Chapitre 5.1 - Tout corps plongé dans l’eau.

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Envisageant les possibilités, ils se rendirent compte que le taillis de bambou semblait leur fournir tous les matériaux nécessaires. En inspectant les affaires des Espagnols, ils mirent la main sur une scie et une pelote de sisal qui se révéleraient précieuses pour la construction du radeau.

— Ça va être la galère de couper les bambous avec ces scies, bougonna Bertrand en attrapant l'une d'elles. Des petits ou des gros ?

— Tu connais Archimède ? lui demanda Axel.

Bertrand resta silencieux.

— Moi, ça me dit quelque chose ! s’exclama Pierrot. C'est celui qui disait, attends voir… Ah oui ! : « Tout corps plongé dans l'eau s'il n'a pas réapparu au bout d'un quart d'heure doit être considéré comme perdu. ».

Axel soupira en entendant la blague de Pierrot puis, il se mit à expliquer d'un ton professoral.

— En fait, comme l'a dit Archimède, tout corps plongé dans l'eau reçoit de bas en haut une poussée égale au volume d'eau déplacé. Donc, si tu prends des...

— Petits ou gros ? Macarel ! s'énerva Bertrand.

— Gros, répondit fébrilement Axel.

— Elle était pourtant simple la question : « Gros ou petit ? », marmonna Bertrand en tournant les talons.

— Mais qu'est-ce que j'ai encore dit ? s’étonna Axel en haussant les épaules.

Ils suivirent Bertrand à l'intérieur du taillis. Pendant qu'il découpait les bambous de bons calibres, les autres allaient et venaient pour les sortir. Axel, resté à l'extérieur, les classait par diamètre. Alors que Jeannot s'était enfoncé une nouvelle fois en plein cœur de l'enchevêtrement de végétaux, il entendit Axel.

— Comment vous êtes passés de l'autre côté ?

Bien qu'à seulement quelques mètres, il peinait à distinguer avec qui il pouvait discuter. D'un regard, il balaya les alentours et fut stupéfait de voir que le reste de l'équipe l'accompagnait. Il se rua vers Axel.

— Hé ! Les gars ! C'est pas drôle... continua ce dernier.

Lorsque Jeannot arriva à sa hauteur, il le découvrit seul, tourné vers la rivière.

— Avec qui tu parles ?

Axel sursauta.

— Mais, comment ? Comment ? balbutia-t-il en haletant.

Axel devenait de plus en plus livide.

— Ah non... c'est pas possible ! c'est pas possible ! murmura-t-il en boucle.

Bertrand tenta de rassurer Axel. Il lui demanda de respirer profondément avant de l’interroger ce qui se passait. Il leur expliqua qu'il venait de voir Pierrot et Jeannot courir de l'autre berge, mais tous lui affirmèrent qu'ils n'avaient pas bougé. Calimero insista en précisant qu’ils portaient la même chemise rouge et le même foulard d'unité. Jeannot confirma qu'ils étaient restés sur place.

— Oh là là ! C'étaient vos doubles...

— Arrête de psychoter, gronda Christophe. Non, mais tu t'entends parler : des doubles....

Pierrot chercha à calmer l'angoisse grandissante d'Axel en expliquant que la pression accumulée avait pu lui jouer des tours. Axel concéda timidement qu'il avait les nerfs à vif. Pierrot, pour clore l’incident, lui demanda conseil sur la fabrication du radeau. La sollicitation de ses neurones détendit peu à peu Axel.

Après un temps de réflexion, il recommanda de sélectionner les bambous de plus grosses sections et de les ficeler afin de créer deux cylindres. Une fois les deux flotteurs réalisés, il proposa de les lier par des traverses et finalement de fixer sur ces dernières un plancher de bambous de petits calibres. Ils convinrent qu’il était inutile de fabriquer un gouvernail. Francis leur avait en effet appris comment une personne, placée à l’arrière et équipée d’une rame, pouvait aisément manœuvrer l’embarcation. Pour la confection des pagaies, c’était plus compliqué, mais pas impossible. Axel proposa de les réaliser en fendant le bout d’un bambou de bon calibre qui servirait de manche et d’y insérer perpendiculairement des morceaux fendus de diamètre inférieur. En les liant à la manière d’une claie, il pensait obtenir une pale correcte.

Une fois les explications terminées, Christophe manifesta bruyamment son impatience pour commencer la construction. Ils devaient agir au plus vite pour avoir une chance de rattraper les scouts espagnols. Il leur rappela que la menace qui les poursuivait rôdait peut-être non loin d’eux.

Ils pénétrèrent dans le taillis afin de retourner collecter des bambous, Jeannot resta en retrait pour scruter l'autre côté de la rivière.

— Et s'il avait vraiment vu quelqu'un ? lança-t-il à Pierrot.

— Oui... nos jumeaux....Tu connais Axel. Il psychote pour un rien.

Jeannot acquiesça d'un sourire.

Tout le monde s’affaira à l'assemblage des bambous et au bout d'une heure, à suivre les indications d’Axel, l'embarcation était terminée.

— Ça, c'est du radeau de compet' ! s’exclama Aimé.

— La dernière fois, tu nous as sorti ça au PiAthlon : on a tous fini à la baille après deux coups de pagaie, soupira Christophe.

En effet, au cours d'un week-end réunissant les pionniers de tout le département, les chefs avaient organisé une course relais en radeau. Au début de la compétition, chaque équipe s'était vu fournir du matériel pour la réalisation de leur embarcation. Francis était venu leur donner des conseils : « Prenez votre temps pour la construction, cela vous en fera gagner par la suite ». Mais, trop confiants en eux-mêmes, ils ne l'avaient pas écouté. Résultat, le radeau s'était disloqué dès la première mise à l'eau, les obligeant à tout recommencer et perdant ainsi de précieuses minutes.

Jeannot ne put s’empêcher de comparer cet événement avec leur précipitation pour franchir la porte de l’Ermitage. Cette fois-ci, il préférait suivre les conseils de Francis. Il suggéra à Pierrot de vérifier le serrage de tous les brêlages, car l'eau risquait de les détendre. Il demanda à Bébert d'examiner le matériel qui pourrait leur être utile. Bertrand exprima sa désapprobation quant à prendre des affaires des Espagnoles sans autorisation, incompatible avec l'esprit scout. Jeannot le rassura en expliquant qu'il ne s'agissait que d'un emprunt temporaire, qu'ils restitueraient dès qu'ils rattraperaient leurs propriétaires. Bertrand accepta l'argument et s’exécuta. Axel exhiba avec fierté les rames qu'ils avaient confectionnées.

— Regardez un peu ça, si ce n'est pas la classe, fanfaronna-t-il.

— Ça en jette ! Dommage que Francis ne soit pas là pour voir ça, regretta Pierrot.

Pour Jeannot, Francis semblait bel et bien à leurs côtés de par ses conseils passés. Le chef d’équipe observa fièrement ses compagnons s’occuper des derniers préparatifs. Bertrand n’avait finalement pas trouvé grand-chose d’utile : une longue corde et un paquet de biscuits qu’il s’empressa de distribuer aux autres.

Jeannot suggéra d'utiliser la corde pour créer une ligne de vie sur le radeau. Lorsqu’Aimé demanda la signification, Christophe lui rappela qu'il s'agissait d'une corde à installer sur le pourtour de l'embarcation, dont la présence était exiger par Francis à chaque fois. Elle permettait à quiconque tombant à l'eau de s'y raccrocher en cas de problème.

— Et sans gilets de sauvetage, il vaut mieux ne pas l’oublier ! précisa Jeannot.

— Une vraie mère poule, ce chef d’équipe, railla Aimé.

Une fois que Christophe eut terminé d’attacher la corde, ils mirent l'embarcation à flots et les pionniers se hissèrent dessus.

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