Chapitre 17 : Sauve-qui-peut !

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Tomy fixait le bout de papier d’un air défait, les yeux perdus dans la tristesse qui l’avait envahie. Bruce s’approcha et posa sa patte sur son épaule.

— Tu crois que c’est un indice ?

— La seule Hopkins que je connais, c’est la vieille dame qui recueille les chats... mais attend ! Peut-être que mes parents sont chez elle ?

Les yeux de Tomy brillèrent d’une lueur d’espoir qui s’estompa aussi vite qu’elle était apparue.

— C’est de l’autre côté du lac, à la sortie de la ville… il nous faudrait des jours pour marcher jusque là-bas…

— On pourrait couper par le lac !

— Comment ça ?

— Avec la barque ! En ramant droit devant nous, on gagnerait du temps !

— Ça fait des années qu’on l’utilise plus… je sais pas si elle peut encore naviguer…

Tel un coup de tonnerre, l’horrible rugissement déchira à nouveau le silence. Cette fois, un bruit sourd de pas pachydermiques s’ensuivit, s’amplifiant à mesure que la créature approchait de la maison.

Tomy et Bruce échangèrent un regard inquiet, puis coururent vers la fenêtre la plus proche. Hormis le son de la monstrueuse démarche, impossible pour eux d’apercevoir la chose qui le produisait, tant la brume qui s’était levée avait envahi les alentours.

— Qu’est-ce que c’est ? murmura Bruce.

— Je ne sais pas… mais c’est gigantesque, répondit Tomy en plissant les yeux pour tenter de voir à travers le brouillard.

Soudain, une ombre colossale enveloppa la maison, comme si une éclipse solaire se produisait à l’extérieur. Un grognement guttural fit sursauter les deux amis qui, prit de panique, se réfugièrent sous la table de la cuisine. Un silence effrayant s’installa dans l’air alors que l’ombre se retirait peu à peu.

— Tu crois qu’elle est partie ? demanda Tomy d’une voix chevrotante.

Un autre grognement dans leurs dos vint percer l’inquiétante tranquillité. Figés par la terreur, les deux amis se retournèrent sans oser respirer. Un immense œil reptilien les observait à travers la fenêtre au-dessus de l’évier. L’animal dévoila une mâchoire titanesque, perlée de dents acérées, et laissa échapper un rugissement féroce qui fit trembler la maison toute entière. Horrifié, Tomy attrapa Bruce et se mit à courir en direction de l’entrée pour se réfugier à l’étage, mais ils n’eurent pas le temps de passer la porte de la cuisine que la maison s’ouvrit en deux, happée par la gueule béante de la créature.

Pour se protéger des débris qui volaient en tous sens dans un capharnaüm assourdissant, Tomy lâcha Bruce et plaça ses bras devant son visage en se recroquevillant sur lui-même. Lorsqu’il baissa les mains, le pauvre Bruce se débattait pour retirer une planche qui l’entravait, tandis que la bête poussait un nouveau rugissement. Sans hésiter face au danger, Tomy dégagea son ami et le tira de toutes ses forces.

— Ne le laisse pas me manger !

— Je fais de mon mieux !

L’animal lança sa tête en avant pour les happer, mais Tomy parvint in extremis à sortir Bruce des décombres, les faisant tomber à la renverse, emportés par l’élan.

— Vite ! La barque ! invectiva Bruce en sautant dans les bras de Tomy.

Le jeune garçon se releva d’un bond et courut vers la porte d’entrée tandis que la créature poussait un cri de frustration monumental. Lorsque Tomy l’aperçut dans son entièreté, il s’arrêta net, figé par la peur.

Un tyrannosaure de cinq mètres de haut et dix mètres de long les toisait à quelques centaines de pas de distance, seulement séparé par la maison à moitié en ruines. Il grognait à chacune de ses inspirations en balançant sa queue démesurée de gauche à droite, prêt à fondre sur les deux amis.

— Tomy ? Tomy, qu’est-ce que tu fais ? murmura Bruce, horrifié.

Paralysé par la peur qu’induisait la fascinante créature, Tomy resta plusieurs secondes immobile, incapable de faire le moindre mouvement. Ce n’est que lorsque l’animal vociféra en projetant son haleine fétide et moite dans sa direction, qu’il reprit ses esprits.

— On va pas pouvoir passer ! Il est beaucoup trop rapide !

— Alors quoi ? On va rester là à attendre qu’il vienne nous croquer comme des biscuits ?

— Laisse-moi réfléchir !

Tomy se souvint alors d'un cours de biologie :

— Le tyrannosaure est un redoutable prédateur, mais il n’est pas vraiment agile, récita-t-il à voix basse, s’il nous poursuit, on est foutu, il est trop rapide au sprint. Il faut gagner du temps.

Tomy lança Bruce dans la capuche de son sweat-shirt, puis se mit à agiter les bras au ciel.

— Viens nous attraper, gros lézard baveux ! Hum, regarde comme on est appétissant ! Miam miam !

— Mais qu’est-ce que tu fais ? Il va nous manger tout crus !

Tomy fit mine de ne pas entendre la remarque angoissée de son ami et continua à gesticuler affublant la créature de nom d’oiseaux.

Comme s'il parvenait à comprendre le language du jeune garçon, le monstre plissa les yeux de rage avant de faire un pas en avant, droit sur les décombres de la maison.

— Allez, avance encore un peu, gros dinosaure débile !

— Je ne veux pas voir ça ! pleurnicha Bruce en s’enfonçant dans la capuche.

Lorsque les deux énormes pattes du monstre se trouvèrent sur les décombres à l’endroit où se tenait autrefois le salon, Tomy se mit à courir de toutes ses forces en direction de l’embarcadère.

En tentant de le saisir au passage, la créature perdit l’équilibre sur les ruines branlantes et s’étala lourdement sur le sol. Tomy esquissa un sourire devant la réussite de son plan, puis redoubla d’effort en passant à côté du grand saule, à quelques dizaines de mètres de l’embarcation salvatrice.

Les débris de la maison étaient entassés dans un équilibre si précaire que le tyrannosaure dû s'y prendre à plusieurs reprises avant de parvenir à se relever. Une fois sur ses pattes, il reprit rapidement la poursuite, faisant trembler le sol à chaque foulée.

En l'entendant arriver dans leurs dos, Tomy lança Bruce dans la barque sans ménagement et tira de toutes ses forces sur la corde pour défaire le nœud marin qui la retenait au ponton.

Alors que la créature fondait toutes dents dehors vers eux, Tomy fit quelque pas en arrière pour prendre de l’élan, puis fonça sur le ponton. D’un bond rapide et puissant, il atterrit dans la frêle embarcation, la propulsant dans les eaux lisses du lac Solberg, tandis que Bruce ramait de toutes ses forces pour les éloigner au maximum.

En se retournant, Tomy aperçut la créature s’arrêter avec peine à une vingtaine de mètres sur la rive, avant de déchirer le ciel d’un autre rugissement effroyable.

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