Chester accompagnait deux enfants, Cléo et Jonah, dans l’allée des arbres du manoir Grindriz. Ils avaient été conviés le matin même par Béatrice. Cette dernière ne leur avait pas expliqué la raison mais la fée avait quelques doutes et appréhensions à ce sujet. La momie, par contre, semblait croire qu’on allait simplement manger les restes du délicieux gâteau d’anniversaire de la semaine passée.

 Lorsqu’ils pénétrèrent dans le hall, Jonah s’étonna de voir l’ombrelle sombre de Jérémy dans le bac à parapluies de l’entrée. Chester leur indiqua l’étage du doigt et s’en retourna au grillage chercher les autres invités. Les deux camarades gravirent les marches jusqu’au second où ils trouvèrent la porte de la salle de jeux ouverte.

 Béatrice les y accueillis avec un large sourire. Jacky, Lisa et Romulus étaient déjà présents, ainsi que Jérémy, assis dans un coin de la pièce, la tête contre le poing. Le vampire avait vraiment l’air de s’embêter profondément et Jonah s’étonna qu’il se soit déplacé. Il ne s’était pourtant pas réconcilié avec la maitresse des lieux. D'ailleurs, celle-ci le fusillait des yeux.

 — On va jouer à quoi ? demanda Cléo.

 — C’est une surprise, lui répondit Béatrice.

 — Et ta surprise, ce ne serait pas « Qui a volé la Mortadelle », par hasard ? glissa Jonah.

 La gobeline se mordit les lèvres alors que Cléo ouvrait la bouche sans qu’aucun son n’en sorte, honnêtement surpris. La fée adressa un signe de tête à Romulus avant de poursuivre.

 — Vous avez trouvé qui avait fait le coup ?

 — Il paraît, répondit le loup-garou.

 — C’est plutôt Agatha qui a trouvé, mais elle ne nous a rien dit, ajouta Lisa.

 — Elle veut d’abord que tout le monde se rassemble ici pour nous expliquer comment elle a fait, expliqua la gobeline. Elle m’a sonné tôt ce matin afin que je vous invite.

 — Même lui ? s’étonna Jonah en désignant le vampire.

 Ce dernier lui jeta un regard assassin en se relevant.

 — Si je suis venu, c’est parce que je suis blanc comme neige. De ce crime-là en tout cas.

 Il montra ses canines et Jonah déglutit, conscient de la menace. Jacky fit mine d'être captivée par une toile au mur tandis que les autres roulaient des yeux, agacés. L’arrivée de Juliette fut salvatrice, interrompant cet instant de gêne. On lui expliqua ce qu’elle faisait ici, ce qui ne lui plut pas. La gorgone fixa Lisa d’un air mauvais tandis que tous les serpents de sa chevelure sifflaient. Il ne restait plus qu’à attendre Agatha et ils seraient au complet.

 Celle-ci arriva avec un bon quart d’heure de retard. Pendant son absence, ses camarades en avaient profité pour interroger, à leur tour, Lisa et Romulus. Ils voulaient eux aussi deviner quelles avaient été les conclusions de la sorcière avant que cette dernière ne leur donne sa version de l’histoire. Hélas, les informations que laissèrent fuiter les deux acolytes ne leur permirent pas de trouver quoi que ce soit de pertinent.

 Quand enfin la petite sorcière arriva, la caisse de papiers cadeau entre les mains, elle demanda à Chester de bien vouloir rester. Celui-ci, un sourcil relevé, adressa un regard interrogateur à la jeune gobeline qui acquiesça.

 — J’aimerais aussi que tes parents soient là, s’il-te-plait, demanda Agatha. Pour confirmer ou infirmer ce que je vais dire. Et réagir en cas de pépin…

 Béatrice parut étonnée mais ne protesta pas. Elle s’absenta quelques minutes pour revenir avec le couple Grindriz. Lui comme elle se placèrent dans un coin de la pièce en compagnie de leur majordome et croisèrent les bras. Tous les enfants s’étaient regroupés devant Agatha et celle-ci leur proposa de s’asseoir en demi-cercle. Même Jérémy s’était rapproché, l’air plus curieux que condescendant. Désormais au centre de l’attention, la petite sorcière se trémoussait d’excitation. Dans ses romans préférés, le détective concluait toujours de cette manière. Il rassemblait les acteurs du crime, victime, témoins, etc. Il racontait alors tout ce qu’il avait découvert afin de donner le nom du meurtrier. Aujourd’hui, même s'il ne s'agissait que d'un larcin, c'était à elle que revenait la vedette.

 — Merci à tous d’être venus, démarra-t-elle, radieuse. Vous le savez, la semaine passée, lors de l’anniversaire de Béa, l’un de ses cadeaux a disparu entre notre départ de cette même pièce et notre retour après le gâteau. Vous le savez, Romulus, Lisa et moi-même vous avons posé quelques questions tout au long de la semaine afin de découvrir ce qui était arrivé. Aujourd’hui, je suis fière de vous annoncer que j’ai découvert la vérité et que je m’apprête à vous en faire part ! Et cela, grâce à un indice qui était devant mes yeux depuis le tout début !

 Elle se baissa et attrapa la boite remplie des morceaux de papier cadeau qu’elle tendit devant elle. Beaucoup froncèrent les sourcils et d’autres échangèrent des regards avec leur voisin. Que diable ces morceaux de papier lui avaient-ils permis de découvrir ?