Vicente

Je suis en train de tourner ne rond dans ma chambre d’hôtel. J’ai choisi une suite avec une grande pièce comportant un petit salon et un lit. J’ai sélectionné un trois étoiles pour ne pas attirer l’attention sur moi. Je pourrais me payer un hôtel de luxe mais je n’irais pas avec le décor.

J’ai déposé mes affaires en vrac lorsque je suis arrivé la semaine dernière. Je n’avais pas la tête à ranger ma valise ni de visiter la ville. Je sais que c’est con de ne pas le faire puisque j’y suis. Le problème c’est que j’ai une personne derrière la tête.

Lejos n’a pas eu de difficulté à la retrouver mais il était réticent à me donner l’adresse. Depuis quelques jours, il m’arrive d’attendre qu’elle sorte de chez elle et de la suivre. Je sais que je passe pour un putain de psychopathe mais c’est le seul moyen que j’ai trouvé pour la voir. Je sais qu’elle ne voudra plus jamais me parler après ce que je lui ai fait.

J’ai pu constater qu’elle allait à l’université et c’était faite de nouvelles amies. Par contre, je ne m’attendais pas à voir ce blond débarquer l’autre jour chez elle. Encore moins les voir s’embrasser dans le café la veille.

Je dois avouer que j’ai souffert même si je me refuser à ressentir quoi que ce soit. C’est la première fois que j’ai le cœur brisé et je me demande comment je vais faire pour avancer. J’ai la sensation que je n’arriverais jamais à l’oublier et ça me fait chier.

Je voulais juste voir comment elle allait et je suis déçu qu’elle m’ait déjà oublier. Toutefois, elle n’avait pas l’air amoureuse de lui, je l’ai bien vu et ça me rassure un peu. Je sais que c’est égoïste mais je l’ai quitté pour la protéger de ma merde.

Bordel mais pourquoi je pense à ça ! Je suis vraiment tordu comme mec. Je ne suis pas venu à Paris pour m’excuser et la récupérer. En fait, je ne sais même pas pourquoi je suis là. J’ai juste pris le prétexte que m’a offert Lejos pour quitter le Mexique.

Mais le truc le plus fou dans cette histoire et que je vais être père. D’après ce que j’ai compris, elle ne peut pas avorter. En effet, un bon moment s’est écoulé depuis la fois où nous avons couché ensemble. Je me demande comment elle ne s’en est pas rendu compte plus tôt. Peut-être le savait-elle et ne voulait pas avorter ?

C’est inconcevable de penser que je vais avoir un enfant. Surtout parce que je me suis retiré un peu trop tard pour éjaculer. Comment je vais faire pour élever cet enfant ? Marina est encore jeune et j’ai déjà fait trop de conneries avec elle. Il faut que je trouve un moyen pour qu’elle finisse ses études.

J’ouvre les fenêtres et me pose sur le balcon pour réfléchir. J’ai envoyé un mail au bureau comme quoi je prenais des vacances. Mais bordel, il fait super froid dans ce pays l’hiver. De plus, les gens sont trop bizarres, ils font des gueules de déterrées, on dirait qu’ils vont crever demain. Je n’aimerais pas habiter ici et j’ose croire que Marina non plus n’aimerais pas.

Je ne parle pas très bien le français mais j’arrive à le comprendre un peu. Au cours de mes voyages je suis venu plusieurs fois en France et j’ai discuté avec des financiers français. Marina ne connaît pas ce détail mais je ne suis pas une merde en langue. Je parle très bien l’anglais parce que je n’ai pas eu le choix : c’est la langue de la finance.

Je sors de mes pensées lorsque j’entends mon téléphone professionnel sonner. Je réponds sans même avoir vu que dit il s’agissait.

- Bonjour monsieur Alcarón, nous avons un petit problème avec un contrat, commence Sam.

- Que quoi s’agit-il ? je demande sur un ton professionnel.

- Felipe Salazar dit que votre entreprise essaye de l’arnaquer.

En entendant ces mots, je perds mon calme. Comment une merde pareille a-t-elle pu arriver ?!

- Qui a osé signer un contrat avec ce fils de pute de Salazar ! je m’écris. Jamais je n’aurais accepté une chose de la part d’un homme qui fait des trucs pas nets.

Sam semble très mal à l’aise à l’autre bout du fil et je sens que ce qu’il va me dire ne va pas me plaire.

- Mais c’est vous monsieur qui avait signé le contrat, répond-t-il d’une voix un peu tremblante.

- Quoi ?!

- Ça fait de nombreuses semaines que vous n’êtes plus vous-même, explique-t-il rapidement. On dirait que vous êtes dans un autre univers. Mais il y a bien votre signature sur le contrat et votre vice-président s’est chargé d’accueillir monsieur Salazar puisque que vous n’étiez pas en état.

- J’ai beaucoup de choses en tête en ce moment alors demandez à mon suppléant et aux employés de concentrer toute leur énergie pour régler cette histoire.

- Bien monsieur, approuve-t-il avant que je ne raccroche.

Je jette violemment mon smartphone sur le lit. Il rebondit puis vient s’écraser sur le sol. Je donne un coup de poing dans le mur, faisant trembler toute la pièce. J’ai failli me péter les doigts et la paroi avec.

Je suis perdu au point de signer un contrat important sans m’en rendre compte. En plus mon vice-président s’est chargé de toute la partie communication pour que tout se déroule pour le mieux. Mais je ne vois jamais ce dernier car il est souvent à l’étranger pour des contrats.

C’est la première fois qu’un client me sort un discours pareil. Je n’ai pas confiance en Salazar et je me demande bien ce qu’il magouille. Cela doit avoir un rapport avec la menace d’Anderson à Veracruz. Je devrais rentrer sur le champ au Mexique mais je n’ai pas le courage d’abandonner Marina maintenant alors qu’elle porte mon enfant. Putain de merde, ça change tout !

Je n’ai pas le temps de réfléchir plus longtemps car Marina toque à la porte. Avec toute cette merde, je n’ai pas eu le temps de choisir un endroit où l’emmener manger.