Chapitre 4.2 - Un scout ne se perd pas, il explore.

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Alors que l’équipe restait figée par cette rencontre, Christophe se précipita dans les fourrés sur les talons du scout.

— Mais qui va nous choper ? s'inquiéta Axel.

— On est peut-être tombé sur un grand jeu, suggéra Aimé.

Après un bref moment d'hésitation, Jeannot s'élança à la poursuite de Christophe, naviguant habilement à travers la végétation dense en se guidant par le bruit des pas de son compagnon. Il sautait par-dessus des petits fourrés, évitait les branches basses et contournait les obstacles qui surgissaient sur son chemin. Malgré l'effort physique considérable que cela impliquait, il jetait de temps en temps un coup d'œil pour s'assurer que le reste de l'équipe le suivait. Tout à coup, un petit groupe de scouts apparut et croisa leur chemin en sens inverse, mais ils ne s'arrêtèrent pas malgré les signes que Jeannot fit de manière urgente. Quelques secondes plus tard, Christophe arriva en courant à toute vitesse, percutant de plein fouet Jeannot et manquant de le faire tomber.

— Allez ! Go ! Go ! On se tire ! exhorta-t-il sans stopper sa course.

Comme lui, ils firent tous demi-tour.

— Qu'est-ce qu'il se passe ? hurla Pierrot.

— Je n’en sais rien ! haleta Christophe. Vu la tête de ceux qu'on a croisés, j’ai pas envie de savoir.

— Non, mais attends ! C’est une blague ou quoi ! fulmina Axel. Nous courons à cause de la tête qu'ils faisaient...

Tous les membres de l'équipe s'immobilisèrent, observant Christophe penché en avant, les mains sur les cuisses. Il tentait de reprendre son souffle tout en hochant la tête négativement.. Soudain, un grondement sourd se fit entendre, se rapprochant à une vitesse alarmante. Le visage de Christophe se crispa, et il pointa du doigt la source de ce bruit menaçant.

— Non, je dirais plutôt que c'est surtout ça qui m'a décidé à déguerpir, répondit-il.

— Mais qu'est-ce que c'est ? interrogea Pierrot.

Alors qu'il peinait toujours à reprendre sa respiration, Christophe braqua cette fois-ci son index en direction des scouts espagnols.

— Justement, je pensais les rattraper pour leur demander. Mais on peut toujours rester ici et voir par nous-mêmes...

— La première solution, décréta Axel avant de s'élancer de nouveau sans attendre de réponse.

L'équipe échangea un regard rapide avant de le suivre. Les pas étouffés par la couche d'humus donnaient l'impression à Jeannot d'une course silencieuse, presque irréelle. Seul le bruit des branches frôlées cadençait cette poursuite muette. Au bout de quelques instants, son cœur se mit à cogner de plus en plus fort dans sa poitrine. Le rythme sourd résonnait désormais dans ses oreilles.

Soudain, ils atteignirent un chemin. Jeannot chercha des yeux les Espagnols, en vain. Pressé par Axel, il se mit à filer vers la droite, dans le sens de la descente, pour avancer plus rapidement. Le sentier devint de plus en plus pentu et zigzagua. Ils franchirent plusieurs virages serrés avant de tomber sur une rivière. Près de celle-ci se dressait une tente, une malle à côté et une table de bambou à l'arrière, mais aucune trace des autres scouts.

— Ils sont là-bas ! cria Bertrand en signalant un endroit plus loin sur le cours d'eau.

Soulagé, Jeannot les repéra sur un radeau. Bertrand les héla, mais ils disparurent derrière un méandre.

— Il ne faudrait pas oublier ce qui nous poursuit ! rappela à l’ordre Axel.

Essoufflé, Jeannot montra du doigt un taillis de bambous. Ils s'y frayèrent un passage jusqu'à trouver un lieu pour se cacher. Après plusieurs minutes passées à écouter attentivement le moindre bruit, ils finirent par se convaincre qu’ils avaient réussi à semer ce qui semblait les poursuivre. Ils se dirigèrent vers la tente.

— Purée ! C'était quoi ? interrogea Axel.

— Aucune idée ! s’exclama Jeannot.

— Ils devaient sûrement être en explo d’équipe, suggéra Christophe en observant le campement.

— Avec un radeau sans chef ? Ça paraît bizarre, fit remarquer Pierrot.

— Ils n’auraient pas laissé une petite gourde d’eau dans la tente ? demanda Bertrand. J’ai le gosier sec.

— Ouais ben, si tu n'avais pas vidé la tienne dans cette satanée serrure... grommela Axel.

— Je dois avoir des pilules magiques dans mon sac inutile, répondit Christophe en fouillant dans celui-ci.

Les pionniers emportaient des pastilles pour purifier l'eau lors de leurs randonnées de plusieurs jours, afin d'éviter tout problème intestinal en puisant à des sources. Ils ajoutaient un peu de sirop pour atténuer le goût désagréable.

— Bingo ! s’exclama-t-il en brandissant une plaquette.

Il attrapa la gourde, la remplit avec l’eau de la rivière et y introduisit une pastille.

— Envoie ! J’ai trop soif ! implora Axel.

— Eh ! prem's ! rouspéta Bertrand.

— T'as qu'à aller voir s'il reste quelques gouttes sur la serrure de l'ermitage...

Le courage d'Axel laissa tout le monde sans voix, même Bertrand fut pris de court. Un "oh !" de surprise générale s'échappa.

— Les gars, il faut attendre que cela fasse effet, conseilla Christophe.

Jeannot fixait l'endroit où les scouts espagnols avaient disparu. Pour avoir une chance de les retrouver, ils devaient se mettre en route rapidement. Bien qu'ils avaient abandonné toutes leurs affaires, il était persuadé qu'ils ne reviendraient pas les récupérer de sitôt. L'absence de chemin longeant la rivière et la végétation inextricable de la berge poussèrent Jeannot à suggérer que la seule solution envisageable pour suivre les scouts espagnols était la construction d’un radeau.

— Cool ! jubila Aimé.

— Aimé ! Si on fabrique un radeau, ce n'est pas pour une activité cool, mais parce que nous sommes en situation d’urgence, pesta Christophe.

— Situation d’urgence… railla Aimé. Franchement, arrêtez de psychoter, les mecs. Vous êtes en train de vous faire un film.

— T'as tes rastas dans les oreilles, ou quoi ? T'as pas entendu cette chose qui voulait notre peau ! s'écria Axel, hystérique.

Un doute envahit l’esprit de Jeannot. Était-ce Christophe, la voix de la sagesse, ou se trompaient-ils à paniquer sans raison, comme le suggérait Aimé ? Il prit une profonde inspiration pour éclaircir ses idées. Ils devaient d'abord déterminer leur position exacte, puis trouver un moyen de contacter Francis. L'unique solution était de rattraper les scouts espagnols. Comme ce n'était pas la première fois qu’ils construisaient un radeau, et au vu de débit tranquille de la rivière, il lança pour seule réponse le traditionnel :

« Allez, c’est parti ! »

Oubliant, peut-être un peu trop facilement, qu’ils allaient évoluer dans un élément difficile à dompter et souvent imprévisible : l'eau.

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