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Il n’entendait que cet appel désespéré, que cette souffrance qui empestait la peur. Elle hurlait tant à l’intérieur d’eux, elle criait à s’en fracturer les cordes vocales. Suan l’entendait comme si elle nageait dans son esprit, comme si elle y avait fait son nid désespérément et involontairement. Ils partageraient tout. Ça, il en était désormais sûr, et ça l’effrayait. Il n’avait pas spécialement envie d’entrer dans la tête de la rouquine par inadvertance ou que le contraire se produise.

Son cri intérieur revenait en vague jusqu’à lui. Elle attendait de l’aide. Elle ne l’attendait pas lui particulièrement, mais elle attendait… Elle cherchait l’être qui porterait sa douleur à sa place.

Doucement, une silhouette se forma dans le vague de son esprit. Suan observa une Trysol plus jeune dont les larmes dévastaient le visage. Recroquevillée, elle se confondait en pleures, les bras enroulés sur ses jambes. Elle regardait un point au-delà du néant qui les entourait alors. Un autre personnage apparut et glissa autour d’elle son corps de jeune adulte, et la porta. En se tournant vers Suan, il dévoila son visage. Un adolescent mal défini, dont le visage était floué par la mémoire de Trysol. Suan était dans sa tête et non le contraire comme il l’avait pensé. Pourquoi était-il là ?

Il fixa la scène, contempla deux ponts identiques qui rejoignaient un ailleurs. Il comprit qu’il n’était ni en lui ni en elle, mais entre eux deux. Ici, c’était un univers pour leurs deux esprits. Leur connexion. Leur lien de Hàng Xiè et de guerrière.

Il la contempla encore, analysa ses petites mains qui serrait le col de ce garçon. Un de ses frère, pensa Suan en caressant du regard la chevelure rousse que le vent inexistant portait en arrière.

— Voilà qui tu es, dit-il comme pour lui-même, une petite fille remplie de craintes et demandeuse d’affection.

C’était donc ce petit être maigrelet qu’elle cachait sous sa carrure de bûcheronne et la sévérité de son regard. Toute armure protège quelque chose de brisable. Mais à la vérité, Trysol n’était-elle pas déjà brisée, comme eux tous ? Que cacher réellement leur armure ? Suan y réfléchit tout en écoutant les pleures se perdre dans l’écho du rien qui les entourait toujours. Et si leur armure retenait leur bouleversement, ce quelque chose de faible qui pouvait les mener à la mort s’ils osaient le montrer.

— Est-ce bien utile de se cacher encore quand on n’a plus rien à protéger que notre égo ?

Les sentiments sont partis, ceux que nous aimions sont partie aussi… Il ne reste plus que nos souvenirs et notre futile espoir… songea-t-il, et peut-être cette envie de sauver ceux qui nous ressemblerait.

Pourquoi avait-il de telle pensée dans ce moment si peu opportun à l’avoir ?

Suan l’écouta et en moins de temps qu’il faut pour analyser un danger, il sentit son corps se remodeler. Son esprit glissa plus loin dans son cœur et une porte se referma devant lui. Il était à nouveau dans le château de ces cents vies et il regardait la créature devenir maître de leur corps. Trysol avait besoin de la chose. Elle hurlait son nom à travers leur lien : Topam. C’était son nom de créature. Celui que Trysol venait de lui donner sans savoir la raison de cette dénomination… Elle aussi était guidée par… par quoi ? L’instinct ?

Suan rejoignit ses lui et se plaça à côté de Adom. L’homme se saisit d’une de ses mains et embrassa son front.

— Cela ne sera pas long, murmura-t-il.

Suan leva les yeux vers lui dans une demi-incompréhension avant de sentir une lourdeur s’accrocher à ses poignets. Il faillit s’écrouler au sol, rattrapé de justesse par son premier lui et remarqua les chaines. Elles portaient le nom de Trysol et celui de Topam. Un rappel. Il était le centre de tout.

D’un coup sec, les chaines le projetèrent en arrière. Dos au mur, Suan accepta sans résister son fardeau et fixa son regard sur la scène qui se déroulaient dans la réalité. Trysol chutait à pique dans les airs quand une immense patte-main griffue la rattrapa. Un vide se creusa dans le ventre de Suan, et une sensation de voltige le troua l’estomac.

— Je peux voler ? murmura-t-il.

— La créature à une grande puissance et une musculature qui lui permettent de sauter plus haut que cinq mètres de haut. C’est facile pour la créature de bondir comme il vient de le faire, expliqua une femme sur sa droite.

Elle était de dos et portait un long drap vert qui enfermait tout son corps. Sa coiffure n’était que cheveux noués entre eux et d’écorce sculptes.

— Apprends à te connaître et tu pourras devenir son maître. Pour le moment apprends à souffrir de tes transformations. La douleur est vive, elle ne reste pas.

De qu’elle douleur parlait-elle ? Ici, il ne ressentait rien et il ne se souvenait même pas de c’être métamorphosé.

— Trysol t’a appelé. Ton corps à répondu avant ta conscience, dit-elle comme si elle avait entendu sa pensée.

Suan s’apprêtait à lui demander qui elle était lorsque qu’un tremblement secoua son corps. Ses os parurent craquer comme lors de sa première mutation. C’était comme si il prenait conscience du décalage et la brûlure qui s’infiltra sous sa peau cogna drue.

La créature retomba sur ses pattes et posa Trysol sur la terre humide, alors que l’âme de Suan s’agita comme du verre vibrant sous la voix d’une chanteuse.

Il savait que le mal reviendrait à chaque fois et maudit Trysol pour ça.

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