’y attendais pas mais au moins, je sais d’où vient le sentiment d’être observé. A présent, je suis remise de ma surprise même si j’ai l’impression qu’il n’est à sa place ici, comme un fantôme du passé bloqué dans le présent.

Le criminel me fait entrer dans la grande pièce. D’après ce que je vois, il a pris la chambre la plus spacieuse de l’hôtel. Je suis un peu gênée de me retrouver dans cette pièce alors que je viens de me mettre en couple avec Oscar.

- Qu’est-ce que tu veux manger ? demande-t-il prudemment.

- Ce que tu veux, je réponds en faisant mine de me concentrer sur le décor.

Je reste plantée au milieu du salon alors que Vicente commande à manger sur son portable. J’ai l’impression que ni lui ni moi ne savons quoi nous dire. C’est normal, nous avons été séparés pendant plus de trois mois.

Je me suis habituée à ne plus le voir chaque jour et Paris m’a beaucoup aidé. Tout est si différent du Mexique et de ma vie là-bas. Parfois, j’ai même l’impression que ce que j’ai vécu n’était que le fruit de mes pensées.

- J’ai commandé des plats mexicains, m’indique-t-il.

Je hoche la tête puis je prends l’initiative de m’asseoir sur le canapé. C’est la première fois que je vois Vicente si prudent et mal à l’aise. Un silence s’installe entre nous mais il finit par me rejoindre dans le coin salon. Il met une playlist sur son téléphone pour créer une ambiance sympa.

- Je suis désolé pour hier, j’ai perdu mon calme car je ne pensais pas te voir avec un autre homme, s’excuse-t-il une nouvelle fois.

- Explique-moi ce qu’il s’est passé dans ta tête pour que tu viennes ici, j’insiste en voyant qu’il n’allait rien ajouter.

Il pousse un soupir puis se passe une main dans les cheveux.

- C’est tendu au Mexique, les fédéraux essayent de nous choper ou plutôt d’attraper La Pantera, commence-t-il. Lejos m’a conseillé de quitter le pays le temps que ça passe. L’organisation fait profil bas et nous essayons de ne pas nous engager dans des conflits armés.

- Ça ne m’explique pas pourquoi tu es venu ici, je le coupe de plus en plus tendue.

- Je ne sais même pas quoi te répondre, soupire Vicente. Je ne t’ai pas oublié Marina et inconsciemment, je savais qu’il fallait que je te voie une dernière fois. Je voulais savoir comment tu allais mais ça m’a rendu fou de te voir avec ce mec. A la base, je ne devais même pas venir te voir. Tu ne devais même pas savoir que j’étais dans les parages.

- Je n’ai jamais compris ce qu’il se passait dans ta tête Vicente, je commence à m’énerver. Je ne sais pas si je t’en veux ou non d’avoir tout gâché entre nous.

- Je sais que suis né pour faire que de la merde et je ne te demande pas de me pardonner pour ce que je t’ai dit et tout ce que je t’ai fait.

Je sais qu’il insiste sur le fait qu’il regrette de m’avoir fait du mal physiquement et psychologiquement pendant la première partie de ma captivité.

Je n’ai pas le temps de répliquer car le smartphone du criminel émet un bruit. Il se lève puis quitte la chambre sans un mot. Le silence de la pièce et la solitude m’aide à reprendre contenance. Je suis très sensible lorsque je suis avec Vicente et j’ai du mal à contenir mes émotions. Il m’a fait tellement souffrir…

Quelques minutes plus tard, il revient avec deux sacs de nourriture. Il commence à éparpiller sur la table les emballages de nourritures. Comme à son habitude, il en a pris beaucoup trop. Je me prends un burrito que je déballe pour croquer dedans.

- J’ai également eu des problèmes au travail, reprend le criminel. Salazar essaye de me faire un sale le coup et je suis sûr qu’Anderson n’est pas loin non plus. Il m’accuse d’essayer de l’arnaquer dans le contrat qu’il a signé. En gros, je suis dans la merde sur tous les plans.

Je fronce les sourcils à la mention de ce nom. Je me rappelle l’avoir approché pour essayer de déterminer l’implication de mon père dans des magouilles. Heureusement, mon géniteur n’a pas fait grand-chose de compromettant.

- Tu devrais rentrer au Mexique pour essayer de régler le problème, je lui conseille.

- J’ai autre chose à faire, réplique Vicente en me lançant un regard intense.

Je rougis puis je baisse les yeux sur mon burrito. Une part de moi est rassurée qu’il reste avec moi au lieu de partir au Mexique. Mais d’un autre côté, mon esprit me lance une alerte et m’indique de me méfier. Encore une fois, mon cœur et ma raison s’entrechoquent.

- Sam est triste de plus avoir de tes nouvelles et il faudra que je m’excuse de m’être comporté comme un con au bureau ces derniers temps, soupire-t-il.

Son regard se perd quelques secondes sur son taco. Il semble retourner dans le passé.

- Je comprends pourquoi tu m’as quitté, je lui avoue. Avec le recul, je ne suis plus fâchée et je ne blâme plus ton geste. En revanche, ta venue ici m’a perturbé et je t’en veux un peu d’avoir troublé mon quotidien.

- Je n’aurais jamais dû faire ça, approuve-t-il. Mais je suis là et déterminé à trouver une solution pour l’enfant.

- Comment ça ? je questionne complètement perdu.

- Ce bébé est aussi le mien et tu es très jeune, explique Vicente.

Je me lève d’un bon sans parvenir à me contrôler.

- Tu n’as pas à me dire ce que je dois faire ! je m’écris. Je ne veux pas que tu te mêles de cette histoire !

- Comment va réagir Oscar quand tu lui diras ?

Nous sommes tous les deux face à face en plein combat. Je serre les poings tout comme lui.

- Il reconnaitra son enfant comme le sien, je réponds sûre de moi.

Le criminel ouvre des yeux ronds comme des soucoupes avant de se mettre vraiment en colère.

- Personne ne croira que ce petit blond et toi auriez pu faire un enfant qui a une gueule de mexicain, ricane-t-il d’un air malfaisant. C’est mon enfant.

- Et tu proposes quoi ? je crie. Ce bébé doit naître dans tous les cas et je vais devoir bientôt l’annoncer à mes parents. Je suis terrifiée par cette histoire, je ne suis pas prête.

En mettant des mots sur mes inquiétudes, je commence vraiment à paniquer. Je me rassois brusquement sur le canapé. Vicente se radoucit en me voyant mal en point. Je le sens se rapprocher de moi et son odeur emplis mes narines. Il se place à mes côtés puis passe une main autour de mes épaules. Son contact me fait frissonner mais je ne le repousse pas.

- Si je suis là c’est pour t’aider, souffle-t-il. Je veux reconnaître cet enfant et on pourra l’élever ensemble.

- Mais comment ? Tu as rompu avec moi pour m’éloigner de l’organisation de El Barrio et de La Pantera.

Le criminel ne dit rien et semble réfléchir une nouvelle fois.

- Est-ce que tu m’aimes encore ? demande-t-il brusquement.

Même si la question me prend au dépourvu, je connais déjà la réponse. Je pensais que je l’avais complètement oublié mais en réalité, elle était cachée dans mon cœur. Je crois que je l’ai su dès que Vicente est apparu hier.

- Oui, je murmure.

Vicente ferme les yeux quelques secondes comme pour encrer à jamais ce simple mot dans son esprit. Instinctivement, je me rapproche un peu plus de lui.

- Je peux te proposer une chose mais je ne sais pas si ça va te plaire, reprend-t-il.

J’arque un sourcil pour lui signifier que je ne sais pas de quoi il parle.

- Devient la femme de Vicente Alcarón. Tu ne manqueras de rien et nous pourrons élever cet enfant ensemble.

Incrédule, je reste perplexe un moment.

- C’est un changement radical, il faut que je réfléchisse, je finis par dire.

- Si tu acceptes, j’arrêterais tout pour toi, ajoute-t-il en me prenant la main.

- Je ne comprends pas.

- Tes parents comprendront que je suis dans l’organisation de La Pantera, explique le criminel. Je ne pense pas que ton père essaye de me faire du tort si je suis ton mari. Ma position est importante et si je continue dans la voie du crime, je vais finir par tout perdre. Tu es la personne la plus importante pour moi et je sacrifierais tout pour être avoir toi. Je l’ai compris à la minute où je t’ai aperçu embrasser Oscar.

- Il est temps pour La Pantera de se retirer, conclu-t-il.

- Qui reprendra le flambeau ?

- Je n’en sais rien.

Nos regards se croisent et je me perds dans l’océan de ses yeux verts. J’ai l’impression de retourner au Mexique et que rien n’a changé entre nous. Attirée comme un aimant par Vicente, j’approche mon visage du sien.

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