Chapitre 5 fin

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 L’arrivée de Médée m’empêcha toutes répliques sarcastiques. Elle portait un pantalon s’arrêtant à mi mollet avec un débardeur sportif, des cheveux bruns coupés très court, les yeux noirs en amande.


  — Le vaisseau n’a subi aucune avarie majeure et nos réserves sont à présent à soixante-cinq pourcent, me renseigna-t-elle sans que je ne le lui demande.


 Elle me fixa, les bras croisés en silence, me signifiant sa désapprobation.


  — Toi aussi tu m’as manquée, lui rétorquai-je pour éviter ses reproches.

  — Mais il y en a combien des fantômes sur ce vaisseau !? s’exclama Gaël en regardant Médée.

  — Ce n’est pas un fantôme, soupirai-je.

  — C’est quand même bien imiter, railla-t-il.

  — Ce n’est pas un fantôme ! s’agaça Risha.

  — Si vous savez tous parler notre langue, vous pourriez faire l’effort de l’utiliser. Histoire qu’on comprenne un peu ce qu’il se passe ! la houspilla Claire.

  — Nous n’avons pas à vous impliquer puisque la conversation ne vous concerne pas, répliqua Akasha tentant de garder un ton aimable.

  — On s’est bien retrouvés ici, avec vous, sans rien avoir demandé. Alors oui ça nous concerne !

  — Ne vous disputez pas, on a pas le temps pour ça, arrêtai-je Akasha dans son élan. Claire, je te promets que les explications viendront, mais d’ici là j’aimerais que tout le monde reste tranquille et silencieux. Nous pouvons parler en français mais alors pas d’interruption.

  — Bon, ok, se résigna-t-elle bien que ses yeux lançaient des poignards vers Akasha.


Akasha se contenta d’un mouvement des paupières traduisant son accord.


  — Merci. Médée le satellite de l’alliance est dans quel état ?

  — Fonctionnel mais déconnecté. Pourquoi ?

  — Met au point un virus pour le manœuvrer discrètement, et qu’il le transmette à tous les autres dans la galaxie.

  — Quelle en est la finalité ? s’intrigua-t-elle.

  — Je veux pouvoir diffuser son et image sur n’importe quel poste branché. Quand je le souhaite, en diminuant les chances d’être coupée.

  — J’ignore l’idée que tu as derrière la tête, mais je dois pouvoir y arriver. J’aurais besoin des talents de Circé pour parachever.

  — Aucun problème.

  — Tu comptes diffuser quoi ? s’enquit Risha avec intérêt.

  — Je verrais en temps et heure. Qui peut m’éclairer sur la situation dans le reste de la galaxie ?

  — Tu n’as pas plus précis comme demande ? se moqua Risha.

  — Pour les Confrérie, Terrae…

  — C’est plus restreint, merci ! Terrae est sous embargo, la zone est censée avoir été exclue depuis que tu as pris le pouvoir afin de régner d’une main de fer.

  — Je m’étonne de m’être contentée d’une seule planète. Pourquoi pas le reste de la galaxie ?

  — Ah mais c’est bien le cas ! Malheureusement pour toi l’Alliance a réussi à te tenir en échec depuis sept siècles, grimaça-t-elle en un mélange feint de reproche et compassion.

  — Je me sens profondément insultée dans mes compétences.

  — Tu nous en vois désolées, compatit Akasha, mais si cela peut te consoler tu éradiques tous les imprudents qui osent tenter d’approcher ton système.

  — Ça compense un peu, minaudai-je.

  — C’est quoi ces conneries ? Steph ne règne sur rien du tout ! s’esclaffa Gaël hilare.

  — Merci, on est au courant, s’amusa Akasha. En revanche la persécution que les autres Confréries subissent est bien réelle. Et ce afin d’éviter qu’on ne tourne comme toi. Tous ceux qui présentent des pouvoirs apparentés aux nôtres ont droit à une éducation stricte, loin de chez eux censée les « apaiser ».

  — Et ça fonctionne ?

  — Pas le moins du monde, continua Akasha. Aucune éducation musclée ne peut rivaliser avec la mémoire d’âme. Nous jouons au chat et à la souris et de temps en temps nous rendons leur liberté à ces pauvres petits, avant qu’ils ne finissent totalement reprogrammés.

  — Et vis-à-vis de l’ensemble de la population ?

  — Chaque fois qu’un imbécile se sert de magie pour un acte criminel nous sommes presque systématiquement accusés. Nous remplissons toujours nos missions, de fait tous ne sont pas dupes. Nos souverains ou gouverneurs nous ont majoritairement reniés, fini Risha.

  — Les Sanctuaires ?

  — Officiellement ils suivent l’Alliance, officieusement ils nous soutiennent.

  — C’est déjà ça, admis-je.

  — Ce n’est pas vrai ! s’emporta Mia au bord des larmes. L’Alliance ne ment pas à tout le monde depuis des siècles ! Ils n’endoctrinent personne… acheva-t-elle la voix tremblante.

  — Eh bien interroge ces gens et vois par toi-même, lui lança Akasha acide.

  — On ne peut pas mentir à tout le monde… bredouilla-t-elle.


Visiblement plus pour se convaincre elle-même que nous autre.


  — Pas à tous, à la majeure partie. C’est plutôt simple quand on a qu’un seul son de cloche, justifia Risha.

  — Je ne suis pas endoctrinée !

  — Et c’est toi qui ose dire ça ! Que savais-tu de moi qui ne venait pas de Martin ou l’Alliance ? Rien. Pourtant tu es bien venu pour me tuer.

  — Pfff. Quelle blague ! Vu le massacre auquel j’ai assisté en bas, vous ressemblez à ce que l’on ma appris, cria Mia.

  — Ils ont eu le choix, c’est de leur propre volonté qu’ils se sont sacrifiés.

  — Si ça suffit à ta conscience, cracha-t-elle.

  — Absolument. D’ailleurs je crois que du repos t‘aiderait à réfléchir. Calypso va te conduire à une cabine, on viendra te réveiller. Inutile que tu ères dans les couloirs.

  — Je suis donc prisonnière…

  — J’ai dit cabine, pas cellule.


 Ma remarque glaciale la fit taire. Constatant son isolement, elle partit s’assoir dans un coin, nous observant avec une moue haineuse. Elle fut téléportée à cet instant, avant une autre réplique. La double porte s’ouvrit laissant passer Styx et les deux autres garçons derrière lui.


  — Nous sommes totalement opérationnels, lança Styx satisfait. Svei et Mérick ont fait une petite course bien utile.


Au moins maintenant j’avais leurs prénoms, ne me restait plus qu’à correctement les associer.


  — Merci pour la lumière, plaisanta Risha.

  — Que faisons-nous à présent ? demanda le jeune garçon. On pourrait faire circuler la confirmation de la bonne nouvelle du retour de Sahiane.

  — Mérick on a sans doute plus pressé tu ne crois pas, répliqua Risha en désignant Mia.

  — Comme quoi ? demanda-t-il en me regardant ne comprenant pas.

  — Circé ? appelai-je à l’aide.

  — Oui ? me répondit ma troisième amie évanescente en se manifestant devant moi.

  — Pourrais-tu me concocter un gaz paralysant très efficace, rapidement.

  — Pour combien de personnes ?

  — Pas la moindre idée, disons le double du personnel du vaisseau qui s’est enfui en vous voyant. Calypso tu as la main sur les médias que je t’ai demandé. ?

  — C’est fait, m’indiqua-t-elle en souriant, les systèmes étaient bien moins élaborés que je ne le pensais.

  — Dans ce cas fais une évaluation de la situation de la planète, tous les paramètres habituels. Affiche les données comparatives avec les relevés d’il y a sept siècles. Quant à vous, tachez de vous mettre d’accord sur les problèmes à régler en priorité, indiquai-je à mes confrères en les désignant.

  — Quels problèmes ? demanda Mérick haussant les sourcils.

  — Oh, je ne voudrais pas vous gâcher la surprise. D’ailleurs où sont Alianoï et Lilian ?

  — Elles font le ménage, me répondit promptement Calypso.

  — Parfait.

  — Où vas-tu ? s’enquit Styx perplexe de mon voir prendre la direction de la porte.

  — Prendre une douche ! Je ne supporte plus mon odeur.

  — Bonne idée ! J’te conseille même de brûler ce que t’as sur le dos, ajouta le pirate que je devrais nommer Svei.


 Je fis de mon mieux pour marcher aussi normalement que possible, me retenant de grimacer de douleur. J’attendis d’avoir franchi le seuil de ma cabine pour m’autoriser à gémir.

Rien n’avait bougé.

 Le temps ne semblait pas avoir eu de prise ici. À moins que Médée ne se soit chargée du ménage, pas un grain de poussière ne blanchissait un meuble. Si ce n’était les reliquats décharnés d’un arbuste mort dans son pot, j’aurais pu croire l’avoir quitté au matin.

 Les émotions qui m’assaillaient se combattaient. Nostalgie, tristesse, joie, frustration, colère, peur. De quoi me faire minimiser la douleur physique. Maintenant que l’adrénaline du combat diminuait c’est à peine si je pouvais bouger mon bras gauche.

 Respirer tirait sur une ou deux côtes, sans doute fêlées qui me faisaient un mal de chien. Pareil pour des entailles un peu partout sur mon corps. Je retirai mon épée et la posai sur la table avant de passer l’arche sur ma droite pour entrer dans l’alcôve sanitaire.


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