Le rêve

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Son enfant intérieur était encore vivant. Il ne l'avait pas complètement éteint. Elle le voyait. Ou plutôt elle le savait, elle le sentait. Elle sentait sa curiosité à peine perceptible quand elle l'observait, même s'il ne tournait pas les yeux vers elle, marchant lentement vers sa prison de grisaille, ou tentant de s'endormir dans le froid. Elle avait une idée pour le sortir de sa condition malheureuse mais, pour que son grand-père ne soit pas au courant, elle allait devoir piocher dans sa petite réserve personnelle.

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Le repas qu'on lui avait distribué aujourd'hui était toujours aussi mauvais, mais il avait au moins le mérite d'exister. En tant qu'enfant, son salaire ne comprenait ni argent, ni rêve, mais au moins, il était nourri suffisemment pour ne pas mourir de faim. Et désormais il n'était plus seul. Il trouvait la force de tenir, jour après jour, dans cette présence qui le suivait partout. Même pendant qu'il travaillait, elle restait aux fenêtres, si discrète qu'il ne la voyait que parce qu'il la savait postée là, encore et toujours occupée à l'observer. Aussi le choc de son absence, au moment où il sortit ce jour-là, fut très douloureux pour lui. Elle avait disparu. Sans vraiment savoir pourquoi, cela lui donna envie de pleurer. Sa gorge et son ventre se serrèrent et cette douleur vint s'ajouter à celle de sa faim, toujours présente en arrière-plan. Il serra fort la grande et chaude couverture qu'elle lui avait donnée.

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Voilà ! Elle l'avait fait ! Elle espérait qu'il n'avait pas trop remarqué son absence... Et s'il s'était inquiété... Et s'il avait été triste... ou en colère... Elle avait fait du plus vite qu'elle avait pu mais il s'était sûrement acoutumé à sa présence... Toutes ces pensées la rendaient vraiment soucieuse et elle se dépêcha, en décidant que cela en valait malgré tout la peine : bientôt, il quitterait cette vie sombre et fade !

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Lorsqu'il la vit, postée comme à son habitude, sur le toit faisant face à la fenêtre du beffroi, il se sentit rassuré. Elle ne l'avait pas abandonné. Il ne se demanda pas si il avait imaginé son absence puisqu'il ignorait jusqu'à sa capacité d'imaginer. Une preuve que la Firme avait presque terminé son obscur travail sur son être. Cette nuit-là, il bougea dans son sommeil et le lendemain, il avait l'air absent, ailleurs, ses lèvres le démangeaient et il les étira dans un sourire.

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