37. L'Ours en peluche

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Albane

Foutue journée qui a mal commencé ! En me levant ce matin j’ai, comme souvent, jeté un œil sur le mur empli de photos de mes proches et j’ai réalisé qu’en ce mois de mars, c’était le jour fatidique de l’anniversaire de ma mère. Ma mère, que je n’ai pas vue depuis quatre ans. Les larmes me sont immédiatement montées aux yeux et mon petit rituel du matin a été bouleversé par mon besoin de mouchoirs et de câlins à Cravate. Impossible d’avaler quoi que ce soit. Même mon café m’a donné la nausée.

J’ai failli arriver en retard au boulot. Evidemment, broyer du noir n’aide pas à être motivée pour aller travailler. Ne pas réussir à s’arrêter de pleurer non plus. J’ai bien failli appeler Nicolas pour lui dire que je n’étais pas en état de venir, mais j’ai fini par me convaincre que rester sous la couette à remplir la poubelle de mouchoirs n’était pas une solution, que je pourrai me changer les idées au centre, et relativiser un peu ma situation en côtoyant des personnes qui ont vécu bien pire que moi. Mais la réalité est là : ma mère me manque. Atrocement. Et ce jour est toujours compliqué à vivre. Il l’était déjà quand j’étais à Marseille, éloignée d’elle et de mes proches. Il l’est encore plus maintenant qu’une heure seulement nous sépare, mais que je ne veux et ne peux pas aller la voir. Trop risqué.

Mes proches ne savent rien de ma nouvelle vie, ou presque. Nous n’échangeons que des mails. Je n’ai pas entendu la voix de ma mère depuis plus de deux ans. C’est terrible, mais nécessaire. Si je leur ai parlé de mon passé plutôt globalement, ils ont bien compris ma démarche, même s’ils essaient de me convaincre de revenir sur ma décision. Je ne risque plus rien ? Je n’en crois pas un mot. Je sais de quoi il est capable, malheureusement, et je ne veux pas en faire les frais. Je ne veux plus.

Me voilà donc dans le bureau du bâtiment des familles, à vérifier que mon maquillage tient le coup sur le petit miroir de poche que j’ai toujours dans mon sac à main. J’ai les yeux gonflés, autant dire que rien ne pourra être suffisamment magique pour cacher ça. Pas de larmes depuis plus de trois heures, un miracle, mais j’ai emmené Asma à la préfecture puis enchainé sur un entretien avec Irina, puis sur de l’aide aux devoirs et enfin sur le repas au réfectoire. Et maintenant que je me retrouve seule, difficile de ne pas replonger dans mes travers. Je sais que c’est passager, que je vais être dans cet état quelques jours et que cela ira mieux d’ici peu, mais s’il y a bien un moment où je ne contrôle plus mes émotions, où le masque de l’éduc est bien fissuré, c’est à ce genre de dates. Ces dates où je voudrais, encore plus que chaque jour, partager un moment avec mes proches, les prendre dans mes bras, les entendre rire et leur dire à quel point je les aime. Instinctivement, ma main se porte sur mon pendentif, celui qui ne me quitte jamais. Cinq anneaux imbriqués les uns dans les autres avec les prénoms de ma mère, mon petit frère, mes neveux et ma nièce sur chacun. C’est très sentimentaliste, ridicule sans doute, mais j’ai besoin de ce petit rien pour, au quotidien, me sentir mieux.

Il me reste deux heures de travail, il faut que je tienne le coup. Ensuite, je pourrai rentrer chez moi, me vautrer dans mon canapé avec un bac de glace, ou faire un gâteau au chocolat, et pleurer encore quelques heures jusqu’à m’endormir d’épuisement, Cravate sur les jambes, la tignasse dans tous les sens et le nez rouge. Magnifique tableau. Vie pathétique, Albane. C’est vrai, ma vie ne compte qu’une chose épanouissante : mon travail. Une fois le boulot quitté, je ne sors pas, sauf pour mes courses ou pour aller à la librairie. Je ne vais pas au cinéma ou au restaurant, la honte d’y être seule. Je ne vois pas d’amis, dans les parages je n’ai personne, hormis Nicolas et Jamila, avec qui je m’entends plutôt bien. Concrètement, ma vie c’est mon taf, c’est ce à quoi je m’accroche pour ne pas plonger dans une belle grosse dépression. Quand je dis pathétique, je ne mens pas.

Cependant, depuis quelques mois, j’entrevois un peu de mieux. Evidemment, cela se rattache toujours au boulot. Mais cette complicité naissante avec Julien me fait du bien. J’ai moins l’impression d’être un robot avec lui, j’agis davantage à l’instinct, tout n’est pas réfléchi. Je vis. C’est ça, je vis, tout simplement. Je ris, je plaisante, je m'amuse. Je m'agace, je me remets en question, je me lâche. Tout change…

Un sourire est né sur mes lèvres à cette pensée, sans doute pour la première fois de la journée si l'on ne compte pas le moment où Gabin m'a fait un câlin en rentrant de l'école. Ce petit ourson est tellement adorable qu'il est difficile de ne pas s'attacher et de rester de marbre. Je suis déjà, d'ordinaire, incapable de rester stoïque face à des enfants ; autant dire qu'avec Gabin je n'ai même pas essayé. J’ai su, à la seconde où je l'ai vu, qu'il me ferait fondre.

Je me lève pour aller faire mon tour habituel dans le bâtiment. Si je reste à ne rien faire, autant dire que je vais replonger dans mes pensées moroses. Ça attendra le retour à la maison. Le premier étage est particulièrement calme, les enfants doivent déjà tous dormir. Au second, j’entends Asma chanter une berceuse dans sa langue maternelle, pour Lina, j’imagine, qui a souvent du mal à s’endormir. Mais ce qui attire réellement mes oreilles, ce sont les rires qui proviennent du studio de Julien et ses enfants. C’est à ce moment que ma solitude me tombe sur les épaules comme une chape de plomb. Julien pense avoir tout perdu, mais il lui reste l’essentiel : l’amour. Je refoule tant bien que mal les larmes qui montent. Cette journée est définitivement pourrie et j’ai hâte qu’elle se termine. Je n’ai même pas envie de les interrompre pour leur demander de faire moins de bruit, parce que l’on devrait tous connaître ce genre de moments, tous vivre entourés et heureux. Tout ce que je veux, à cet instant, c’est m’asseoir contre cette porte et les écouter rire encore. Mieux, j’aimerais tellement pouvoir partager ce moment que mon coeur se serre dans ma poitrine. Je n’ai plus connu ces moments de joie en famille depuis bien trop longtemps.

Je souffle un bon coup pour tenter de garder contenance, ou tout du moins essayer ; je crois qu’aujourd’hui il m’aura été impossible de jouer l’éduc à fond de toute façon, et frappe doucement à la porte du studio de la petite famille Perret. Le silence se fait de l’autre côté et je les imagine tous les trois immobiles, doutant d’avoir entendu quelque chose. Je sursaute quand la porte s’ouvre, et découvre la scène qui valait tous ces rires. Gabin a du chocolat sur les joues et le nez, et Julien arbore des traces de doigts sur son tee-shirt blanc qui n’est plus du tout immaculé.

- Bonsoir, Monsieur Perret, dis-je sans pouvoir m’empêcher de sourire.

- Oh, bonsoir Albane ! Tu es venue prendre du chocolat avec nous ?

Il me décoche un sourire charmeur et me montre la plaquette qu’il a à la main. Sans me quitter du regard, il la porte à sa bouche et croque dedans avec une gourmandise non feinte. Je me sens fondre devant cette vision et j’aimerais tellement qu’il se montre à nouveau aussi gourmand avec moi qu’il l’est avec ce chocolat, que mes pensées dérivent rapidement vers un moment beaucoup moins chaste que cet instant.

- Ne me tentez pas, marmonné-je, presque contrariée. Je venais vous dire qu’il était l’heure de baisser un peu le volume sonore, mais je comprends qu’il était justifié. Tu es magnifique Gabin, avec tout ce chocolat. Ça me donne envie de te croquer, fais attention, dis-je en lui faisant un clin d'œil.

- Albane, tu sais que tu peux te laisser tenter ! Entre donc plutôt que de rester sur le pas de la porte, j’ai quelque chose pour toi.

Il se retourne vers ses enfants à qui il fait signe de faire moins de bruit et j’entre donc dans l’antre de Papa Ours, refermant la porte derrière moi pour éviter que le bruit éventuel ne dérange les voisins. Je le vois disparaître dans la chambre des enfants. Je me demande ce qu’il a en tête, et je profite de son départ pour me pencher vers Gabin et lui tendre les bras. Le petit garçon couvert de chocolat vient dans mes bras et je le serre fort contre moi en m’asseyant aux côtés de Sophie. La douce adolescente me sourit alors que je serre sa main dans la mienne.

- Ah voilà, je l’ai trouvé ! Je l’avais acheté pour toi, mais je n’avais pas encore eu l’occasion de te le donner. Et surtout, tu ne dis pas non ! C’est juste fait pour toi !

- Heu… J’aime bien dire non, juste par principe ! Qu’est-ce que vous avez fait comme folie ?

- Eh bien, ouvre donc le paquet cadeau ! Tu le sauras ! Je ne sais pas quand est ton anniversaire, mais les enfants étaient d’accord avec moi. C’est l’anniversaire de notre arrivée ici, ça fait tout juste six mois, et cette occasion méritait un cadeau !

- Vous êtes adorables, dis-je en souriant, mais je ne peux pas accepter voyons ! Je… Je n’ai besoin de rien.

Si ce n’est de cette chaleur humaine, là, tout de suite. Juste un petit moment familial où je me sens bien. Juste les petits bras de Gabin autour de mon cou, et cette complicité qui est née entre Sophie et moi. Ou les grands bras de son papa autour de moi… Voilà, je déraille. Foutue solitude qui me tord le ventre, particulièrement aujourd’hui. Bon, ok, je n’ai pas besoin de cette raison pour imaginer Papa Ours nu, en train de me prendre, d’ordinaire déjà.

- On a toujours besoin d’un petit quelque chose. Surtout quand c’est donné avec le cœur ! Et puis, tu ne peux pas refuser, sinon Gabin et Sophie seraient trop déçus ! Ils ont choisi le cadeau avec moi ! N’est-ce pas Choupette ?

- Oui, Albane, Papa a bon goût, tu devrais ouvrir le paquet. Fais nous plaisir, s’il te plaît !

Le regard que me lance Sophie à ce moment-là me rappelle un souvenir de mon enfance. J’avais fait un petit collier en perles que j’avais emballé moi même, maladroitement, dans du papier cadeau, et je l’avais offert à ma mère qui l’avait accepté, les yeux remplis d’amour. En ce jour si particulier, je ne peux m’empêcher de repenser à cette scène, et je devine chez la jeune fille le même désir de reconnaissance que j’avais à son âge.

- Très bien, soupiré-je avec un sourire en coin. Mais il a intérêt à être du tonnerre ce cadeau, sinon je vous pique votre chocolat !

- Albane, si tu n’aimes pas, tu pourras prendre tout notre chocolat, me répond Papa Ours, affectueusement. Mais si tu aimes, tu pourras quand même en manger !

Il me tend alors le paquet que je prends avec une frénésie que j’ai du mal à retenir. Nos doigts se frôlent et je sens comme une petite décharge électrique quand mes doigts se posent sur les siens pour récupérer le cadeau. Je me demande de quoi il peut s’agir et j’essaie de rester concentrée sur l’objet dans mes mains, afin de ne pas penser à la proximité du corps de Julien qui se tient à quelques centimètres à peine de moi. Son odeur qui m’est si familière, ce mélange de promenade dans les bois associée à une note que je pense être de la vanille, m’embaume et me transporte.

- Je me demande ce qui vous a fait penser à moi…

Ils ne me répondent pas mais je sens Gabin s’accrocher à une de mes jambes pour me voir ouvrir le cadeau, et Sophie me regarde également faire, ses belles prunelles si semblables à celles de son père, rivées sur moi.

Je défais le nœud et je déballe le présent qu’ils m’ont fait. Je ne m’attendais pas du tout à ça en frappant à la porte... Il s’agit a priori d’une superbe robe en laine grise, que je sors du paquet pour pouvoir l'admirer. Totalement dans le style de vêtements que je porte ; des mailles épaisses et serrées, des manches longues et un col large qui devrait découvrir mes épaules. Elle est jolie, et je n’ai absolument pas à forcer le sourire qui naît sur mes lèvres.

- Elle est… J’adore, vous êtes vraiment des amours. Je… Je ne sais pas quoi dire, balbutié-je avec les larmes aux yeux.

- Albane, mets la robe ! Papa dit que c’est ta taille, qu’il en est sûr, mais moi, j’ai un doute ! me dit Sophie. Je pense qu’il l’a choisie trop petite !

- Mais non, Choupette. Je suis convaincu qu’elle lui ira comme un gant. Albane, si tu veux l’essayer, tu peux passer dans la chambre des enfants. N’en profite pas pour te rincer l'œil sur mes peintures, nous, on veut te voir tout de suite !

- D’accord, d’accord, ris-je en me dirigeant vers la petite chambre des enfants.

- Si tu as besoin d’aide pour te déshabiller ou passer la robe, n’hésite pas Albane. Sache que je suis prêt à me sacrifier et à venir t’assister, me lance un Julien dont l’air malicieux mais aussi rempli de désir me pousse presque à accepter sa demande.

Si les enfants n’étaient pas là… Je suis presque sûre que je craquerais ! Mais je ne lui ferai pas le plaisir de le lui dire. J’ai ma fierté, et bien que j’aie beaucoup de mal à masquer mes émotions aujourd’hui, je fais de mon mieux pour lui lancer un regard que je veux sévère, un regard digne d’une éducatrice. Mouais, pas très convaincante, la fille, à mon avis.

- Je crois pouvoir me débrouiller seule, mais merci pour la proposition. Je prends note, Monsieur Perret, peut-être que ça pourra m’être utile un jour.

Je lui fais un clin d'œil et ferme la porte, la gorge serrée. Je me déshabille en constatant que je vais me retrouver les jambes à l’air une fois la robe passée, puisque j’ai eu la bonne idée d’enfiler un jean aujourd’hui. La robe est à la bonne taille, mais plus moulante que ce que j’ai l’habitude de mettre. Autant dire que je ne la mettrais pas sans un legging ou des collants, d’ordinaire, puisqu’elle s’arrête à mi-cuisses. Comme prévu, mes épaules sont découvertes et le col rond me fait un décolleté plutôt sage. Je ressors rapidement de la chambre, aussi mal à l’aise à l’idée de passer sous leurs yeux scrutateurs que désireuse de voir ce qu’en pensera Monsieur Mode.

- Votre verdict ?

- T’es trop belle Albane ! me lance Gabin en me sautant dessus.

J’ai à peine le temps d’ouvrir les bras qu’il se retrouve collé contre moi, et, tout naturellement, je fais un tour sur moi-même avec le petit ourson qui rit de contentement.

- Eh bien, j’ai perdu mon pari, elle te va trop bien la robe ! Tu es trop jolie dedans !

Sophie vient elle aussi me faire un câlin et le regard admiratif qu’elle me lance en me relâchant me donne une impression un peu étrange, comme si j’étais entourée de ma famille. J’ai le sentiment de rentrer chez moi, à la maison, et d’avoir tous ceux que j’aime qui m’accueillent et me font me sentir belle. Je jette un œil vers Julien, en me demandant ce qu’il pense de ce qu’il voit. Ses yeux brillent et je vois qu’il apprécie le spectacle que je lui offre.

- Eh bien ! J’en reste sans voix, finit-il par lâcher. Tu es splendide, je ne vois pas d’autre chose à dire…

Je dois perdre le contrôle rien qu’une petite seconde, mais c’est suffisant pour permettre aux larmes que je contiens depuis un moment de s’échapper. Je tourne le dos à Julien et Sophie, serrant Gabin, encore dans mes bras, contre moi. Trop d’émotions aujourd’hui. Si le moment est mal choisi, le craquage était prévisible et il m’est difficile de reprendre contenance. Comment peut-on se sentir à la fois si seule et si entourée ? Si malheureuse et si choyée ?

- Pourquoi tu pleures, Albane ? Tu t’es fait mal ?

Gabin a l’air si triste pour moi, sa petite voix est si attentionnée que cela redouble mes pleurs. Cela fait tellement longtemps que personne ne s’est vraiment préoccupé de comment j’allais. Je ne peux répondre mais je lui caresse tendrement les cheveux, sa joue posée contre mon épaule. Et puis, je ressens une douce chaleur m’envelopper. Des bras musclés entourent ma taille et viennent se poser sur le dos du garçon devant moi. Il est là. Derrière moi. Son corps collé au mien. Il m’enserre sans un mot, son souffle chaud dans mon cou. Je ne peux résister et mon corps entier se colle contre lui. Je sens à la fois son désir et sa tendresse, sa force protectrice et son profond respect. Je ferme les yeux et m’abandonne à mes émotions. Mes larmes coulent toujours, mais je ne sais plus si c’est de tristesse ou de joie. Sophie vient nous rejoindre dans notre étreinte et me voilà coupée du monde extérieur et de ses atrocités. Je suis entourée de trois êtres meurtris par la vie mais qui, ensemble, forment une muraille infranchissable contre toutes les épreuves et les difficultés qui pourraient venir me menacer. Les lèvres douces et chaudes de Julien viennent se poser sur mon cou et mon corps entier s’embrase dans un ressenti jamais connu jusque là. Un tendre mélange de désir, de passion mais aussi de calme et de volupté s’empare de moi alors qu’un frisson me traverse.

Je ne sais pas combien de temps nous restons ainsi, mais Julien finit par rompre doucement le silence qui s’était installé. Enfin, silence partiel, entrecoupé de mes sanglots.

- Allez, les enfants, allez vous brosser les dents, il est tard.

J’embrasse Gabin, toujours dans mes bras, sur la joue et le dépose au sol. Les deux petits ours s’exécutent alors que leur père ne bouge pas d’un poil, resserrant son étreinte autour de moi, ses mains sur mes hanches et sa bouche toujours dans mon cou qui y dépose de tendres baisers.

- Tout va bien, Albane ?

- Oui, ça va… Je… Je suis désolée, beaucoup d’émotions aujourd’hui. Ça va passer…

- Tu sais que tu peux tout me dire ? Je suis là pour toi, comme tu l’as été pour moi quand j’étais au bord du gouffre. Si tu veux, une fois les enfants couchés, tu pourras me dire pourquoi tu es dans un tel état aujourd’hui. Je ne pense pas que la robe soit aussi horrible que ça, quand même ?

Mes sanglots reprennent en l’entendant prononcer ces paroles. Personne n’est là pour moi depuis bien trop longtemps, et j’aimerais tellement me confier, mais c’est trop douloureux, trop honteux pour pouvoir en parler. Finie l’éduc confiante et avenante sur laquelle on peut compter, s’il sait à quel point je suis faible et influençable, moi-même tellement peu sûre de moi et en phase de reconstruction.

- J’adore cette robe, ne dis pas de bêtises, j’articule tout de même.

- Elle te va merveilleusement bien. Elle met en valeur tous les endroits que je rêve de caresser chaque nuit. Tes jolies jambes, tes formes tellement agréables à regarder et à toucher…

Sa voix est tendre, presque amoureuse ? Non, ce n’est pas possible qu’il s’agisse d’amour. C’est juste le désir d’un homme qui a une femme dans ses bras. Le désir d’un homme qui sait, qui sent que cette envie est partagée. En plus, il est incorrigible. Alors que ses enfants sont juste à côté, une de ses mains vient se poser sur ma cuisse et remonte gentiment, soulevant légèrement la robe pendant que l’autre s’est emparée d’un de mes seins. J’ai envie qu’il me l’enlève et me mette nue autant que j’ai envie qu’il me fasse un simple câlin, tendre et affectueux. Je ne sais plus où je suis ni ce que je veux vraiment. Je sais juste une chose, je suis bien, là, dans ses bras.

- Tu as bientôt fini ton service ?

Ah oui, mon service… Je ne suis pas chez moi, ici. Je suis chez un résident, dans le centre d’hébergement dans lequel je travaille. Un résident qui est en train de me peloter, de m’embrasser et crée des vagues de plaisir dans mes hormones en folie. Il faut que je me reprenne. Je le repousse donc un peu au moment où les enfants reviennent.

- Je… Je vais y aller, il se fait tard.

- Je ne disais pas ça pour que tu partes, Albane. Plutôt l’inverse… Reste encore un peu avec nous. On se fait un gros câlin, tous les quatre.

- Oh oui, Albane ! Tu verras, ça fait trop du bien ! rajoute Sophie en me tirant par la main.

- C’est gentil, murmuré-je en m’essuyant les yeux, mais c’est votre moment à vous…

- Papa dit toujours que les bons moments sont encore meilleurs quand on les partage ! Allez, viens, Albane !

- Je… D’accord, soupiré-je en voyant la bouille suppliante des deux petits monstres qui ont bien compris que je ne peux rien leur refuser.

Les deux enfants se saisissent de mes mains pendant que le bras de Julien me presse sur la hanche, m’entrainant inexorablement vers le lit où je me suis déjà allongée et où j’ai déjà joui dans les bras de celui qui est là, près de moi. Je m’effondre sur Sophie qui rit aux éclats en me recevant sur elle et m’installe sur le côté, alors que Gabin vient se glisser entre sa sœur et moi pour venir reposer sa tête contre ma poitrine. Je lève les yeux vers Julien qui est toujours debout. Il semble admirer mes fesses, mises en valeur par cette magnifique robe qu’ils m’ont offerte. Il prend la tablette de chocolat qui est sur la table, en coupe un carré qu’il vient déposer dans ma bouche avant de s’allonger face à moi, ses enfants nous séparant. Papa Ours glisse son bras au-dessus de ses oursons et vient poser sa main sur ma hanche en me souriant. Cet homme est diabolique. Des caresses, des câlins, du chocolat… Un corps de rêve. Comment résister à tout ça ?

- Papa ! J’en veux du chocolat ! murmure Gabin déjà à moitié endormi contre moi.

- Non, vous vous êtes lavé les dents. Ce sera pour demain, Poussin, répond-il d’une voix si douce que je rêve un jour de l’entendre me parler comme ça.

Il me rend folle. Folle de désir. Folle d’une envie de tendresse que je ressens comme un besoin vital. Et encore plus chamboulée quand il se met à chantonner doucement, de sa tendre voix, le refrain d’Elvis : “Love me, tender, love me now…”

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