Chapitre 5 : Liodas

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Ils arrivèrent à destination, deux jours plus tard. Depuis leur petit village, Sheireen et Seth avaient parcourus environ six cent kilomètres.

Ils avaient fait un détour pour pouvoir passer devant Yggdrasil, l'arbre sacré des elfes. Les trois elfes avaient été émerveillés devant le gigantesque tronc qui se perdait dans les nuages, mais ils avaient dû vite repartir, la guerre n'attendait pas.

Durant leur traversée de la Terre Verte, ils avaient appris que la situation au front était plus critique qu'ils ne le pensaient. Les Wesi étaient nombreux, il se disait qu'ils combattaient tous depuis leur plus jeune âge, hommes comme femmes. On parlait même d'enrôlement forcé.

Au contraire, les Zaléniens devaient entrer à l'académie des guerriers pour devenir soldats, la plupart étant des hommes. Les femmes étaient pourtant admises, mais rare étaient celles qui avaient l'autorisation de leur matriarche.

En effet, à Zalia, les femmes étaient destinées à diriger la vie de leur village. Elles se regroupaient en conseil, présidé par la matriarche. Les jeunes filles entraient au conseil à leur dix-sept ans. Dans le village d'où venait Sheireen et Seth, le conseil comptait moins d'une dizaine de femmes et la matriarche était la femme qui les avait recueillis. Ainsi, Sheireen avait imposé son départ à la chef du village.

Liodas, qui abritait l'académie, était vraiment immense, pour Sheireen et Seth c'était une première, tant de bruits, d'odeurs. Ils mirent longtemps avant de trouver le bâtiment en question, mais il était trop tard, ils ne purent entrer. Sévrar décida quant à lui d'attendre le lendemain pour tenter sa chance.

Ils se mirent donc tous trois en quête d'un lieu où dormir.

Les rues commençaient à se vider, les lumières à s'allumer dans les masures. De la musique et des discussions venaient de la plupart des auberges devant lesquelles les jeunes elfes passaient, mais ils avaient peu d'argent et ne pouvaient donc pas se rendre dans celles très fréquentées.

Ils finirent par trouver une petite auberge près des remparts de la ville les plus éloignés du palais. C'était un bâtiment trapu mélangeant bois et pierres irrégulières, la grande salle était donc plutôt basse de plafond, ce que l'ambiance enfumée n'arrangeait pas. "Le lutin grognon" était presque vide, la tavernière, une grosse dame peu loquace, leur donna trois soupes et une chambre pour seulement quelques pièces.

Ils avalèrent goulûment leur repas sans saveur puis montèrent dans leur chambre. Elle contenait deux petits lit et un matelas crasseux au sol. Après avoir vérifié qu'il n'y avait pas de petites bêtes dans leurs couvertures, ils s'allongèrent et s'endormirent rapidement.

§

À l'aube, ils descendirent, avec leurs affaires, dans la salle où ils avaient mangé la veille et prirent leur petit déjeuner.

Sheireen et Seth dirent ensuite au revoir à Sévrar et partirent vers l'académie.

C'était un grand bâtiment construit dans un matériau noir, sa forme presque épineuse suggérait l'offensive. Cela en était presque terrifiant, agressif, pourtant Sheireen se surprit à apprécier l'image que l'Académie renvoyait de l'extérieure.

Les portes étaient grandes ouvertes, de nombreux jeunes gens venaient, comme eux, s'inscrire.

A l'intérieur, ils attendirent tous ensemble dans une grande salle aux nombreuses colones, celles-ci supportaient un plafond peu ornementé mais qui révélait pourtant la richesse de l'institution. Il n'y avait aucun bruit, comme si personne ne voulait déranger. Seth se pencha vers Sheireen et chuchota :

— Ils ont l'air stressés. Tu pense qu'ils vont nous tester pour savoir si on peut s'enrôler ?

— Oui. Tu croyais qu'on allait juste arriver comme ça, les mains dans les poches ? répondait la jeune femme sans le regarder.

— Je n'y avais pas pensé...

— Chut ! dit quelqu'un sur leur droite.

Seth leva les yeux au ciel mais se tut.

Ils attendirent ce qui sembla une éternité au jeune homme avant que quelqu'un ne vienne.

— Bienvenue, jeunes gens. Comme vous le savez, vous allez passer une épreuve pour savoir de quoi vous êtes capable. Nous allons commencer par les femmes. Veuillez me suivre.

Seth souhaita bonne chance à sa sœur et la regarda partir avec une dizaine d'autres filles.

§

L'homme les emmena au sous sol, où se trouvait une arène. Elle ressemblait exactement à ce à quoi Sheireen s'était imaginée. Des murs de pierre nus où l'on pouvait distinguer des traces de coup de lame et du sang séché qui avait échappé aux nettoyeurs - à moins que cela ne soit fait exprès pour intimider les nouveaux venus. Le sol était recouvert de sable mélangé à de la terre.

— Celles qui ont des armes, je vous invite à les sortir, les autres choisissez en, vous avez cinq minutes.

Personne ne bougea, toutes étaient déjà armées. Sheireen dégaina la lame de son père avec assurance. C'était une épée assez basique mais dont la lame avait été parfaitement aiguisée par la jeune fille. Elle s'était longuement entraînée avec depuis qu'il était mort. Au début, elle n'arrivait même pas à la soulever mais maintenant, elle lui semblait légère comme une brindille, c'était devenue une extension de son bras.

— Bien. Vous allez combattre les unes contre les autres. Celle qui gagnera pourra devenir chevalier du dragon. La deuxième et la troisième deviendront simple chevalier, ce qui est déjà un honneur. Les autres deviendront spadassin et pourront choisir leur spécialisation après quelques mois. Compris ?

Toutes acquiescèrent.

— Allez-y !

Ce fut alors un déchaînement de violence, chacune se jetant sur la personne la plus proche. Personne ne portait d'armure. Le sang se mélangea au sable dès les premières secondes.

Sheireen combattait contre une grande elfe qui frappait comme une brute, mais était lente. Alors qu'elle paraît une énième attaque, elle sortit son poignard et l'enfonça dans la chair tendre de la cuisse de son assaillante qui s'affala au sol.

La jeune fille n'eut pas le temps de souffler longtemps qu'une brune se jetait sur elle en hurlant. Elle lut dans son regard un éclat de cruauté pur, elle avait l'impression de se retrouver devant les assassins de son père. La colère monta, vive et incontrôlable. Sheireen balança son arme vers la femme. Elle se rendit compte de son geste trop tard, la lame s'enfonça profondément dans l'épaule sans rencontrer de résistance. La brune hurla de douleur.

— Dé-désolée.

Des hommes accoururent et emmenèrent la blessé.

Sheireen se reconcentra alors sur les combats, il ne restait qu'elle et une rousse. Cette dernière approchait lentement vers elle avec un regard las. Sheireen se mit en garde. Une fois à son niveau, son adversaire leva son arme et l'abattit avec une vitesse incroyable. Sheireen para de justesse et les yeux de la rousse s'agrandirent de stupeur puis un éclat de plaisir les illumina.

— Comment as-tu fait ? D'habitude personne n'arrive à arrêter mes coups.

— J'ai juste contré, comme je l'ai toujours fait.

— Enfin quelqu'un à ma hauteur, dit la jeune fille en souriant.

Elle dégagea sa grande épée et repartit à l'attaque, Sheireen para plusieurs fois, mais n'arriva pas une seule fois à attaquer. La lame ennemie fini par lui lacérer le ventre. La rousse avait gagné.

— Je me suis peut-être trompée. Reviens me voir quand tu seras plus entraînée, nous combattrons de nouveau, proposa la nouvelle apprentie chevalier du dragon en lui tendant la main.

Sheireen accepta son aide pour se relever et lui sourit.

— Avec plaisir.

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