16 Nuit de folie

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Tout est dans le titre. Contenu (un peu) sensible. Il n'y a pas de quoi fouetter un chat mais j'aime mieux prévenir quand même.

- Vous cuisinez bien mieux que moi. Je devrais vous épouser.

Je ne m'attendais pas du tout à ça et restais muet de stupéfaction, ce qui l'amusa beaucoup. Puisqu'elle relançais le marivaudage autant jouer le jeu. Ma surprise passée je lui lançais:

- C'est une demande ?

Paroles imprudentes reprises au bond.

- Qui sait ? Au fait, le mariage c'est un préavis indispensable pour coucher avec vous ?

Évidemment je piquais un fard. Décidément j'avais à faire à forte partie. Le lieutenant Dautun avait la langue bien pendue et avec ma naïveté coutumière j'étais une victime bien trop facile à manipuler. Je préférais rompre le combat et me replier sur mes positions pour préparer la contre-attaque. Mon Dieu, voilà que je pense comme un militaire ! Mais au fond en amour aussi il y a de la place pour la stratégie.

- Hum... Peut-être pourrions nous parler de tout cela au salon, un verre de digestif à la main.

- Je vois, de l'alcool pour vous donner du courage.

Elle était implacable. Je ne répondis pas et nous changeâmes de pièce. Là, au lieu de se diriger vers le fauteuil elle vint s'asseoir à coté de moi sur le canapé en justifiant son geste :

- Lorsque nous sommes face à face j'ai l'impression de mener un interrogatoire.

- Mais moi j'ai l'impression de subir un interrogatoire !

Ma réflexion la fit rire.

- Vous pensez que mon métier déteint sur mon attitude dans la vie privée ? C'est peut-être pour ça que je fais fuir les hommes.

Ce fut à mon tour de rire.

- Merci de m'avertir, mais je m'en doutais. Que m'avez-vous dit hier soir déjà ? Ah oui, que vous aviez l'habitude de prendre les choses en main. Et vu le contexte vous ne parliez pas boulot à ce moment là.

- Et m'imaginer en train de prendre « les choses en main » ça vous a fait fantasmer ? A moins que, avec votre esprit tordu vous ayez pensé « la chose en main ».

Elle fit mine de me mettre la main au panier mais au lieu de me protéger je la pris par la taille et la plaquait contre moi. Nous nous regardâmes une seconde dans les yeux avant que je ne lui rendre son baiser de la veille. Lorsque nos lèvres se séparèrent nous échangeâmes un regard. Je ne sais pas comment était le miens mais le sien avait changé. La moquerie avait disparu au profit de quelque chose que j'espérais être de l’excitation.

- Tiens, voilà mon super-héros qui se dégèle !

La phrase sonnait comme une nouvelle mise en boite mais tout dans son attitude indiquait autre chose.

- mon super pouvoir n'est pas vraiment utilisable dans l'intimité.

Elle eu un sourire franc, sans le moindre sous-entendu.

- Je suis sure que vous n'en aurez pas besoin à ce moment là. Je me trompe ? Non, c'est bien ce que j'avais cru sentir.

Cette fois elle m'avait mis réellement la main au panier et avait pu apprécier l'effet que me faisait notre rapprochement. Elle me repoussa légèrement avant de reprendre la parole.

- Lors de ma première venue ici je me suis permis de visiter la maison, enfin au moins les pièces ouvertes. Ce n'était pas le cas de la chambre et j'ai supposé qu'elle ne devait pas être « présentable » ce jour là. Est-ce encore le cas ou pourrais-je espérer la voir cette fois-ci ?

- Elle est tout à fait montrable, au moins pour le moment. Après...

- Après quoi ?

- Après votre visite des lieux je crains que ce ne soit plus le cas.

- Ah bon, et pourquoi ?

Elle arborait un sourire faussement naïf, comptant me forcer à dire ce que justement je ne voulais pas dire. Mais pour une fois j'avais la réponse toute prête.

- Dans certains films on voit des policiers faire des perquisitions et le moins que l'on puisse dire c'est qu'ils ne font pas dans la demi-mesure. Tout se retrouve sans dessus dessous.

- Oh, je vois. Mais de quel crime devrais-je vous soupçonner pour agir ainsi ?

- Hum... par exemple d'héberger une criminelle.

Elle me repoussa. Son visage était redevenu complètement sérieux.

- C'est vraiment comme ça que vous me voyez ?

Je m'en voulu tout de suite. Pourquoi avais-je dit une chose pareille. Lui faire de la peine à ce moment là était vraiment stupide. Je m'en serais collé des baffes. Je tendis la main pour caresser sa joue.

- Pardon, désolé. Je n'aurais jamais dû dire ça. Mais tu pers vite ton sens de l'humour. Je sais être taquin moi aussi. Ne prends pas tout ce que je dis au pied de la lettre.

Lorsque je passais du vouvoiement au tutoiement son regard s'illumina. Je continuais, décidé maintenant à aller jusqu'au bout.

- Tu as tout fait pour que nous arrivions à ce moment, cote à cote sur le canapé. J'avais bien compris que tes sous-entendus était une manière de faire « passer le message » sous la forme de la plaisanterie. Tu sais, lorsque tu as été mise en joue par l'homme que j'ai fait voler j'ai eu très peur. Peur pour toi bien sûr mais aussi peur d'être passé à coté de ce que notre relation aurait put être. Je ne veux pas connaître à nouveau ce genre de regrets. Nous avons été en grand danger, peut-être que cela se reproduira encore. Alors j'ai envie de croquer la vie à pleines dents à tes cotés. Merci d'avoir été patiente. Merci de m'avoir attendu. Je suis là maintenant, pour toi, pour nous.

Je glissais ma main derrière sa nuque et l'embrassais avec douceur. Elle cacha son visage contre mon épaule, sans doute pour que je ne voie pas ses larmes. Au bout d'un moment je me levais et lui tendis la main.

- Tu viens visiter ma mystérieuse chambre ?

Elle accepta l'invite et se mit debout à son tour. Nous nous dirigeâmes vers la pièce indiquée et...

Mais que faites vous ? Vous ne croyez quand même pas nous suivre là-dedans et assister à ce qui va se passer, bande de voyeurs. Vous allez rester sagement derrière la porte et attendre que nous ressortions. Non mais, quand même !

Bon, ça y est, nous en avons fini. Maintenant nous sommes couchés l'un contre l'autre et nous nous caressons doucement, apaisés. L'image que je garderai de cette première fois c'est Bérénice en train de me chevaucher. Ah oui, j'ai oublié de vous dire que nous nous appelons par nos prénoms maintenant. Et, vous l'avez peut-être deviné, ses parents étaient des amateurs du théâtre de Racine. Elle m'a plus tard expliqué que Bérénice venait du grec Berenikê. Nikê signifie...Ah ça suffit, soyez sérieux une minute. Et arrêtez des rapprochements hâtifs entre son prénom et ce que nous venions de faire. Nikê disais-je signifie « victoire » et donc Bérénice est « celle qui apporte la victoire ». Prometteur pour un super-héros vous ne trouvez pas ? Prophétique même !

Avec tout ça j'ai perdu le fil de mon récit. Ah oui, je vous disais donc que je garderai en mémoire l'image de Bérénice en train de me faire l'amour. C'est sûr que lorsqu'elle prend les chose en main... Et puis elle a un corps généreux, très féminin malgré sa carrure. J'ai adoré sa poitrine se balançant au rythme de notre jeu, à portée de ma bouche et de mes mains. Je repense à Beaudelaire écrivant « Et son ventre et ses seins, ces grappes de ma vigne ».

Mais qu'est ce qui me prends ? Ce n'est vraiment pas quelque chose à dire ni à écrire. Excusez-moi mais j'étais encore troublé par le souvenir de ce moment. De toute façon ce n'est pas une surprise pour vous que nous en soyons arrivés là et vous imaginez très bien le tableau n'est-ce-pas ? Allez, fin de la parenthèse.

Du coup, elle s'est arrogée le rôle de garde du corps et je n'ai rien trouvé à y redire. Elle a donc passé le reste de la nuit avec moi ainsi que les nuits suivantes et le canapé n'a servi que pour nous asseoir pas pour qu'elle y dorme.

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