Dans le transept de l'immense basilique de Saint-Nicolas-de-Port, pour la fête de la Saint-Nicolas, eut lieu une exposition temporaire sur la Saint-Nicolas.

Je ne sais pas pourquoi un tableau, anonyme et daté XVII siècle, m'obsédait.

J'étais là, debout, grelottant de froid malgré mes couches de vêtements et, j'aurais du bouger pour me réchauffer, mais je ne pouvais pas.

Le tableau représentait une famille dans la pièce à vivre de leur ferme des Hautes Vosges, tous stoppés dans leurs mouvements. Assise devant la fenêtre, la mère s'apprêtait à allaiter son nouveau-né et le père revenait du cellier avec ses deux fils et les bras chargés de petit bois pour le feu. La fille et grand-père, eux, s'y dirigeaient et grand-mère plumait une oie au coin du feu.

Un souffle froid me fit frissonner.

Je m'aperçut alors que des étiquettes s'étaient collées sous le visage de chacun. Ils se nommaient respectivement Ruth, Louis, Bertrand, Artur, Tom et Claire. Les deux grands-parents s'appelaient Thomas et Isabel.

La folie devait me gagner, car je sentis la chaleur de la cheminée me réchauffer, et je vis la neige tomber doucement, à travers la fenêtre sur le tableau.

Je sursauta quand Isabel me lança un regard plein de douceur.

Le tableau s'anima alors...

Claire et Thomas claquèrent la porte du cellier tandis qu'Artur s'avança vers le côté de la cheminée pour y déposer le petit bois. Ruth déposa son nourrisson dans un berceau, à ses pieds, et demanda à son mari d'aller atteler la charrette pour chercher le colporteur, avant que la neige n'accroche au sol.

Il acquiesça, l'embrassa, et sortit avec ses fils.

La porte de l'extérieur se ferma et celle du cellier s'ouvrit ; Claire et Thomas en sortirent avec du lait, du fromage et des pots de fruits à la liqueur.

Cela sentait la fête de la Saint Nicolas !

Ruth observa la charrette s'éloigner et Claire demanda où ils s'en allaient. Grand-mère lui répondit qu'ils partaient aider le colporteur, et elle lâcha son panier de joie. Le colporteur ne venait qu'une journée par saison avec une hotte débordant d'objets en tous genres selon la demande. Il permettait aussi aux demeures isolées d'être au courant de ce qui se passait dans le pays.

Le vent souffla dans les branches des sapins et y délogea les corbeaux.

Isabel se mit à rôtir l'oie, laissant se dégager une délicieuse odeur. Claire décida de jouer avec le chat et sa mère reprit Louis, qui hurlait, dans ses bras.

Thomas et Isabel se mirent à la confection de petits pains.

Je n'étais pas folle, mais, pourtant, je continuais de voir la neige descendre du ciel, et former un duvet blanc sur le sol. Pourtant, j'entendais le chat ronronner sur les genoux de Claire, et je sentais le souffle du bébé endormis.

Je vis alors Ruth se lever et je plissa avec elle les yeux pour apercevoir une tache de lumière au loin.

Elle lumière grossis, grossis, et deviens une charrette tirée par un cheval au trot, et transportant quatre silhouettes encapuchonnées. Je devina l'un deux comme étant le colporteur, et il en descendit maladroitement, puis pressa le pas vers la porte, sa cape claquant au vent.

Soudain je ne vis plus le tableau depuis la cheminée mais devant la porte ouverte.

J'étais devenue colporteur !

Isabel me dit d'entrer. Tout cela était terrifiant, mais je n'étais pas maitre de mes mouvements. Claire sautilla vers moi et me pris par la main. Je tira alors un pain d'épices de ma hotte et le lui donna, puis présenta deux tissus à Ruth et Isabel, qui me promirent de m'en prendre un avant que je ne reparte demain.

Mais moi je voulais repartir tout de suite !

Artur plaça un tabouret devant la cheminée et la famille y fit cercle autour. Je m'y assis et, après avoir donnée des nouvelles du pays, et voyant les enfants s'ennuyer, je me lança dans le récit de la légende de Saint Nicolas...