Guillaume

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Ma tête ! Bordel ma tête !

Ma caboche pèse de tout son poids sur mon corps qui lui, est dans l'impossibilité de se lever. Mes paupières restent désespérément closes et mon visage est enfoui dans l'oreiller. La nuit que j'ai passé me revient par flash-back.

Je fais face à la porte d'entrée de chez mon frère.

Je suis ensuite seul dans un bar, la conscience ravagée, et bois démesurément.

Démuni et ivre, je....

Merde, non ! Pas ça ! Pas elle !

Je me rappelle maintenant de tout. J'ouvre mes yeux et les équarquilles. Mes doutes sont confirmés. Je suis dans un lit qui n'est pas le mien mais celui de...

Oh non, je n'arrive pas à y croire !

La course aux souvenirs continue...

Comme aimanté par la tristesse en ce samedi soir, je me retrouve devant la maison de Brice, mon frère. Une lueur à travers la fenêtre de son salon me prouve qu'il est encore debout. Je prends mon courage à deux mains et me dirige vers la porte afin de sonner. Mais ma main reste suspendue pendant de longues minutes. La peur du rejet, de sa colère, et la honte de mes actes m'empêchent de frapper. C'est la douleur physique de ce geste en suspens qui me fait capituler.

En retournant vers ma moto garée plus loin, des bruits de rires retiennent mon attention. Je me dirige avec discrétion vers une des fenêtres. Mon cœur se serre encore plus qu'il ne l'était déjà. Mon frère est assis sur son canapé à regarder la télévision en compagnie d'une jeune femme brune aux cheveux longs et une jolie peau caramel. Tous les deux rient à pleines dents. Les bras de mon frère l'entourent et cette dernière l’observe fascinée.

Je ne reste pas et m'éclipse. Il ne m'en faut pas plus pour sentir en moi une infime sensation de soulagement. Cette image de mon frère, heureux, vient de panser une partie des blessures du passé. Pourtant la tristesse est encore présente en moi. Je me retrouve donc une fois de plus au Mango, assis à ma place habituelle. Je consomme avec déraison plusieurs verres pour anesthésier le manque. Et par je ne sais quel hasard ou force du destin, madame Solis se trouve elle aussi dans ce bar et prend place à ma gauche. Là où s’était assise mon inconnue.

L'alcool ingurgité en grande quantité et la frustration des derniers jours constituent un cocktail explosif. Mélanie le sens très bien et en profite Elle veut un plan cul, c’est ce qu’elle va obtenir!

Mais quel abruti fini !

Effrayé par les conséquences futures, je sors lâchement du lit sans faire de bruit. Affronter cette nuit avec une telle prédatrice, surtout mariée, n'est pas dans mes cordes aujourd'hui. Et puis, j’ai beaucoup trop mal à la tête. J'attrape mes affaires au vol et rentre chez moi soulagé.

Et si son mari nous avait trouvé ?

J’aurais probablement reçu la même correction que m’avait infligé mon frère. Cette putain d’histoire semble se répéter.

La douleur dans mes tempes me rend d'humeur maussade. Pendant que je pénètre dans ma chambre afin de m'allonger et passer la journée complète au lit, mon téléphone sonne.

J'ai décidé d'hiberner ! Je le pose sans le regarder sur la table de chevet et attrape la couette avec laquelle je me couvre de la tête aux pieds. Mais c'est sans compter sur la sonnerie qui persiste. Deux fois. Trois fois. Puis un message.

- Bordel ! grogné-je en tendant mon bras pour attraper le téléphone sans sortir de la couette.

Je lis le texto de Coralie qui me demande où je suis, tandis qu’au même instant, la photo de Nathan s'affiche, m'indiquant son appel. Je capitule et réponds avec une voix pâteuse.

- Quoi ?

- Mec ? Tu as une voix digne d'un lendemain difficile, constate Nathan.

- Tu as vu juste Sherlock, je suis en plein black-out.

- Donc si je comprends bien, tu as oublié ?

Il semble s'énerver et je ne comprends pas pourquoi. Je veux juste qu’on me laisse tranquille moi...

- Oublié quoi ?

- On est dimanche midi, tu dois venir manger avec nous.

- Ah oui, c'est vrai ! C’est aujourd'hui que tu nous présentes ta copine.

Je racle ma gorge pour récupérer ce qui me reste de voix et continue:

- C’ est vraiment sérieux entre vous? demandai-je sans sommation.

- Bien sûr, mais pourquoi tu me demandes ça ?

- Parce que si ça ne l’est pas, je pourrai avoir le luxe d'annuler et dormir toute la journée.

- Arrête de dire des conneries et sors de ton pieu ! Coralie et Dorian sont là, on n'attend plus que toi ! m'ordonne Nathan avec impatience.

Je n’ai aucune motivation mais je finis par capituler :

- Laisse-moi prendre une douche et j'arrive.

Je raccroche et pars me préparer en traînant des pieds ! En sortant de la douche, j'enfile un jean et un vieux tee-shirt noir. Je laisse mes cheveux sécher naturellement et quelques bouclettes apparaissent. J'ai suffisamment la tête dans le brouillard pour ne pas avoir envie de me mettre sur mon trente et un.

Après avoir ingurgité une bonne dose d'ibuprofène, je sors de chez moi en enfilant ma veste en cuir. Je m'engage sur la route en grimaçant. Arrivé devant l'appartement de Nathan, je frappe à la porte. Il ouvre et m’attaque direct:

- Tiens, un retardataire !

Je passe outre et entre dans ce grand salon, éclairé par une grande baie vitrée, qui laisse entrer le soleil sans timidité. Merde j'en ai mal aux yeux et j’ai pas de lunettes de soleil. Bien fait pour moi !

Cet appartement était gestion locative par mon agence et dès qu'il s’est libéré j'ai réservé cette perle rare pour mon ami. Je salue Dorian et me précipite vers Lili en oubliant instinctivement mes petits bobos.

J'observe ensuite la pièce. Pas de petite amie en vue, je tourne mon regard vers Nat.

- Et bien ? Où est la star du jour ?

Aline est dans la cuisine, elle arrive avec les amuse-gueules.

J’espère que la fille est aussi jolie que le prénom en tout cas.

- Sinon ça va depuis vendredi ? Vu la tête que tu as, je suis sûr que tu es sorti hier soir ! continue-t-il pour meubler la conversation.

Je n'ai pas le temps de lui répondre. Un bruit fracassant de vaisselle qui tombe à terre se fait entendre juste à quelques centimètres de moi. Certains débris viennent même se poser contre ma chaussure. Je les fixe avant de tourner mon regard vers l'origine de tout ce ramdam. J’observe la jeune femme face à moi, les mains dans le vide. Ma respiration se coupe et j’ai l’impression que mes poumons brûlent de l’intérieur. C’est la même sensation qu’une première bouffée de cigarette. A la première inspiration on sent la fumée se propager dans notre cage thoracique puis ensuite, vient la douleur. Vive, incandescence, brève, puis le soulagement. On se dit que plus jamais on ne touchera une cigarette mais on y revient, encore et encore jusqu’à l’addiction complète. Totale.

Bon sang, je connais ces magnifiques prunelles gris-marron pour m'y être déjà plongé dedans. Je connais cette demoiselle au charme indéniable pour y avoir cédé.

Merde, mon inconnue !

Si je devais représenter en une seule image l’impact de sa présence ici, elle serait celle d’une main invisible qui, d’un seul coup sec, dégoupille mon cœur devenu grenade.

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