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Seule au milieu d’un cercle qui n’existe plus, Yumi pleure l’amitié perdue, dévorée par les ténèbres. Elle reste ainsi longtemps au fil de ses regrets comme un collier dont elle se vêt et qui l’étouffe. Elle regarde le soleil se coucher, ses rayons presque éteints se dissoudre dans les eaux noires, s’y diluer et la lune froide d’apparaître au firmament, dans un écrin de rose.
Puis, Yumi se met à penser, plus fort et profond, que c'est peut-être elle cet oni, qu’elle n’a pas compris la légende, la règle du jeu, que celle-ci, après tout, se plie au gré du vent, se métamorphose de bouche en oreille, comme un origami imaginaire et que peut-être, oui, peut-être, elle en a été la malheureuse victime. Alors, fermant les yeux, faisant silence en elle, de ses mains, elle cherche au dessus de sa tête deux cornes. Les cornes démoniaques. Les stigmates de sa transformation.
Et de cornes, elle ne trouve rien, mais quand sa main - qui n’est plus une main - se rapproche de sa chevelure, elle n’en touche plus les fils de soie, mais des poils drus, immondes et deux oreilles pointues : celle d’un renard, sans doute. Et pourtant, pourtant, quand sa patte descend, et qu’elle la voit des larmes plein les yeux, elle retrouve au touché les contours glabre et délicat de son visage d’enfant.
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