Chapitre 4 : Les deux voyageurs

7 minutes de lecture

Sur les sentiers battus par la pluie, deux voyageurs marchaient, rabattue sur leur visage une capuche clairs, les protégeant du soleil déjà haut dans le ciel. Cela faisait déjà plusieurs heures qu’ils avançaient, et aucun d’eux n’avaient prononcé un mot, se contentant de la présence de l’autre. Parfois, leur main se rejoignaient, d’autres fois l’un derrière l’autre tel deux ombres qui se suivant, seules, au beau milieu de la forêt.

Les bois de Sherster furent connus pour leur étendu – de plusieurs kilomètres – et la densité de ses feuillages, donnant parfois l’impression d’une nuit obscure aux reflets verdâtres - alors que la journée n’avait commencé que depuis à peine quelques heures. Cette forêt, véritable labyrinthe était pour certain une promenade de santé… D’après des rumeurs – dont nul ne savait qui les eut lancées, ni qui les eurent créés ou même si elles furent tout simplement réelles – qui furent racontées sur ce lieu, comme la présence de fantômes : les spectres de personnes dévorées par les monstres, hantant encore les bois dans l’espoir de pouvoir se venger. Se venger des monstres ? ou des humains qui les y auraient envoyé ? Chose courante à l’époque – maintenant interdit, grâce à l’invention de moyens beaucoup plus… amusants, se résumant à jeter les condamnés à mort dans ses dangereuses entrailles, puis de lâcher des chiens enragés. La plupart du temps on ne retrouvait pas les corps… sûrement dévorés par les monstres. Et certaines nuits – notamment celles de pleine lune – les paysans du voisinage dirent entendre les cris de douleur et d’agonie des condamnés envoyés ! Mais cela n’est qu’une rumeur… servirait-elle à éloigner les curieux ? à moins que ça ne soit pour faire peur aux enfants ? …

Pourtant, aucun de nos deux protagonistes ne semblèrent s’en formaliser, plus occupés à manger un lapin chassé plus tôt.

- Sinon Alffa – entama Joker entre deux bouchées à sa compagne – tu en penses quoi de tout ça ?

- De quoi ?

- La mission.

- Ça va ? Tu es bizarre en ce moment. Qu’est-ce qu’elle a cette mission ?

- Rien, grommela plus que ne répondu le blond.

- Joker, maintenant tu vas me dire sérieusement le problème ! lui exigea Alffapa tout en le menaçant d’un os blanc.

- Mais rien j’te dit.

- C’est encore un de tes rêves ?

- Ouais, un truc comme ça.

- Tu sais, si tu ne me dis pas en quoi ils concernent je ne pourrais pas t’aider.

- Je te le dirais si moi-même je le savais, tu sais bien que je ne peux rien te cacher mon cœur.

- Je sais, je sais… Mais quand même-

- Ne t’inquiète pas, ce n’est sûrement rien.

La blonde le fixa du regard, le sondant entièrement pour savoir si oui ou non elle devrait croire ses paroles si souvent dites. Après minces réflexions, elle vint à la même conclusion que Joker et ne s’en formalisa donc plus.

Un léger son strident vint les avertir : le signal. Alffapa se leva précipitamment et couru vers les profondeurs des bois pendant que Joker rangeait le campement, effaçant toutes traces de leur présence. Jamais on ne pourrait deviner que quelqu’un était resté ici plusieurs jours, ni deviner un simple passage.

Alffapa courait, courait, aussi vite qu’elle le pouvait pour essayer – non – rattraper ceux qu’ils cherchaient depuis des jours. Et maintenant qu’elle les avait dans sa ligne de mire, interdiction de les laisser filer ! Sinon le plan tombait à l’eau, et il leur faudrait à nouveau des mois de préparation : choses que voulait à tout prix éviter la blonde !

Une sorte de ronflement grave la déconcentra, et-

*

Cassandra et Lynmia prenaient une pause bien méritée. La princesse n’en pouvait plus de marcher, n’ayant pas l’habitude de faire autant de kilomètres en si peu de temps.

- Lym, j’en ai marre !

- Tu n’arrêtes pas de le répéter, je crois l’avoir compris.

- Pff ! Quand est-ce qu’on arrive au royaume de Cœur ?

- On y est déjà, la forêt de Sherster en est la frontière avec le royaume de Pique, mais elle est aussi une des plus grandes du continent. On doit en avoir fait un peu près de la moitié.

- SEULEMENT LA MOITIE ?! P’tain !

La princesse semblait choquer, cela faisait des jours qu’elles marchaient et ils leur restaient encore quasiment la même distance ! Elle eut l’impression de n’avoir fait du surplace. Il fallait quand même la comprendre, il était si simple de se perdre dans ces bois aux allures de labyrinthe, aussi tordu que celui de Dédale, si ce n’est plus…

Un bruit – ou plutôt un cri – attira leur attention vers le chemin qu’elle venait de prendre. Lynmia se leva précipitamment et prit en main sa faux de métal, intimant à Cassandra de se mettre derrière elle, à l’abris du potentiel ennemi. Toutes les deux, face à la profondeur des arbres, à l’affut. Une silhouette vaguement humaine s’approcha d’elles… Bizarre, on aurait dit qu’elle courait ?

Une fille aux cheveux blonds – contrastant avec la noirceur que les ombres du feuillage pouvaient crée – apparut soudainement, agitant les bras de façon étrange.

« On dirait une poule » pensa Cassandra à cette vue.

- Courez ! Courez bande d’idiotes !!!! cria la blonde à leur intention.

En effet, derrière elle, un monstre de facilement deux mètres de haut, une large gueule ouverte montrant des crocs énormes lui courait après. Lynmia n’attendit pas que la nouvelle venue se fasse manger – ou dévoré serait un terme plus exact – et attaqua la bête.

Par chance, il était faible et si obnubilé par sa future proie qu’il en oublia Lynmia, qui profita de ce moment d’inattention pour lui porter un coup fatal, ce que l’on pourrait résumer à : décapitation. Cette méthode – quoiqu’extrêmement violente – fut la seule presque efficace contre tous types de créatures, technique qui devint rapidement la favorite de notre apprentie.

La blonde eu à peine le temps de se jeter à terre avant de se prendre la tête de la – malheureuse ? – bête qui avait eu la malchance de tomber sur la brune. Le sang violacé gicla, arrosant presque les deux jeunes filles sous les yeux effarés de la princesse. Celle-ci, même si elle avait déjà vu des monstres être tué, était toujours choqué et répugné par… tout. Le sang, le corps qui tombait brutalement au sol, laissant une tâche violette se répandre, la tête qui roule au sol, et par-dessus tout, l’horrible odeur métallique qui se propageait ensuite dans l’air ! Alors dans un rapide mouvement empli de courage, Cassandra plongea son nez dans la manche de sa robe, échappant de justesse aux effluves sanguinolentes.

Quant aux deux autres filles, elles se regardèrent longuement, avant que Lynmia ne propose à celle au sol de se relever lui tendant sa main, qu’elle accepta. Maintenant face à face, l’apprentie pu se rendre compte à quel point la personne en face d’elle était petite – en même temps quand tu faisais un mètre soixante-quinze, c’était facile de trouver les autres petits ! – et d’un sourire qui se voulait réconfortant lui demanda :

- Ça va ? Tu n’es pas blessé ?

- Non – la blonde avait une voix assez douce avec un petit accent sur-lequel Lynmia ne pouvait mettre un pays – Merci de m’avoir sauvé ! Sans toi j’aurais été obligé de courir encore longtemps !

- De rien, mais qu’as-tu fait pour qu’il te course ainsi, questionna-t-elle tout en montrant le cadavre au sol d’un coup de tête.

- Oh, juste un malheureux malentendu. Il se trouve que je me suis disputé avec mon copain, et dans un élan de colère j’ai donné un coup de pied dans une pierre, pierre, qui a par hasard frappé ce monstre dans le dos. Tu te doutes bien qu’il n’a pas apprécié.

- Mais… mais tu ne vas pas me dire que tu ne l’as pas vu ?! Ce monstre est aussi visible qu’une pierre au milieu de bijoux !

- Il se trouve que si, elle ne réfléchit pas tout le temps. Une vraie tête brûlée ! dit une voix inconnue.

Les filles se retournèrent vers la provenance de la voix : un homme – pas plus de vingt ans – était appuyé contre un arbre, une sorte de sabre long dans la main. Ses cheveux lui aussi blonds étaient complètement décoiffé, et son visage légèrement rougi montrait qu’il avait couru. Est-ce la personne dont l’inconnue parlait ? D’ailleurs seule celle-ci ne semblait pas surprise, juste un air soulagé qui se dessinait lentement sur son visage.

- Joker ! s’écria presque-t-elle. Tu m’as suivi ?

- Nan ?! J’ai juste suivi une voix criarde, je ne savais point que c’était toi, lui répondit la personne nommé Joker, un air sarcastique dans la voix.

- C’est ça, moque-toi de moi !

- Je ne me moque pas de toi.

- Dis plutôt que tu ne veux pas dire que tu t’inquiétais pour moi !

- Pff – le jeune homme roula des yeux, les levants en l’air, comme si ce que sa copine (?) lui disait était n’importe quoi – Si je m’inquiétais, je ne serais pas venu comme ça. Et puis, même sans arme tu pourras tuer un monstre, dit-il tout en lui envoyant le sabre.

La blonde le rattrapa habillement, et l’attacha à sa ceinture, un mélange bizarre de cuir, ruban et d’un autre matériau qui était inconnu aux deux autres. Lynmia, curieuse de savoir qui étaient les personnes devant elles demanda :

- Excusez-moi de déranger ces joyeuses retrouvailles, mais puis-je savoir qui vous êtes ?

- Je me présente, Alffapa – commença la blonde, puis en désignant Joker – voici Joker comme vous avez pu le deviner, mon petit copain et aussi compagnon de voyage.

- Nous sommes de simples voyageurs, qui parcourent le monde à la recherche de nouvelles culture, complèta Joker.

- Des voyageurs ? Et, simple curiosité, où est-ce que vous allez ?

- Au royaume de Cœur, répondit Alffapa.

- Oh ! Nous aussi ! T’as vu Lynmia ils vont au même endroit que nous !!!

- Oui… Sinon, je m’appelle Lynmia et voici Cassandra, nous sommes aussi des voyageuses.

- Quand même quel hasard que nous allions au même endroit ! Un tel hasard est… vraiment hasardeux, dit Joker en lançant un regard en biais à Alffapa.

Un léger soupçon sur la véracité des propos passa dans le regard bleu de la brune, avant de rapidement s’effacer. Ces deux-là cachaient quelque chose, mais pour l’instant ils n’avaient aucun geste étrange ni déplacé envers elles. Quand même qu’est-ce qu’ils pouvaient bien cacher ?

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Loreillei ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0