Chapitre huit

5 minutes de lecture

(Un rendez-vous important)

C’est une grande porte cochère, en bois massif. Manifestement l’entrée d’une ancienne maison de la haute bourgeoisie parisienne.

L’entrée est protégée, il faut sonner à l’appartement pour déclencher l’ouverture de l’intérieur. Les noms et les numéros d’appartement sont affichés sur le côté. Floriane trouve rapidement le nom qu’elle recherche puis appuie sur le bouton de l’interphone.

Un homme à la voix bourrue répond :

- C’est pourquoi ?

Élodie intimidée commence à faire demi-tour. Floriane la rattrape par la main. :

- Écoute ma chérie, je me doute bien que ce ne doit pas être facile. Je vais rester avec toi, à tes côtés, aussi longtemps que tu le jugeras nécessaire.

Floriane sonne une seconde fois, la même voix peu affable répond :

- C’est pourquoi ?

- Bonsoir, Monsieur, nous avons rendez-vous avec le Dr Coutanceau.

- Bonsoir, Madame, veuillez monter au dernier étage.

Devant le ton devenu plus agréable, les deux amies échangent un sourire plein d’espoir.

L’impressionnante porte cochère donne sur une entrée couverte dont le sol est recouvert d’antiques pavés, rendus brillants à force de passages. À droite se trouve la loge du concierge, la porte d’en face donne accès aux appartements, tous situés dans les étages.

Elles empruntent l’ascenseur dont la cabine toute petite peine à les contenir. Elles sont serrées l’une contre l’autre ce qui rassure Élodie et fait plutôt plaisir à Floriane.

Arrivées au cinquième et dernier étage, elles sonnent à la seule et unique porte visible. La serrure électrique s’ouvre dans un grésillement désagréable. Les deux femmes se retrouvent dans ce qui devait être un petit salon. Une pièce dont le sol est recouvert d’une épaisse moquette rouge brique aux motifs anciens. Les murs sont décorés de tapisseries elles visiblement anciennes. Le tout visiblement bien entretenu. Quelques chaises dans le style Louis XVI sont disposées autour d’une table sur laquelle sont disposées des revues.

Elles s’assoient et se préparent à attendre. Floriane sort le dernier Marie Claire de son sac, tandis qu’Élodie pioche une revue au hasard sur la pile.

L’attente ne dure pas longtemps, un homme de grande taille, s’avance vers les deux amies. Totalement chauve, le visage anguleux, vêtu d’un élégant costume trois-pièces rehaussées d’une cravate assortie, il leur serre la main, puis, dit d’une voix douce :

- Veuillez entrer, Mesdames.

Elles arrivent dans un bureau dont le style est aux antipodes du reste de l’immeuble. Il ressemble fort à celui de l’appartement de Floriane. Dans des tons noir et blanc résolument modernes. Les deux amies ont beau regarder autour d’elle, aucun divan n’est visible. À la place se trouvent de confortables fauteuils situés de part et d’autre du bureau.

Le médecin s’installe derrière son bureau et demande :

- Bonsoir, Mesdames, tout d’abord je tiens à m’excuser pour le ton peu agréable que j’ai eu tout à l’heure à l’interphone. Nous ne cessons d’être harcelés par des petits plaisantins. J’ai cru que c’était de nouveau le cas. Ceci étant dit, que puis-je pour vous ?

Floriane et Élodie échangent un regard. Leurs mains se trouvent comme pour puiser du réconfort où du courage dans ce simple contact.

Élodie, après un dernier coup d’œil à son amie, qui lui répond par un sourire d’encouragement, inspire profondément et commence :

Bonsoir docteur, je suis Élodie Toutlemonde. Vous devez connaitre mon amie, Floriane Boudou …. Voilà docteur, je viens ici sur les conseils de celle-ci. La nuit dernière, mon compagnon a tenté de me violer.

- … Bon, commençons par le commencement.

Floriane intervient alors :

- Veuillez m’excuser docteur, désirez-vous que je sorte ?

Le docteur répond :

- Et vous, Madame Toutlemonde, souhaitez-vous que votre amie reste où quelle sorte ?

- J’aimerai bien quel reste, si cela ne vous dérange pas.

- Très bien, pouvez-vous me raconter ce qui s’est passé ?

- Oui, docteur ….

Élodie commence à raconter le drame qu’elle a vécu. Son récit, dit sur un ton monocorde, comme s’il ne s’agissait pas de son histoire, est entre coupés de gros sanglots. Parfois quand cela devient trop dur elle s’accroche à la main de son amie comme à une bouée de sauvetage !

À la fin du récit, le docteur réfléchit quelques instants avant d’ajouter :

- Vous dites être allé au commissariat de Lille. Comment cela s’est-il passé là-bas ? Avez été bien accueilli ?

- Oui, très bien docteur. Je craignais de ne pas être pris au sérieux ou d’entendre des paroles blessantes, mais non. Rien de tout cela. J’ai été reçue par deux femmes qui se sont montrées très professionnelles et en même temps bienveillantes à mon égard. J’ai ensuite rencontré une autre femme, médecin légiste, qui après m’avoir examinée m’a délivré un certificat de trois jours d’incapacité de travail.

- D’accord …. Et là comment vous sentez vous ?

Élodie regarde son amie et lui sourit faiblement.

- Heureusement que Floriane est là. Je n’y arriverai pas sans elle ! J’ai souvent envie de pleurer. Je me sens salie ! Je n’ai plus de gout à rien. J’ai dû faire un gros effort pour venir jusqu’ici. J’ai réussi à dormir un peu cet après-midi, un sommeil peuplé de cauchemars. Je revis la tentative dès que je ferme les yeux. Quand Floriane m’a réveillée j’ai cru qu’il s’agissait de David j’ai failli la frapper !

- Bon, voici ce que je vous propose, en tant qu’expert auprès des tribunaux je vais vous délivrer un autre certificat d’incapacité de travail d’une durée de dix jours. Je vais vous prescrire un antidépresseur. Ensuite, et pour finir, je vous propose de nous voir toutes les semaines, le vendredi à dix-huit heures, cela vous convient-il ?

- Oui docteur.

Le médecin poursuit :

- Floriane, je ne saurai trop insister sur l’aide, le soutien dont va avoir besoin Mademoiselle Toutlemonde. C’est pour cela que je vais vous demander de ne pas hésiter à me parler de tout changement dans sa façon d’être ou de vivre.

Je vous laisse le numéro de ma ligne directe ainsi que mon mail. Surtout, n’ayez pas peur de me contacter à la moindre question de votre part à vous deux.

Les deux amies quittent le bureau du psychiatre non sans l’avoir remercié pour son aide.

Quand elles se retrouvent dans la rue, Floriane propose :

- Veux-tu boire un thé, ou quelque chose de chaud ? Il y a quelque chose dont j’aimerai te parler. Pendant l’entrevue, j’ai pensé à quelque chose.

- Oui si tu veux.

Allons-y, j’ai repéré un petit café à l’aspect fort sympathique juste à côté de la voiture.

Les deux amies s’y rendent d’un bon pas. Le rendez-vous avec le médecin à l’air de lui avoir fait du bien ! Elle semble avoir un meilleur moral.

Elles s’assoient en terrasse pour profiter des rayons du soleil couchant. La commande passée, Floriane commence :

- Au départ toi et moi avions pensé que tu serais venue habiter chez moi pour quelque temps seulement. Mais vu la situation, j’aimerais te proposer quelque chose d’autre. Voilà, que dirais-tu de t’installer chez moi, pour, disons, terminer ta thèse tranquillement. L’appartement est vaste, il m’appartient, je gagne confortablement ma vie, une thésarde ne gagne pas non plus des sommes folles. Tout ce que je te demande, c’est une aide pour la nourriture. Qu’est-ce que tu en penses ?

Pendant que Floriane parlait, elle n’a pas quitté Élodie des yeux. Elle a vu le visage de son amie virer doucement à l’écarlate !

Un silence s’installe entre les deux amies

Élodie se lève vient s’assoir à côté de Floriane. Elles se regardent les yeux dans les yeux. Doucement, tendrement Élodie prend le visage de son amie entre ses mains et l’embrasse tendrement sur les lèvres.

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