Avancer

2 minutes de lecture

" Nous avons raison !"

Par le feu et par le fer.

Par les attentats et par les assassinats.

Le terroriste regardait dans les yeux l'officier qui l'interrogeait.

Il savait qu'il allait souffrir.

Pour la bonne cause.

" Qui a donné les ordres ?"

Interroger était tout un art.

Fait de persuasion et de psychologie.

On pourrait croire qu'il suffisait de frapper.

Frapper, cogner, blesser, mutiler.

Oui, pour beaucoup des êtres humains, cela suffisait.

Mais pour d'autres, il fallait de la subtilité.

" J'ai pris des femmes et des enfants. Je crois que j'ai votre jeune frère," fit nonchalamment l'officier.

Un regard apeuré.

L'officier souriait et avançait ses pions.

" Votre mère vit dans le village de XXXX, il me semble ?"

La nonchalance et le sourire permettaient d'obtenir beaucoup sans être obligé de tremper ses doigts dans le sang.

" Votre mari est blessé, madame. Nous ne garantissons pas sa survie."

Et de jouer sur les peurs de chacun.

Sur ce qui les faisait avancer.

Parfois, on tombait sur quelqu'un de différent.

Une rareté.

Un exemplaire unique.

Là, il fallait chercher avant de savoir comment le tenir entre ses doigts.

Violence ? Douleur ?

Peut-être...

Famille ? Amour ?

Essayer encore...

Patrie ? Cause ?

Toujours pas...

Alors, l'officier se retrouvait les mains couvertes de sang et les nuits se raccourcissaient.

" On dit de vous que vous avez tué votre femme !

- Non. Même pas, répondait l'officier.

- On dit de vous que vous égorgez vous-même et que vous crevez les yeux !

- Cela m'est arrivé. En effet.

- On dit de vous que vous êtes incapable de sentiments humains !

- Je ne sais pas. J'ai connu une femme..."

Laisser parler et jouer les hommes blasés.

Ou alors frapper du poing et terroriser.

Il fallait trouver la bonne méthode et la trouver vite !

" Nous avons retrouvé votre père. Il était simple jardinier dans un parc municipal. Bien caché !"

Un regard effrayé.

Vite trouvé, cette fois.

" Nous savons où se cachent vos amis. Figurez-vous qu'ils vous ont dénoncé !"

La haine faisait parler et le dépit aussi.

Bien.

" Votre nom a été retrouvé sur une liste appartenant au commandant de XXXX. Qu'en dites-vous ?"

Obliger à s'expliquer et on relevait simplement les incohérences.

Plus long mais cela pouvait marcher.

Et face aux esprits forts, face à ceux qui avaient fait un choix et en avaient accepté les conséquences, c'était plus dur.

Mais la violence résolvait beaucoup de problèmes.

La peur de la douleur.

La douleur.

C'était souvent payant.

Sinon...

On allait plus loin.

Jusqu'à la limite.

Et il était extrêmement rare de se retrouver sans information.

Le chef contemplait les listes de noms qui couvraient des pages et des pages de rapports avec un peu d'effroi.

" Vous avez interrogé beaucoup de monde, officier ?"

L'officier eut un sourire sans joie.

" Oui, monsieur."

" Nous avons raison !"

Par la guerre et par le feu.

Par les massacres et par les charniers.

La guerre était une divinité cruelle.

Chaque camp y devait allégeance.

La victoire ira à ceux qui lui feront la plus grande offrande.

Le plus grand holocauste.

Nous ne sommes pas cruels, nous sommes croyants.

Annotations

Vous aimez lire Gabrielle du Plessis ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0