Chapitre 21 : La sortie

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— Je suis désolé pour Bruce…

— C’était… mon meilleur ami…

Sans le vouloir, les larmes de Tomy formèrent une auréole humide sur la manche du pull rose clair d’Erin. Il resta blotti contre elle plusieurs minutes tant il était partagé entre la tristesse de la disparition de Bruce et la joie de la retrouver.

— Il faut qu’on y aille, Tomy, il ne nous reste pas beaucoup de temps.

Il releva la tête vers elle en reniflant, puis s’essuya les joues du revers de son sweat-shirt.

— Aller où ?

— Chez nous.

Face à cette bonne nouvelle, Tomy lui sourit et l’enlaça à nouveau.

— Je t’aime, Erin…

Surprise, la jeune fille s’écarta et le regarda avec une expression confuse.

— Tomy, je…

— Tu comprends pas ; je t’aime de tout mon cœur, comme les grandes personnes, depuis le premier jour !

Erin esquissa un sourire tandis que le rouge lui montait aux joues.

— Je t’aime aussi de tout mon cœur, Tomy !

Il se pencha vers elle et lui fit une affectueuse bise sur le front. Lorsqu’il recula, elle prit délicatement son visage dans ses mains et, tout en noyant son regard dans le sien, l’attira vers ses lèvres pour y déposer un baiser. Une étrange sensation parcourut alors Tomy, une énergie subite qui traversa son corps de bas en haut, le plongeant dans un état de plénitude irréel.

Lorsqu’il rouvrit les yeux, sa bouche était toujours tendue en avant tandis qu’Erin se tenait debout, face à lui, dans les herbes hautes, une moue malicieuse sur le visage.

— Euh… je suis resté longtemps comme ça ?

— Pas plus de deux minutes, je te le promets ! gloussa-t-elle.

— Désolé… s’excusa Tomy en se grattant la tête.

— T’inquiète pas. Il faut qu’on y aille !

Elle l’attrapa par le bras et l’aida à se relever puis, sans lui laisser le temps de reprendre ses esprits, se mit en route d’un pas rapide.

— Attends-moi ! lança Tomy en la rattrapant, on va où, alors ?

— Le pont de la rivière Elk. Le passage doit encore être ouvert, il faut qu’on se dépêche !

— De quel passage tu parles ?

— Celui pour rejoindre notre monde !

Tomy arrêta Erin en la retenant par le bras.

— Comment tu sais ça ? la questionna-t-il, dubitatif.

La jeune fille poussa un long soupir en levant les yeux au ciel.

— C’est pas la première fois que je viens ici…

Des millions de questions fusèrent alors dans le cerveau du garçon.

— Je comprends rien… comment tu as fait pour venir ici ?

— J’en sais rien, Tomy… je me rappelle juste que je suis déjà venue…

— Mary a dit que tu étais partie depuis deux heures, pourquoi tu es encore là ?

— J’ai fait demi-tour. J’ai eu une intuition en me souvenant des photos dans son entrée… tu ressembles tellement à son fils.

Un éclair, suivi d’un coup de tonnerre assourdissant, déchirèrent le silence. Le ciel s’obscurcit sans prévenir et la luminosité ambiante passa du rose au rouge en quelques secondes.

— On n'a plus beaucoup de temps ! Vite, Tomy ! le pressa Erin en s’élançant à grandes enjambées.

Tomy la suivit en évitant les branches et les buissons qui jonchaient le sol de la forêt lorsqu’une piste en galets apparut devant eux.

— C’est le sentier qui passe par les champs ! Dépêchons-nous !

Le vent soufflait avec tant de rage lorsqu'ils passèrent l'orée du bois, que les herbes hautes des prés en jachère se courbèrent, touchant presque le sol. D’énormes nuages sombres s’amassèrent dans le ciel parcouru d’éclairs éblouissant. Une pluie diluvienne s’abattit soudain sur les deux amis.

— On est plus très loin ! héla Erin en tirant avec force sur la main de Tomy.

Alors que le pont n’était plus qu’à quelques dizaines de mètres devant eux, une bourrasque les projeta au sol et les plaqua contre l’herbe humide. Une gigantesque vague se forma en amont de la rivière, dévalant inéluctablement vers le pont. Lorsqu'elle le percuta, celui-ci se brisa sous la force des eaux tumultueuses avant d’être totalement englouti.

Aussi brièvement qu’ils étaient apparus, la pluie et le vent cessèrent et une étrange atmosphère verte s'installa. Les nuages se dispersèrent et le calme revint avec une rapidité déconcertante.

— Oh non… le pont… sanglota Erin en scrutant l’horizon, on ne va jamais pouvoir repartir…

Une voix s’éleva soudain tout autour d'eux :

Le moment est venu, Erin

Les yeux de la jeune fille se remplirent de larmes tandis que les mots disparaissaient dans l’immensité. Tomy la dévisagea, le regard inquiet.

— Qu'y a-t-il, Erin ?

Comprenant qu’il n’avait pas entendu l’avertissement, elle essuya ses larmes et lui sourit.

— Rien, Tomy, on doit trouver une autre sortie.

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