Chapitre 2

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Le lendemain matin, Marla se réveilla, quand une chose pelucheuse lui chatouilla la truffe, la faisant éternuer.
En ouvrant les yeux, elle vit la queue duveteuse d'Alaric s'agiter juste devant ses yeux. Celui-ci, encore profondément endormi, agitait son appendice dans tous les sens, tandis que sa gueule était grande ouverte et laissait pendre sa langue.
Ce tableau des plus ridicules, la fit sourire, de même que le feu follet qui apparut sur son épaule et lui enlaçant le cou.

Le regard de la jeune femme se posa ensuite sur un long morceau de bois, qui traînait à côté du renard, et qui venait d'être taillé en pointe à l'une des extrémités. Elle remarqua alors que son épée avait été déplacée dans la nuit et que ce devait être le félon qui s'en était servie pour tailler son arme.
Alors, offusquée, elle reprit son arme et l'attacha à sa hanche. Le feu follet en profita pour se frotter affectueusement le "visage", contre le cou de la louve, lui envoyant un sentiment de bonheur.

-Faudrait que je te trouve un petit prénom. Dit elle, préférant se concentrer sur autre chose. Que dirais tu, de feu ? Ou flammèche... ho non ! Ignis ! Tu en pense quoi ?

La petite flamme, qu'était sa tête, s'allongea alors et devint rouge de bonheur en augmentant son intensité. Elle se tourna ensuite vers Alaric qui ronflait bruyamment.

-Allez, debout ! Lança-t'elle au renard endormis, en lui donnant un petit coup de pied dans les jambes, nullement amicale à cause de « l'emprunt » de son arme. On a de la route à faire !

Celui-ci, grognon qu'on le réveille aussi durement, essuya la bave coulant de son museau. Il prit ensuite le temps de se bander les pieds, avec des morceaux de tissus, avant de se lever pour faire face à la louve qui le surplombait de sa hauteur.

-Bien le bonjour Marla. Je suis désolé mais j'ai perdu l'habitude des grasses matinées et je me devais de rattraper mon retard.

Il tira ensuite une lanterne d'entre deux sacs.

-Tiens, j'ai retrouvé l'outil qui a servit mes "amis" à utiliser le pouvoir du feu follet. Ca évitera aussi qu'il ne nous attaque au mauvais moment.

En voyant la lanterne, le feu follet devient bleu et se blottit contre le cou de la louve, qui, pour le calmer, passa une main sur sa petite tête.

-Mais pourquoi ? S'offusqua Marla, propageant son humeur à la créature de feu. Ignis est très gentil, il ne nous a rien fait !

-Pour le moment. Mais il a aidé les esclavagistes à me capturer et possède de dangereux pouvoirs. Il peut très bien se retourner contre nous.

-Et tu pense qu'une lanterne va nous protéger ?

-Ils s'en sont servis pour invoquer un mur de flammes, ainsi que des boules de feu. Je ne sais pas trop comment ça marche, mais ça pourrait nous aider. Et puis tu t'imagines te promener dans les villages avec ça sur ton épaule ?

Marla réfléchit un instant puis poussa un profond soupir, à la fois résignée et désolée.

-Très bien, prends la, mais pour le moment il restera avec moi et il s'appelle Ignis. Elle prit ensuite le feu follet dans ses mains et le porta à son visage. Ecoute Ignis, quand nous irons dans les villes il faudra te cacher. Je te mettrais dans la lanterne et une fois que nous serons seuls je te sortirais. Et tu seras toujours avec moi, d'accord ?

Le feu follet resta bleu, avec un air triste sur son visage. Marla posa ensuite une main sur sa tête et le caressa à nouveau. Le contact eu de suite l'effet de le rassurer et de lui rendre sa couleur rouge.

Alaric sembla satisfait et il attacha l'objet à la ceinture de la jeune louve.

-C'est bon, on peut y aller. Le petit groupe se mit finalement en branle et, après avoir passé un moment à crapahuter dans la forêt, ils finirent par déboucher sur la route que Marla avait abandonné la veille, pour aller chasser.

-Ca fait longtemps que tu es une animalis ? Lui demanda-t'il.

-Trois ou quatre , j'ai un peut perdu la notion du temps. Lui répondit-elle.

-Ho, je vois. Ça n'a pas dû être simple de vivre aussi longtemps en temps qu'animalis. Tu as pus au moins voir qui tenait vraiment à toi. -Es tu heureux de ce que je subis ? Demanda-t'elle suspicieuse, serrant le poing de colère, prête à le frapper si il se montrait insultant envers elle.

-Ca dépend, dit-il avec un air détaché, As tu déjà fais le mal envers un des miens ? En as tu fouetté un, jusqu'à ce que sa peau se détache de son corps ? As tu déjà plongé sa main dans un feu ?

Ce qu'ignorait Marla, c'est qu'il désirait un peut plus la connaître et aussi savoir quel genre de personne elle était. Mais, encore suspicieuse, elle prenait chaque paroles très à cœur.
Toutefois, il racontait cela comme si il s'agissait de souvenirs encore récents. Cette manière et le ton qu'il avait donné pour énumérer ses exemples, fit bien plus trembler la jeune louve, que l'énumération en elle même.

-Oui. J'ai... tué quelqu'un. Commença-t'elle, alors que les souvenirs refaisaient surface. Quand j'étais petite, j'avais cassé un objet appartenant à mon père. Je ne me souviens plus tellement de l'objet, mais... j'ai accusé un serviteur...

-Un esclave, non ? La reprit Alaric.

-... oui, un esclave. Je l'ai accusé à ma place et il fut pendu au gibet de la ville. Quand je regardais par la meurtrière, je voyais son corps se décomposer chaque jours durant. J'allais le voir tous les jours, espérant qu'il serait retiré le lendemain. Je ne me suis jamais sentie aussi coupable. J'avais condamné un innocent à la mort. Je l'ai révélé à un de mes instructeurs, qui ma sévèrement réprimandée et s'est mit à m'éduquer pour devenir chevalier, ce qui m'aurait aidé à trouver la rédemption. Sauver la veuve et l'orphelin... Voilà qu'étaient devenus mes maîtres mots. Et c'est-ce qui s'est passé, le jour où j'ai été maudite. J'ai protégé mes parents ainsi que les gens du château en faisant ce qui me semblait juste. J'ai reçu la malédiction qui leur était destinés. Et sinon il faut vite que je trouve un moyen de retrouver mon apparence normale avant de rester piégée ainsi.

-Je vois. Dit-il, absolument pas énervé. Mais je trouve que ça aurait été amusant de voir plus d'humains devenir des animalis.

-C'est tout ? S'écria-t'elle, presque offusquée qu'il ne s'en prenne pas à elle, tellement elle s'attendait à ce qu'il lui en veuille.

-A quoi bon m'énerver contre toi ? Lui dit-il avec nonchalance, en agitant paresseusement sa queue duveteuse d'un côté à l'autre. Tous les enfants font des bêtises. T'imagines même pas le nombre des miennes. Et ce n'est pas non plus toi qui a donné la sentence. Tu sais très bien que te haïr ne le fera pas revenir. Et puis je peux entendre ton cœur battre. Je sais que tu le pense et que tu ne me mens pas. Je suis convaincu de ton souhait de te racheter.

-Mon cœur ? Lui demanda-t'elle hébétée.

-Oui, les animalis ont une très bonne ouïe, qui leur permet aussi bien d'entendre une proie éloignée, que d'entendre le cœur accélérer en cas de mensonge. Lui dit-il avec beaucoup de fierté. Si tu veux, je pourrais t'apprendre deux ou trois trucs d'animalis.

Effarée qu'on lui apprenne une telle chose qu'on ne lui avait jamais enseigné,sur les animalis , la louve accepta. Après tout, ce pourrait être utile le temps qu'elle serait dans ce corps.
Tout à coup, l'attitude du renard devint bien plus rayonnante et amicale. Comme si il s'agissait d'une toute autre personne.

-Tout d'abord, laisse moi me représenter avec plus de courtoisie. Je me prénomme Alaric, de la tribu des renards. Et je serais ton professeur.

-Merci monsieur le professeur, mais je ne souhaite pas non plus rester très longtemps sous cette forme.

-Et c'est bien dommage. Rassure moi, tu n'as pas de compagnon ?

-Non et ne pense même pas à avoir une chance avec moi, tu n'es pas mon genre. S'empressa-t'elle de répondre.

-Ha bon, et quel est ton genre ? Demanda-t'il avec un ton faussement aguicheur.

-Je préfère les beaux hommes, chevaleresques avec peut de fourrure. Je ne veux pas me retrouver dans un lit avec des poils d'autres animaux que ceux des draps.

-Mais je sais me montrer chevaleresque ! S'offusqua-t'il. Et puis je n'aurais qu'à sortir me brosser le poil après l'hiver et tu ne seras jamais gêné par ce léger détail.

-Tu cherche à faire quoi, là ? A me séduire ? Grogna t'elle en réponse.

-Nullement, mais à savoir si quelqu'un attend ton retour en temps qu'humaine.

-Personne hormis mes parents, mais si je le fais ce n'est pas pour eux. -Je vois. Conclut il en se frottant le bout du museau, pensif. Se sentant obligée d'enfoncer un peut le couteau, Marla prit une profonde inspiration, lui permettant de capter l'odeur nauséabonde du renard.

-Et puis, désolé mais je n'aime pas trop les sacs à puces qui traînent avec eux cette odeur pestilentielle.

-Tu viendras me faire ma toilette alors, se moqua-t'il en lui donnant un coup de queue au museau, mais tu as raison, il faut que je me trouve un endroit pour me laver.

Après plusieurs heures de marches, ils tombèrent sur un pont avec un cour d'eau assez profond. Alaric s'y précipita, vérifia la profondeur puis retira son pagne avant de se jeter à l'eau.

-Tu pourrais au moins faire preuve de pudeur ! S'offusqua Marla en s'arrêtant près de l'endroit où il avait abandonné ses affaires.

-Ha, vous, les humains avec votre idée de "décence"... Tu devrais lâcher un peut prise et profiter de la vie.

-Enfin là je profite malheureusement de la vue.

-J'espère que tu l'apprécie. Lança-t'il en agitant sa queue et en prenant une pose, de dos, se voulant sexy.

Il se concentra à se frotter longuement la fourrure dans l'eau froide, chassant la crasse se trouvant dessus. Puis, à force de sentir le regard de Marla se poser souvent sur lui, il se retourna, dévoilant toute sa superbe, surprenant par la même occasion la louve qui écarquilla les yeux avant de vite les fermer.

-Non mais ça va pas, hurla-t'elle offusquée, alors que son cœur battait la chamade, tu es dégouttant !

Elle entendit alors l'eau s'agiter et Alaric sortir de l'eau. Elle perçut ses bruits de pas se rapprocher d'elle. Osant entre ouvrir un œil pour voir si il se rhabillait bien, elle put avoir une vue sur son corps entièrement nu et couvert de fourrure dégoulinante.

-Bon sang Alaric arrête ! S'écria-t'elle, rougissante sous ses poils, sa queue se hérissant dans son dos.

Le renard se pencha alors au dessus d'elle avec son sourire moqueur, sa queue s'agitant derrière lui, montrant son amusement.

-Première leçon sur les animalis: Ils n'ont aucune gêne. Alors presse toi de te déshabiller et viens profiter de l'eau, tu me fais me sentir tout nu ! Et puis, il se mit à renifler la louve avant de grimacer, je pense que tu en aurais bien besoin.

-Et tu me promets de remettre ton pagne ? Demanda-t'elle gênée.

-Bien sur, pour qui me prends tu ? Un sauvage ? Ironisa-t'il.

Elle ne dit rien pendant un instant, puis poussa un profond soupir vaincu. Il allait falloir qu'elle fasse beaucoup de concessions pour le supporter.

-Très bien mais retourne toi. Poussant un profond soupir et secouant la tête déçu, il fit demi-tour et replongea dans la petite rivière.

-Tu surveilles nos affaires Ignis ? Demanda-t'elle au feu follet qui s'était assis sur une pierre à bonne distance de l'eau.

Elle commença alors à se déshabiller, retirant sa cape en fourrure de chat géant, ainsi que ses pièces d'armures et ses armes. Se sentant beaucoup trop nue, elle garda un bras qui cachait ses seins.
Elle s'avança ensuite dans l'eau froide, la faisant frissonner.

-Elle est vachement froide ! Se plaignit-elle avant de se prendre une vague d'eau, la faisant hurler de surprise.

Alaric éclata de rire, sous le regard assassin de la louve entièrement trempée, sa fourrure lui cachant les yeux, avant d'écarter ses poils. Elle avait arrêté de cacher ses seins et se dirigeait déjà vers lui, les griffes en avant avec rage.

-Je vais te tuer !

Malheureusement pour lui, le renard se fit attraper et envoyer par le fond. Il ressortit la tête de l'eau, prit une profonde inspiration avant de se prendre une vague dans la figure.
Après un moment où les deux animalis se firent face, Marla le fusillant encore du regard, Alaric éclata une nouvelle fois de rire, ravit de voir le regard énervé de la louve. D'abord incertaine, la louve se laissa prendre au jeux et se mit à rire à son tour avant de l'éclabousser de nouveau.
De son côté, Ignis les regardait en se tordant de rire devant leurs têtes trempées, leurs poiles alourdis par l'eau leurs donnant de petites barbichettes.
Ils finirent par éclater d'un rire franc et amical.

-Ca fait du bien, ça fait un moment que je n'ai pas autant rit... merci. Fit Marla en essuyant une larme de joie du coin de son oeil.

Elle vit alors le regard attendrit qu'Alaric lui adressait. Soudain, ses oreilles se dressèrent sur sa tête et sa queue aussi, ses poils alourdis, la rendant plus petite.

-J'entends des proies, l'informa-t'il en restant concentré, je dirais une biche et son petit.

-Attends, tu arrive à les entendre d'aussi loin ?

-Ouais, ce sont des années de pratiques.

Marla se tut et essaya de tendre l'oreille, mais elle n'entendit rien de plus que les feuilles des arbres s'agitant sous le vent.

-J'arrive à les sentir maintenant. Ajouta-t'il.

-Alaric, tu pourras m'apprendre à chasser comme toi ? Demanda-t'elle avec espoir.

-Bien sur, lui répondit-il avec un large sourire, son orgueil gonflé à bloc, je me suis engagé à être ton professeur. Mais pour le moment on a assez de viande sèche.

Il lui lança ensuite de l'eau à la figure et reprirent leurs amusements. Après une longue pause pour se sécher, et par la même occasion se brosser les poils du mieux possible, ils se rhabillèrent pour reprendre leur voyage. Alaric ne loupant aucune occasion pour se rincer l’œil.

Ainsi débuta leur voyage en direction du château d'Ys, ponctué chaque jours par les chasses d'Alaric. Il ne pouvait, malheureusement, pas laisser Marla traquer le gibier tellement elle était incompétente. Si bien que l'élan altruiste d'Alaric, qui était d'apprendre à la louve à chasser, se terminait à chaque fois sur une nouvelle engueulade, chacun partant à la poursuite du gibier dans son coin. Chacun responsable, soit de faire trop de bruit et donc de déconcentrer l'autre ou de gâcher les pistes.
Toutefois, quand ils rentraient à leur camps, ils faisaient l'effort de ne plus s'engueuler, faisant naître petit à petit une étrange relation entre les deux.

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