Portrait
Assise sur son fauteuil roulant, elle est bien loin de la jeune femme volontaire, de la dame mûre dynamique un tantinet autoritaire que j’ai connues toutes deux. Elle, capable de remuer un camion de terreau pour cultiver des tomates ou des haricots verts ou de bichonner ses rosiers jusqu’à la tombée de la nuit, n’aspire plus qu’au repos. Parfois un mot croisé, quelques lignes d’un livre, des émissions de télévision qu’elle suit d’un œil distrait, elle mime la vie à défaut de la vivre.
Sa main droite est atrophiée. A force de volonté de la sienne (mais de la mienne aussi), elle a réussi peu à peu àlui redonner une fonction, sa jambe gauche traîne un peu lorsqu'elle marche lourdement appuyée sur son déambulateur.
Chaque semaine, elle reçoit sa coiffeuse avec infiniment de reconnaissance. Elle n’envisage sa vie que brushée, soignée et apprêtée. Elle n’est jamais si heureuse que quand un visiteur souligne son élégance, sa jolie peau peu ridée malgré son âge, son courage. Alors, le sourire apparaît, un sourire large qui illumine son visage faisant oublié celui qui traîne dans le lit, hors de la vue des étrangers, lorsque l’envie et le désir sont entre parenthèses.
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