Chapitre 18

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La douleur n'arriva pas.

A la place, je fus éclaboussé d’un liquide chaud et poisseux. Redoutant ce que j’allais voir, j’ouvrais tout de même les yeux. Devant moi, les bras écartés, se tenait Kaleb.

— Vis, lâcha le brun dans un râle.

Cette fois, j’obéissais.

Je m’élançais à travers la pièce à vivre pour rejoindre au plus vite les filles. Je savais que l’archange ne pourrait pas me suivre dans les couloirs du manoir et encore moins au sous-sol à cause de sa grande taille. Je ne pris donc pas le temps d’expliquer la situation à Isis et lui ordonna de m’aider à soulever Kendra avant de dévaler les escaliers.

Je fermais la porte de la salle d'entraînement derrière nous. Nous étions en sécurité. Nous étions piégés.

Nous ne pouvions clairement pas rester ici. S' ils n’arrivaient pas à entrer, la faim finirait par avoir raison de nous. Je devais trouver une solution. Avec un peu de chance, les anges finiraient par se lasser et partiraient tout seuls. Mais dans ce genre de situation, il valait mieux ne pas se fier à la chance.

Je faisais les cents pas dans la pièce, remerciant silencieusement un quelconque dieu que Isis soit muette. Il fallait que je réfléchisse. Que ferait Kaleb ? Non. Je ne devais pas penser à lui, sinon j’allais craquer et me rouler en boule pour pleurer. Et probablement rester ainsi pour l’éternité.

— Comment va Kendra ? finissais-je par demander à la métisse.

— Pas très bien mais l'hémorragie s’est arrêtée, articula-t-elle sans un bruit.

Je hochais la tête, nous ne pouvions rien faire de plus.

— Que s’est-il passé ? demanda la jeune fille.

Une boule dans la gorge, j’avais redouté ce moment.

— Nous en parlerons quand Kendra sera réveillé. En attendant, il faut qu’on trouve un moment pour sortir sans se faire tuer.

L’autre acquiesça, elle se doutait sûrement que quelque chose de grave était arrivé. Pourtant, elle n'insista pas.

Nous restâmes assises en silence, écoutant les bruits alentour pour essayer de déterminer si l’ennemi était encore là. Toutes mes pensées tournées vers notre fuite, je faisais tout pour ne pas ressasser les événements de la nuit passée.

Le soleil devait se lever dehors, lorsque Kendra gémit.

Nous lui donnâmes de l’eau et attendîmes qu’elle se réveille pour de bon. J’étais étonné qu’elle reprenne déjà connaissance mais en était aussi rassuré. Ses plaies ne devaient pas être si graves que ça.

— Les jumeaux ? demanda-t-elle d’une voix cassée lorsqu’elle eut repris contenance.

Je ne voulais pas être celle qui lui annoncerait la mort de ceux qu’elle chérissait le plus au monde. Pourtant, j’étais la seule à avoir vu ce qu’il c’était passé.

— Kendra, je…

Je fus immédiatement coupé par un immense coup contre la porte de métal du sous-sol. Était-ce Kaleb ou San qui s’en était sorti et voulait nous rejoindre ? Le second bruit vint détruire tous mes espoirs. C’était un ricanement, ou du moins ce qui s’en rapprochait le plus venant d’un bec d’ange.

Ils avaient réussi à descendre.

— Nous sommes fichus.

— Ne dis pas de bétise, intervint Kendra. Cette pièce était un bunker avant qu’on ne le transforme en salle d’entraînement. La porte ne cédera pas en quelques secondes.

— Quand bien même, ils finiront par entrer. Et nous n'avons aucune autre issue.

— Laisse-moi finir.

Sa voix reprennais doucement de la vigueur. Comment pouvait-elle récupérer si vite ?

— Ça n'aurait pas été intelligent de ne pas faire une autre sortie. Place-toi dos à la porte et compte trois matelas. Soulève le quatrième.

J'obéissais en essayant d’ignorer les coups de plus en plus répétés sur la porte. Une fois les pieds sur le troisième matelas bleu, je glissais mes doigts entre ce dernier et le suivant. D’une épaisseur ne dépassant pas les vingt centimètres, le quatrième matelas d’entraînement se souleva pour révéler une trappe.

— Où ça mène ? demandais-je, reprenant espoir.

— Très loin d’ici, au milieu de la forêt. Par contre, l’une d’entre vous devra me porter pour descendre.

Isis fit signe qu’elle s’en occupait et j’ouvrais la trappe.

C’était si profond, que je n’en voyais pas le fond. Mais j’avais confiance en Kendra. Malgré son état, elle était sûrement notre meilleure chance de survie.

Je laissais Isis passer devant avec la blessée avant de m'engouffrer dans l’obscurité. Je descendais quelques barreaux de l’échelle métallique puis refermais la trappe. J’avais fait en sorte que le matelas retombe en place pour que l’on ne soit pas suivi, même si je doutais qu'un ange puisse passer par là.

Après une descente qui me paru interminable, mes pieds touchèrent un sol poussiéreux. J’entendais plus que je ne voyais les filles à côté de moi.

— Je passe devant. Tape moi l’épaule si tu veux qu’on s’arrête ou que je porte Kendra, disais-je à Isis.

Je n’attendais pas de réponse et commençais à marcher dans le noir, les mains tendues vers l’avant.

Nous marchâmes bien longtemps dans ce tunnel qui montait très doucement. Depuis quelque temps, je laissais ma main droite glisser sur le mur. La roche froide me faisait du bien. L’obscurité ambiante me donnait l'impression d’avoir décuplé tous mes autres sens. Je sentais le goût de l'humidité sur ma langue à chaque inspiration tandis qu’au moindre bruit suspect, mes muscles se tendaient, prêts à en découdre. L’adrénaline coulait toujours dans mes veines et je redoutais le moment où ça ne serait plus le cas.

Au bout d’un moment, peut-être deux heures, ma main gauche rencontra un barreau métallique.

— Nous y sommes. Restez ici, je vais jeter un œil.

En haut, mes mains rencontrèrent une trappe en métal, identique à celle qui se trouvait dans le sous-sol du manoir. Je la soulevais doucement pour éviter le moindre grincement.

La lumière était faible, j'apercevais des rideaux, un lit et une armoire. Personne en vu.

Je me glissais donc dans la pièce en faisant signe aux autres de me suivre.

A première vue, nous nous trouvions dans une sorte de cabane. Les meubles que j’avais aperçu étaient les seuls de la bicoque en plus d’une petite cheminée noire de suie.

Isis allongea Kendra sur le lit et cette dernière dit :

— Reposez-vous. On ne craint rien ici.

J’acquiesçais faiblement, à ces mots, l'adrénaline avait fuis mon organisme. Je titubais jusqu’à un mur pour me laisser glisser au sol. Comme un tsunami, peur, tristesse, colère et surtout douleur déferlèrent dans ma tête. Je soulevais mon t-shirt pour laisser apparaître l’immense ekymose qui courait sur mon ventre. Je devais avoir plusieurs côtes cassées.

Les larmes aux yeux, je m’adressais à Isis, encore debout au milieu de la pièce.

— Je suis désolé, Isis, mais je vais encore te demander de faire quelque chose.

— Je prends le premier tour de garde, articula-t-elle avec un sourire.

Je le lui rendais avant de perdre connaissance.

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