28. Trouver la source.

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Daphnée erra, hébétée, pendant près d’une heure dans les rues de la ville puis se ressaisit.

Plantée devant la vitrine d’un magasin, elle observa son reflet et s’évalua sévèrement ; elle avait l’impression de ne ressembler à rien, aucune prestance, une pure potiche, comme Matthieu le lui avait si souvent répété durant les trois années de leur mariage.

Elle n’avait certes pas l’allure de certaines de ses amies, comme Caroline par exemple, une superbe brune toujours bien habillée et super à l’aise avec son corps, chose qu’elle avait toujours enviée chez cette dernière.

Daphnée remonta dans ses souvenirs, durant la période des fêtes de fin de l’année, lorsqu’ils s’étaient tous retrouvé, Olivier avait aussi dragué Caroline … Mais, il l’avait choisie, elle, et pas Caroline … Il lui avait expliqué qu’avec cette dernière cela avait été « un plan d’un soir » parce qu’il se sentait seul et qu’il n’était pas encore avec elle.

Daphnée avança comme un automate dans la rue commerçante puis s’assit sur le bord d’un banc public en songeant au fait qu’elle aimait Olivier depuis toujours. Tous ses souvenirs des années du lycée ne tournaient qu’autour de lui, qui était le véritable bourreau des cœurs de la classe. Elle savait bien qu’il n’avait jamais été très sérieux. Mais, là, il avait changé, il voulait fonder une famille et l’avait choisie, elle, pour ce projet merveilleux. Le discours de Marine ne pouvait pas être vrai, Olivier lui avait dit qu’il l’aimait, il n’aurait pas pu lui cacher de telles choses !

Elle se redressa, respira profondément et prit une décision :

Je ne vais pas me laisser faire, j’ai eu ma dose avec Matthieu ! D’abord, vérifier les choses !

En utilisant les indices qu’elle avait sur cette dernière et après quelques recherches sur internet, elle réussit à obtenir le numéro de téléphone professionnel d’Adèle.

Le jour-même, elle l’appela.

— Service des ressources humaines, Adèle Delavalée, bonjour.

— Bonjour, je suis Daphnée Vermeux, vous ne me connaissez pas, mais j’aimerais pouvoir vous poser des questions euh… Personnelles.

— Pardon ?

— Excusez-moi, je suis idiote, je dois vous poser le contexte, je suis la compagne d’Olivier Fleuroux.

— Ah…

Silence des deux côtés… Adèle reprit, sur un ton à la fois las et saupoudré de fine colère,

— Et ? Que voulez-vous savoir ?

— Est-ce que… Est-ce que vous avez perdu votre bébé à cause de lui ?

Daphnée entendit Adèle étouffer un petit cri, puis cette dernière lui répondit sur un ton qui masquait à peine sa colère,

— Oui ! Par sa faute et celle de sa maîtresse, qui lui avait refilé une saleté, oui, c’est à cause de ça que j’ai perdu mon bébé !

Un nouveau silence suivit, Adèle demanda, vivement,

— Pourquoi voulez-vous savoir ? Il vous a, à vous aussi, promis monts et merveilles si vous tombiez enceinte ? Ou alors vous avez aussi découvert une maîtresse avec qui il comptait faire des bébés au cas où vous n’y arriviez pas ? Il a fait quoi cette fois-ci ?

— Je… Je porte son enfant

Daphnée entendit Adèle souffler puis respirer profondément avant de l’entendre lui dire, sur un ton plus calme,

— Je suis désolée, je me suis emportée. Félicitations à vous deux.

Comme elle n’entendait plus Daphnée à l’autre bout du téléphone, Adèle demanda,

— Mais, pourquoi voulez-vous savoir pour ma grossesse ? Je ne comprends pas trop.

Masquant difficilement un sanglot, Daphnée lui expliqua,

— Olivier m’a menti à propos de votre rupture, dans sa version, il était blanc comme neige, il se posait en victime…

Adèle l’entendit se moucher puis reprendre,

— Désolée. En fait, récemment, j’ai fait la connaissance de Marine…

— Oh, vous avez rencontré le ventre fertile truffé de chlamydia !

Adèle se rendit compte du ton caustique qu’elle avait eu et s’excusa rapidement.

— Pardonnez-moi, je vous ai coupée, je suis vraiment désolée, mais cette histoire m’a trop fait souffrir.

— C’est moi qui suis désolée de devoir vous faire remuer ces souvenirs. J’ai eu la version de Marine, je voulais avoir la vôtre, pour être sure.

Adèle sentait une colère sourde grandir en elle, elle tenta de la dissiper en respirant profondément et visa à abréger cette communication téléphonique qu’elle jugeait inopportune. Elle se décida donc de trancher dans le vif ;

— Que voulez-vous savoir ?

— La rupture, c’était vous ou lui ?

— Moi. Je l’ai mis à la porte lorsqu’il m’a dit qu’il me trompait depuis six mois en vue d’avoir un enfant avec une autre.

— Mais, vous étiez enceinte, non ?

— Oui mais, il ne le savait pas encore ; je comptais le lui annoncer le jour où je l’ai mis à la porte.

— Oh. Et, est-ce qu’il a pris de vos nouvelles, par la suite, quand il a su que vous étiez enceinte ?

— Il a voulu savoir la date de l’accouchement, mais après la fausse-couche, je n’ai plus eu une seule nouvelle de lui. Rien. Je pense que, tout simplement, il a dû passer à autre chose.

Adèle entendit Daphnée soupirer bruyamment avant de répondre,

— Moi, en l’occurrence… Mais, pourquoi ? Pourquoi est-il comme cela ?

Ne voulant pas entrer dans ce genre de discussion, là, par téléphone, avec une parfaite inconnue, Adèle tenta de s’échapper de la situation en l’orientant vers Charles et Marie.

— Je vous conseille d’aller en parler avec ses parents, ils sont au courant de ses frasques.

— Je devrais leur parler, c’est vrai.

Adèle soupira,

— Je suis désolée, mais je vais devoir clore cette conversation, je suis à mon travail.

— Oh, désolée, oui, je vais vous laisser. J’espère ne pas avoir remué trop de mauvais souvenirs avec mes questions.

— Ne vous inquiétez pas, pour être passée par ses mensonges, je comprends que vous teniez à mettre les choses à plat avec Olivier. Je vous souhaite d’arriver à trouver un point d’entente avant l’arrivée du bébé. C’est pour quand ?

— Septembre. Merci de votre sollicitude. Je vais vous laisser à votre travail. Merci d’avoir répondu à mes questions.

Daphnée raccrocha, Adèle prit quelques minutes pour se remettre de ce contact téléphonique puis se tourna vers la perspective de la soirée qu’elle avait prévue avec Bertrand. Elle avait retrouvé l’amour dans ses bras et elle avait une totale confiance en lui. Bertrand, lui, ne la trahirait pas.

De son côté Daphnée était écroulée ; elle n’arrivait pas à se lever du petit fauteuil dans lequel elle s’était installé pour appeler Adèle.

Elle répéta, tout bas,

— Pourquoi m’as-tu menti ? Pourquoi ?

***

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