Chapitre 19 - une étreinte tendre

8 minutes de lecture

Savoir que les choses doivent arriver tôt ou tard et les vivres constituaient deux faits bien distincts. Merwan savait pertinemment que Leyn allait poser les mains sur lui. Il allait le toucher intimement. Il se frotterait contre son corps et poserait son intimité poisseuse d’un lubrifiant quelconque contre sa verge avant de l’enfourner dedans. C’était une évidence qu’il avait plus ou moins accepté. Il n’y couperait pas. Mais à présent qu’il se tenait dénudé sous un drap, dans le lit de l’oméga, il n’avait qu’une envie : se recroqueviller sur lui-même et pleurer sans s’arrêter. Ce ne serait pas digne, mais les larmes montaient déjà à ses yeux. Il ne voulait pas perdre ce qu’il avait gagné avec Leyn. L’apaisement, la quiétude, le soulagement... et pourtant tout cela allait disparaître d’une manière ou d’une autre, il en était persuadé.

Le repousser, le chasser, le battre, le cogner, lui hurler dessus jusqu’à ce qu’il déguerpisse, rien de tout cela ne serait raisonnable. S’il était renvoyé à Atkins, encore une fois, il retournerait en enfer. Alors, il était capital qu’il apprenne à gérer la situation. Ce n’était pas si compliqué : donner l’accès à son sexe et le laisser faire. Il fallait juste réussir à rester immobile.

Leyn, toujours habillé, s’approcha lentement du corps frémissant de son lié et s’installa près de lui, par-dessus le drap qui laissait deviner les formes de Merwan. Lentement, doucement, il chercha ses mots.

- Je n’ai pas envie de faire ça. Et toi non plus. Alors commençons doucement… Est-ce qu’il y a des choses que tu aimes ?
- Non…
- Rien du tout ?
- Non, je ne crois pas.

C’était une affirmation étrange que Leyn ne parvenait pas réellement à comprendre ou même à croire. S’il n’aimait vraiment rien, pourquoi sa chaire durcissait-elle sous les caresses ? Néanmoins, il décida de ne pas le remettre en doute et de proposer une alternative.

- Nous n’avons pas trop le choix… Est-ce qu’il y a un contact que tu préférerais ? Je pensais que nous pourrions commencer par quelque chose de… facile.
- Rien n’est facile.
- Oui, tu as raison.

Lentement, Leyn se coucha sur le côté, tout près de l’alpha. Il avait peur mais en même temps, voir Merwan refuser le contact était particulièrement rassurant. Ainsi positionné, il observa les traits épais de l’alpha. Il avait les yeux ouverts et il fixait le plafond, figé. Lentement, Leyn constata avec horreur que son alpha avait peur. L’implication d’une telle information le dépassait, mais cela lui donna un courage tout à fait inattendu.

Alors il pivota pour se mettre sur le dos, toujours par-dessus les couvertures et il se mit à observer le plafond à son tour. Blanc, insipide et sans intérêt.

- Je te propose un jeu… Tu me touches… et je reproduis les mêmes gestes sur toi. Mais en douceur… d’accord ?
- D’accord…

Durant près de deux minutes, Merwan ne bougea pas puis très lentement, il se tourna sur le côté pour observer le plus petit. Leyn mit un petit moment avant d’en faire de même. Ils s’observèrent. La main de l’alpha finit par se lever, lentement, avant de venir caresser le côté de la joue -si douce- de l’oméga. Leyn frémit sous le contact mais très lentement, il copia le geste et posa ses propres doigts sur la mâchoire de Merwan. C’était une chose étrange à faire et dans la poitrine du plus petit son cœur palpita avec force.

Lentement les mains repoussèrent quelques mèches dans une tentative de synchronisation au rythme des plus aléatoires. Merwan caressa avec le côté de son pouce la peau douce de la mâchoire de son oméga et il se sentit trembler de l’intérieur. Le garçon n’était pas en chaleur et pourtant, quelque part en ses reins naissait un feu qu’il avait appris à craindre et à détester. Il haleta sous le choc et la panique, mais la main de Leyn posa une caresse appuyée qui attira son attention.

- Je n’ai jamais été aussi proche d’un alpha… est-ce que tu veux bien… faire doucement ?

La demande eut le mérite de surprendre Merwan mais surtout, elle lui rappela qu’on venait de lui offrir une très grande maîtrise de la situation. Peu importait le brasier sous sa peau, s’il n’amenait pas lui-même son sexe contre l’oméga, il ne se passerait rien. Leyn n’allait pas l’agresser, il suivait uniquement ses gestes et se laissait totalement commander.

Les doigts allèrent se perdre dans les mèches étalées sur les oreillers et revinrent tranquillement le long de leurs cous. Sous ses doigts, Merwan put sentir les battements vifs du cœur de l’oméga. En humant doucement, discrètement, il put sentir sa panique et toute une partie de lui aima ça. Il avait le pouvoir. S’il le voulait, il n’avait qu’à serrer les doigts dans un grand coup vif et la petite trachée serait broyée. Ce serait si simple, si facile et tellement rapide. Il sursauta en sentant les doigts délicats se poser sur son collier épais, sur ce collier qui lui avait déjà causé tellement de douleurs et de souffrances. C’était un rappel simple de la place qu’il avait dans la société. Peu importe sa force physique, ici, il était faible, complètement à la merci de Leyn et tout le pouvoir qu’il pensait avoir, c’était tout le pouvoir que son oméga lui avait offert… pour l’aider, le calmer, l’apaiser.

Merwan ferma les yeux et volontairement, il glissa ses doigts le long de la gorge de son compagnon, juste pour sentir ses doigts fins jouer avec le collier en réponse. Personne ne le touchait jamais là, les omégas avaient l’air de détester poser leurs doigts sur son cou, peut-être à cause de ses crocs un peu trop proches ou peut-être parce qu’ils avaient hontes du collier qu’ils gardaient fermement attaché à chaque alpha. Honte. Merwan se reprit, cette pensée était saugrenue. Les omégas ne pouvaient pas être mal à l’aise alors que c’était eux qui décidaient de leurs sorts, se dit-il.

Pourtant, Leyn n’avait pas l’air bien du tout. Il fixait le collier avec angoisse. Ce collier c’était tout un symbole mais c’était également une arme. Ils étaient là, couché dans un lit ensemble et il y avait cette chose entre eux. C’était d’une tristesse terrifiante.

- Si je le demande, tu l’enlèverais ? demanda soudain l’alpha.
- Je ne sais pas, avoua tristement Leyn.

S’il n’y avait eu que lui, peut-être bien, mais ce collier mettait en sécurité tous les autres. Lors de l’attaque précédente, c’était grâce à lui que les bêtas avaient pu l’arrêter complètement. Sans ce collier, il ne lui resterait plus que les déclenchements de crises de rut pour se défendre, une pratique terrifiante qui traumatisait durablement les omégas qui l’employaient.

- Je ne crois pas… est-ce que tu m’en veux ?
- Oui.

Leyn ferma les yeux sur ce mot unique et bien compréhensible. Il s’attendait à ce que la main s’éloigne de son cou ou se referme dessus, mettant fin à l’échange, mais la caresse reprit, le surprenant un instant. Elle descendit sur ses vêtements pour suivre la ligne délicate de ses épaules.

- Et si je demande que tu te déshabilles…
- D’accord.

Maladroitement l’oméga rompit le contact pour retirer son haut, dévoilant un torse creux, sans muscle apparent et si gracile qu’on aurait pu croire qu’une simple pichenette pouvait le briser. C’était peut-être le cas. Sans attendre, Leyn se recoucha, se remettant en position. Il avait envie de poser sa propre main sur le pectoral de l’alpha pour sentir son cœur taper dans son corps, mais il se retint laissant Merwan y aller à son rythme. Pour le moment, les mouvements leur convenaient à tous les deux.

La grande main épaisse revint sur son épaule et il posa ses propres doigts sur les muscles épais de l’alpha. Obéissant tranquillement, il put caresser le muscle tout en trésaillant sous la caresse qu’il recevait. Ce n’était rien, c’était totalement anodin et pourtant ce geste lui parut terriblement intime. Il chercha le regard de Merwan et fut surpris de le voir arborer un air aussi triste. Peut-être à cause du collier ? Ou peut-être parce qu’il se sentait obligé de faire tout cela ? Mu par une impulsion Leyn se redressa, coupant le jeu qu’il avait lui-même instaurer, pour saisir délicatement la nuque de l’alpha afin de le tirer contre sa poitrine. Merwan se laissa manipuler, mollement, et se retrouva encerclé des bras fins de l’oméga dans une étreinte qui n’avait rien de sexuelle. Il était peut-être nu sous les draps, mais ce n’était qu’un câlin réconfortant. Le premier qu’il recevait depuis longtemps.

Fermant les yeux, il profita de cette étreinte douce. Elle ne le fit pas paniquer car il n’y avait aucune chaîne pour le restreindre et il suffirait d’un bond pour la briser. Il n’était pas retenu contre sa volonté. Les doigts fins de Leyn passèrent dans ses cheveux, comme pour l’apaiser, continuèrent leurs courses sur sa nuque, évitant de leur mieux le collier et terminèrent le long de ses épaules, refusant de passer cette ligne que l’alpha avait instauré. Ils refirent ce même chemin plusieurs fois, jusqu’à ce que Merwan se détende réellement. Il avait le visage enfoui contre l’oméga et son odeur emplissait son nez. C’était une surprise, mais cette odeur était agréable.

Sans même y faire véritablement attention, le brun frotta son nez contre la peau tendre de l’oméga et il se prit à sourire. Ce contact n’avait rien à voir avec ce qu’on lui imposait habituellement. Leyn ne pouvait peut-être pas le libérer de toute menace ou de toute contrainte, il ne pouvait pas lui offrir une absence de contact sexuel, par contre, il y avait quelque chose qui lui était offert. Un cadeau très particulier : celui d’une véritable relation où il pourrait avoir des choix. Cette idée était si douce que refusant d’y réfléchir davantage, il posa un baiser sur l’oméga. Ses lèvres se pressèrent contre l’une de ses côtes, légèrement saillante, faisant sursauter Leyn qui ne s’y attendait pas. Contre la bouche de l’alpha, la peau se couvrit de frissons adorables qu’il embrassa de nouveau. En réponse, les bras s’enroulèrent un peu plus fort autour de sa tête et Leyn se courba jusqu’à poser un baiser sur le haut de son crâne.

Ce n’était rien de ce que le juge ou Atkins avaient pu exiger. Ce n’était vraiment rien du tout comparé à ce qu’on leur demandait et pourtant, Merwan sentit ses muscles se décontracter alors qu’il atteignait un apaisement rare. Il était simplement bien. Il était juste heureux du peu de droits qu’on lui avait offert. Et alors qu’il s’endormait, épuisé par les émotions, il rêva de pouvoir profiter de ce genre d’étreinte une nouvelle fois.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire Hendysen ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0