7 Confession

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- Je suis là parce que j'ai besoin de vous.

Je restais abasourdis. Besoin de moi pour quoi ? Je n'étais ni enquêteur ni voyant extralucide. Je restais silencieux, attendant la suite.

- Je dois d'abord vous avouer que ma visite précédente et celle-ci ne font pas partie de mon travail. Je suis la à titre privé et vous avez parfaitement le droit de me mettre à la porte.

La remarque m'énerva.

- A titre privé peut-être mais vous m'avez laissé croire le contraire. Vous débarquiez ici en uniforme ce qui m'a poussé à vous faire confiance.

- Je suis désolée que vous le preniez mal. Disons que j'ai été... indélicate. Maintenant êtres-vous prêt à m'écouter ou préférez-vous que je parte ?

J'étais vexé et un peu honteux de m'être laissé avoir aussi facilement mais j'étais curieux d'entendre ses explications.

- Vous renvoyer ne servirait à rien. Vous êtes le genre de personne qui chassée par la porte passe par la fenêtre. Alors venez-en aux faits.

Elle parut soulagée par ma réponse.

- Voila. Je suis née et ai habité pendant toute ma jeunesse dans une petite ville du centre de la France. Je suis issue d'une lignée de policiers comme mon grand-père ou de gendarmes comme mon père. Il a toujours été évident pour moi que je porterais un jour l'uniforme pour servir mon pays et protéger les citoyens, et c'est ce que j'ai réussi à faire. Dans ma famille j'avais une petite cousine que j'aimais beaucoup. Elle s'appelait Julia.

Elle s'arrêta de parler, dominée par l'émotion. Sa voix s'était éraillée et des larmes semblaient prêtes à déborder de ses yeux. Elle fit un gros effort pour se reprendre.

- C'était une gamine adorable. Je l'aimais comme une petite sœur. Quand elle me voyait en uniforme elle ouvrait de grands yeux. Le fait qu'une femme puisse faire ce métier l'étonnait et en même temps lui donnait peut-être de l'espoir pour son propre avenir. Elle était fière de sa cousine, se vantant auprès de ses copains et copines de ce que je faisais. Un jour elle se plaignit qu'un garçon l’embêtait à l'école. Je vins à la sortie de l'établissement un soir, en uniforme évidemment. Elle me montra le chenapan et je le regardais fixement en agitant un index accusateur sur lui. Il a dû avoir la peur de sa vie car il n'a plus jamais ennuyé Julia.

L'évocation de ce souvenir fit monter un petit sourire sur ses lèvres mais il ne dura pas. La tristesse revint bien vite.

- Mais les petites filles grandissent et subissent parfois de mauvaises influences. Au lycée elle se laissa entraîner par des relations douteuses goûta à la drogue. Elle avait mis le doigt dans un engrenage mortel. On retrouva un jour son corps sans vie dans des fourrés, pas loin d'un squat.

Elle semblait à bout de souffle comme si elle était en apnée depuis le début de son histoire. Après avoir inspiré profondément elle reprit son récit.

- Vous devinez ma peine et ma colère. Le petit dealer identifié ne fut pas pour autant arrêté. Les Stups le surveillaient en espérant qu'il les mènerait vers le gros bonnet du coin, Mais il fut tué lors d'un règlement de compte entre bandes rivales pour une question de territoire. Avec sa disparition l’enquête sur la mort de Julia fut close, à mon grande désappointement. La mort de ce petit dealer me frustrait, j'aurai aimé qu'il paye pour tous ces jeunes qu'il avait entraînés dans une spirale infernale, qu'il passe beaucoup de temps en prison.

J'étais ému par son discours mais je ne voyais pas ce que je pourrais faire dans une histoire déjà terminée. Je n'avais pas la possibilité de remonter le temps hélas.

- Je vous comprends mais vous ne devez pas vous sentir coupable. Vous n'êtes pas responsable de la mort de votre cousine et le coupable a été tué. Fin de l'histoire, non ?

Elle me regarda avec colère.

- Comment pourrais-je faire mon deuil tant que les vrais coupables courent toujours ? Le petit dealer n'a eu que ce qu'il méritait mais il n'était qu'un maillon de la chaîne. Je veux les responsables de niveaux supérieurs. Ceux sans qui ce trafic ne pourrait pas exister faute d'approvisionnement. Ceux qui s'en mettent plein les poches au détriment de la jeunesse de notre pays,

Elle s'était brusquement exaltée, les poings serrés et le regard farouche. Je m'abstins d'intervenir à nouveau. Elle était en plein délire si elle comptait vraiment partir en croisade contre ses gents. La suite de son discours me fit malheureusement comprendre que mon pressentiment était exact.

- J'ai d'abord consulté tous les dossiers concernant cette affaire, même ceux dont l'accès aurait dû m'être interdit. Pour cela je n'ai pas été regardante sur les moyens à employer pour arriver à mes fins.

Elle sembla un peu confuse en avouant ces faits et je préférais ne pas savoir quels étaient ces «moyens ».

- Ensuite j'ai exploré les débuts des pistes suivies par mes collègues. Cela m'a amené à rencontrer des personnes plus ou moins compromises dans ce trafic. Disons que là encore je n'ai pas été regardante avec les moyens utilisés, différents mais efficaces, et grâce à ça j'ai pu progresser dans mon enquête. Je ne vais pas vous en dire plus sur ce sujet. Disons que les détails sont classés « confidentiels ».

Elle marqua une pose et je compris qu'elle arrivait au moment où elle allait avoir besoin de moi, ce qui me mit mal à l'aise.

- Les gros bonnets passent beaucoup plus de temps à compter leurs billets qu'à se trouver sur le terrain. Pour les inciter à sortir du bois il faut les motiver par des attaques ciblées là ou ça fait le plus mal, c'est à dire au porte-monnaie.

- Les coincer grâce au fisc comme Al Capone ?

Ma tentative d' humour tomba à plat. Elle l'avait pris au premier degré et me répondit sérieusement.

- Non ce n'est pas possible, ils sont trop malins. Mais j'ai repéré un de leurs labos clandestins. Si je pouvais le détruire ils seraient obligés de réagir car ça leur ferait vraiment mal.

Elle ne développa pas plus avant son projet, guettant ma réaction.

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