Partie 1.2

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— Vous…

Il rit.

— Je.

Je le regarde, méfiante.

— Allons, ne soyez pas si nerveuse. Je n’en ai pas après votre sang, bien qu’il me soit dû, au même titre que celui de tous les autres Ouvriers.

Je ne défronce pas les sourcils. Son regard se fait malicieux.

— Je suis un Directeur distingué.

Je laisse cette fois échapper un rire cynique.

— Bah voyons, un Directeur. Vous êtes certainement l’aîné de la fratrie ?

Il hoche la tête.

— Effectivement. Mais vous savez comme moi que ce n’est pas obligatoire. Les enfants peuvent choisir leur catégorie de travail à leurs 18 ans. Il n’est pas si rare qu’un aîné ne veuille pas des responsabilités de Directeur, et choisisse plutôt le métier d’Employé.

— Mais vous avez décidé d’être Directeur, avec son lot de vampirisme.

— En effet.

Je le défie du regard. Il se contente de me regarder, une lueur d’amusement dans le regard.

— Je ne veux pas imposer à mes enfants de choisir. Il n’y a pas si longtemps, chacun pouvait choisir son métier comme il l’entendait, lui fais-je remarquer.

— Mais lorsque vous veniez d’une famille pauvre, il y avait peu de chance que vous réussissiez votre vie. A moins d’un coup du destin. Il n’y avait aucune égalité des chances. Aujourd’hui, chaque famille a un Directeur, un Employé et un Ouvrier. Ce ne sont plus uniquement les riches qui accèdent aux postes les plus hauts placés.

Je joue un instant avec les glaçons qui sont en train de fondre sur les feuilles de menthe de mon verre. Je sors machinalement ma carte d’Emploi. De la même taille qu’une carte de crédit, elle rentre parfaitement dans un portefeuille. Sa couleur noire réfléchit les faibles lumières du bar. C’est cette carte qui authentifie mon appartenance à la caste des Ouvriers, avec son grand O blanc qui prend toute la place, derrière mes données d’identification. C’est cette carte qui a conditionné toute ma vie professionnelle, dès mes 18 ans. Cette carte qui m’a réduite à choisir dans la liste des emplois d’Ouvrier…

— Quelle idée d’avoir supprimé une trop grande partie de la population mondiale. Il faut repeupler, maintenant. Obliger les femmes à avoir trois enfants.

Je joue encore quelques instants avec ma carte avant de la ranger, sous l’œil scrutateur de mon interlocuteur.

— Ma très chère Solène, si les gouvernements ne s’étaient pas mis d’accord pour supprimer une partie de la population, nous n’aurions plus aucune ressource à l’heure qu’il est.

— Et quel besoin avaient-ils de créer un sérum pour transformer les gens en vampire ? je m’énerve, sans vraiment l’écouter.

— Allons, ne vous fâchez pas. Ce sont les premières recherches qui ont abouties. Vous n’êtes pas sans savoir qu’ils cherchaient avant tout à régler le problème de la famine. Avec des vampires, le problème ne se pose plus. Nous nous nourrissons de sang.

Je lui adresse un regard noir.

— Heureusement qu’ils n’ont pas décidé de transformer tout le monde en vampire.

— La population ne se renouvellerait plus. Un vampire ne peut malheureusement pas se reproduire.

— Je sais tout ça. Mon grand-frère me l’a bien assez répété. Diriger un hôpital ne lui suffit plus, monsieur le vampire aurait souhaité avoir des enfants.

— Je dois dire que cela me manque également.

Je repose violemment mon verre.

— Eh bien pas moi. Je n’en veux pas. Le ministère peut me menacer autant qu’il le souhaite, je n’aurai pas d’enfant.

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