Chapitre 14 / partie 2 : Joyeux anniversaire, Tomy.

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Tous deux firent bonne figure face à leurs invités, même au moment de chanter « Joyeux Anniversaire » et de déguster une part du délicieux gâteau au chocolat de Lucy.

Lorsque l'excitation d'ouvrir ses cadeaux se fit trop grande, Tomy commença par celui de ses parents. Sans réelle surprise, mais ravi, il découvrit le télescope Perl Halley qu'il leur réclamait depuis des mois. Celui de Marion était une grandiose maquette de la fusée Saturn V, presque aussi haute que le garçon. Après que Tomy l'eut remercier, Jeffrey plaça au centre de la terrasse, non sans difficultés, l'énorme et lourd paquet ramené par Zach et ses parents ; le jeune garçon sauta de joie en découvrant qu'il s'agissait d'un vélo BMX bleu et rouge. Il se précipita dans les bras de son meilleur ami, manquant de le faire tomber de ses béquilles, puis embrassa Ezra et Debby.

Gênée par la petitesse de son paquet, Erin le tendit à Tomy en baissant les yeux. Il se figea en déballant une modeste aquarelle multicolore représentant la constellation d'Orion dans un petit cadre sous-verre en bois foncé.

— Elle l'a peinte pour toi, à l'hôpital, spécifia Jessica.

Tomy leva les yeux vers Erin et se précipita dans ses bras.

— C'est le plus beau cadeau du monde, chuchota-t-il à son oreille.

16h32.

Assis sur une couverture dans l’herbe aux pieds de la terrasse, Tomy, Zach et Erin jouaient au jeu des sept familles en discutant. Pour permettre à la jeune fille de participer, Lucy lui avait donné sa vieille ardoise d’écolière.

— Je voudrais… la mère bricolage ! annonça Zach avec un sourire malicieux.

Erin lui tendit la carte demandée et Zach jubila en étalant devant eux sa dernière famille au complet.

— Rohh… c’est pas juste, c’est la troisième fois ! ronchonna Tomy en jetant ses cartes.

— Ah ah, c’est ce qu’on appelle le talent, mon pote.

Erin les regarda en pouffant de rire, puis attrapa l’ardoise pour y noter quelque chose.

— Vous êtes trop drôle, tous les deux.

Tomy la regarda avec de grands yeux ronds.

— Pff… c’est juste un tricheur ! cracha-t-il en croisant les bras et en tournant la tête.

Du coin de l’œil, il aperçut Jeffrey, Ezra et Baxter qui se dirigeaient vers le garage, probablement pour admirer Lydia, la voiture de collection de Jeff.

Sur la terrassa, Debby, Lucy et Marion discutaient avec Jessica en sirotant un verre. Cette dernière s’essuya les yeux avec une serviette en papier, tandis que les trois autres semblaient vouloir la réconforter.

— Je t’interdis de proférer de telles accusations mensongères à mon encontre, qui plus est en présence d’une dame ! répliqua Zach avec verve tout en pointant Tomy d’un doigt accusateur, n’as-tu point honte de te conduire ainsi devant ta petite amie, malotru ?

Tomy se tourna vers lui d'un bond, l'air rageur. Erin semblait beaucoup amusé par la situation.

— C’est pas ma petite amie ! répondit-il en fulminant, t'as compris, l’estropié ?

La jeune fille eut un mouvement de recul lorsque Tomy se jeta sur Zach. Affolée, elle tenta de les séparer avant de se rendre compte que ce dernier était au bord des larmes tant il rigolait.

— Je vais te chatouiller jusqu’à ce que tu pisse dans ton froc, alors dis-le ! Dis que chui le meilleur !

— Arrête ! Ah ah ah ! Au secours ! J’arrive plus à respirer ! Ah ah ah !

Le visage cramoisi de Zach semblait sur le point d’exploser. Pour venir à sa rescousse, Erin se jeta à son tour dans la mêlée et se mit à chatouiller Tomy. Les deux garçons se tordirent en tous sens en riant aux éclats.

Depuis la terrasse, Debby, Lucy, Marion et Jessica esquissèrent un sourire en les regardant s’amuser, un air triste sur le visage.

18h12.

— C’était le meilleur anniversaire de toute ma vie ! Je suis vraiment content que tu aies pu venir, dit Tomy à Erin qui s’apprêtait à monter dans le pick-up bleu clair.

Elle griffonna un simple « moi aussi » sur l’ardoise avant de la lui tendre en souriant.

— Nan, maman a dit que tu pouvais la garder. Ce sera plus simple pour toi de communiquer avec les autres, comme ça.

Elle regarda Tomy en ouvrant de grands yeux, puis se jeta dans ses bras. Il la serra contre lui pendant un instant qui lui parut durer une éternité.

— Allons, Erin, il faut y aller maintenant, annonça Jessica en posant sa main sur son épaule.

— Pardon m’dame MYERS, s'excusa Tomy en reprenant ses esprits, on se revoit bientôt, d’accord ?

Erin plongea son regard dans le sien en secouant la tête de haut en bas, puis déposa un furtif baiser sur sa joue avant de sauter sur la banquette arrière. Tomy ne put détacher son regard d’elle avant que le pick-up n’ait totalement disparu derrière les pins qui bordaient le chemin de terre.

Jeffrey qui se trouvait avec Lucy sur le perron se tourna vers elle.

— Ce sont vraiment des gens charmants, tu ne trouves pas ?

Lucy lui lança un regard assassin avant de se précipiter dans la maison.

— Lucy, attend ! lança-t-il en la suivant.

Tomy resta le regard perdu dans le vague pendant plusieurs minutes. Il avait tant attendu ce moment que son esprit repassait déjà le film de la journée. Il n’y voyait qu’Erin ; son sourire lorsque tout le monde avait chanté « Joyeux Anniversaire », ses yeux remplis de gourmandise lorsqu’elle avait dévoré deux parts de gâteau, son magnifique cadeau, puis la douceur de son baiser sur sa joue et son parfum. Tout ce qui faisait d’elle la jeune fille qu’elle était lui manquait déjà au plus haut point.

Sans qu’il s’en rende compte, une larme roula sur sa joue. Il se tourna pour chercher du réconfort dans le regard de sa mère et fut déçu de ne pas la voir sur le perron.

Il se dirigea vers la maison, le pas lourd et les bras ballants.

En passant la porte, il perçut une discussion animée entre ses parents sans parvenir à comprendre ce qu’ils se disaient. Il s’approcha de la porte de la cuisine pour y coller son oreille.

— Je savais que tu en ferais toute une histoire !

— Attends une seconde, c’est toi qui me caches des choses, mais c’est moi la folle hystérique ? C’est l’hôpital qui se fout de la charité !

— Oh je t’en prie, Lucy, garde ton prêchi-prêcha pour toi ! Une fois encore, le monde ne tourne pas autour de ton nombril !

— Je n’ai jamais présumé d’une telle chose, sauf que, lorsque mon époux a un problème, je m’attends à ce qu’il ait envie de m’en parler ! C’est comme ça que fonctionne le mariage !

— Oh, vraiment ? C’est aussi de la faute du mariage que tu te permettes de dépenser une petite fortune pour une simple fête d’anniversaire alors que nous avons des dettes à régler ? Hein ?

— Comment oses-tu mêler Tomy à cette histoire ? Il n’est pas responsable de ce que ton père nous a faits et il n’a rien à voir avec tes problèmes psychiatriques ! Après tout ce qu’il a vécu ces derniers mois, il méritait amplement sa fête d’anniversaire !

— Même si le petit Aftalion a failli passer sous une voiture par sa faute ?

Tomy eut un mouvement de recul. Jamais il n’avait entendu ses parents se disputer avec autant de hargne, et l'affirmation de son père lui arracha un sanglot. Il s'approcha de la serrure pour observer discrètement la scène.

— C’était un accident ! Et d’abord, c’est Zachary qui lui a proposé de faire l’école buissonnière !

— Tu sembles bien certaine de cela !

Face à son père qui se tenait dos à la porte, Tomy aperçut Lucy ouvrant de grands yeux et une large bouche, effarée par les propos de Jeffrey.

— J’en suis certaine, oui, parce que j’ai confiance en mon fils et parce que j’ai lu la déposition que Zachary a faite à la police, contrairement à toi !

Gêné par son erreur, le corps de Jeffrey s'affaissa.

— Tu dis que le monde ne tourne pas autour de moi, mais je te signale que c’est autant le cas pour toi !

— Je suis désolé Lucy... mes mots ont dépassé mes pensées… j’ai besoin de mes médicaments, donne-les-moi !

Tomy vit Lucy lancer un regard rempli de haine à Jeffrey avant de sortir le flacon de sa poche.

— Maintenant, c’est la faute de ces satanés médicaments ? Voilà ce que j'en fais !

Elle ouvrit le petit tube orange et en éparpilla le contenu sur le sol.

— Tu es folle ! Ça coûte une fortune ! objecta Jeffrey en se précipitant pour les rattraper.

Sans le vouloir, il bouscula Lucy qui, en tombant, emporta la nappe de la table, faisant voler en éclat les plats et assiettes qui s’y trouvaient dans un vacarme assourdissant.

Affolé, Tomy détourna le regard en s'éloignant de la porte tandis qu’un flot de larmes silencieux inondait son visage. Une fois sur le perron, il se mit à courir de toutes ses forces en direction du grand saule pour se réfugier dans sa cabane.

Aux pieds de l'arbre, il s’essuya le visage puis commença à gravir l’échelle de bois avec précipitation. Mais à presque trois mètres du sol, il perdit l'équilibre lorsqu'une des lattes se détacha, le faisant basculer dans le vide...

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