Chapitre 1 (partie II)

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— Tiens donc... il y a une saleté sur ma table, railla le maître.

Le larbin de droite ricana tandis que celui de gauche le regardait d'un air dégouté. Je décidais de ne pas m'en préoccuper. Je ne tenais pas à me mettre plus en colère que je ne l'étais déjà. Ma non-réaction le surprit.

— Dégage de là, ici, c'est ma table !

Je levais la tête et le regardais.

— Tiens, je me disais bien avoir entendu une voix stridente, persifflais-je, que me veulent trois étudiants insignifiants de si bon matin ?

Un rictus prédateur naquit sur le visage du maître tandis que des flammes jaunes-orange s'allumaient sur ses bras.

— Je crois que t'as pas compris la nouvelle, ici, c'est ma table alors tu vas dégager avant que je crâme ce à quoi tu tiens.

Je ne bougeais pas d'un poil malgré la peur qui commençait à monter dans ma poitrine. Ici, il était hors de question que je m'écrase comme dans mon ancienne école. L'élémentaire m'attrapa par mon t-shirt et me colla contre le mur.

— Tu veux jouer à ça ?

Il leva son poing enflammé. L'adrénaline me faisait trembler mais pas de peur. Mon regard réussit à tenir face à ses yeux brûlants. C'était rien de plus qu'une bataille de regard. Si je le poussais dans ses retranchements il allait me frapper, mais si je baissais les yeux il allait se servir de moi comme d'un punching-ball toute l'année et plus encore. C'est pour ça que je n'avais pas le droit de perdre.

Ses dents se serrèrent. Je les entendis grincer très clairement. Puis, sans prévenir, son poing fusa vers mon visage. Par réflexe, je fermais les yeux, me préparant à la douleur du choc. Une énorme bourrasque vint rafraîchir ma peau rougie par les flammes et un énorme bruit, suivi de craquement, retentit dans la salle qui devint immédiatement silencieuse. J'ouvris les yeux.

Un garçon s'était levé et avait un bras tendu dans notre direction.

— Raven, arrête ça ! ordonna ce dernier.

L'élémentaire feu, Raven, grogna :

— Sebastian, tu vas me le payer !

Puis il se tourna vers ses larbins :

— Tenez-la bien le temps que je revienne, ordonna-t-il.

Le toutou de droite attrapa mon verre et le brisa entre ses doigts. Les éclats ne l'entaillèrent pas et se reformèrent directement en une sorte de couteau très pointu et tranchant qu'il tendit dans ma direction.

— Attrape-la Éden, ordonna-t-il.

L'autre, qui semblait être le larbin du larbin, soupira et tendit la main vers moi. Je tressaillis sans pouvoir m'en empêcher. Mais avant que je ne puisse créer un bouclier, il posa sa main sur mon épaule. Une douleur m'incendia et mes genoux plièrent. Mes traits se crispèrent et ma respiration se fit saccadée.

— Qu'est-ce que t'es en train de me faire ? bégayais-je avec difficulté.

Il ne répondit pas. Je supposais qu'il n'en n'avait pas le droit. Tout doucement, je glissais au sol alors que la douleur se propageait dans tous mes membres. J'étais incapable de réfléchir correctement ou de bouger.

Mon corps décida alors de réagir et ma chaleur corporelle augmenta. Au bout d'une minute, je vis Éden grimacer de douleur à son tour. Puis, il retira sa main et la souffrance dans mon corps disparut aussitôt. Je massais mon épaule engourdie en me relevant.

— Comment t'as fait ça ? demanda-t-il en se tenant sa main brûlé au premier degré.

— Si tu crois que je vais te le dire, bredouillais-je l'esprit encore un peu confus.

Le deuxième larbin grogna :

— Qu'est-ce que tu fous Éden ?

— Je peux pas la toucher, sa peau est brûlante, protesta-t-il.

Le sans-nom grommela et leva son couteau de verre dans ma direction. Sans m'en rendre compte, j'élevais un bouclier invisible autour de moi tandis qu'il franchissait les deux pas qui nous séparaient. La peur me fit fermer les yeux une nouvelle fois. Je m'attendais à entendre son arme se briser mais un gémissement de douleur me surprit et je rouvris les yeux. Le sans-nom avait poignardé son larbin à l'épaule tandis qu'il était dos à lui. Je me rendis compte une seconde après qu'Éden venait de me protéger sans savoir que je pouvais me défendre moi-même. Ce dernier grimaçait de douleur.

— Qu'est-ce que tu fais ! aboya le sans-nom, pousse-toi !

Puis il retira violemment le couteau de l'épaule d'Éden avant de le lever une nouvelle fois. J'étais paralysée, je ne comprenais plus ce qu'il se passait. Un cliquetis me sortit de ma torpeur et je vis une chaîne de glace attraper le bras du sans-nom qui tenait l'arme de verre. Il se retourna vers l'élémentaire en criant de frustration. Le garçon au bout de la chaîne avait les cheveux blancs et un regard froid.

— Lâche-moi ! ordonna le sans-nom.

L'élémentaire glace ne répondit pas et tira. Le manieur de verre se laissa traîner avant de briser la chaîne d'un coup et d'envoyer le couteau vers le garçon aux cheveux blancs qui l'esquiva sans difficulté.

Ce fut un deuxième gémissement qui me fit baisser les yeux sur Éden qui se tenait l'épaule accroupi sur le sol. Du sang coulait abondamment de la plaie. J'étirais mon bouclier pour qu'il soit lui-aussi à l'intérieur.

— Faut aller à l'infirmerie, lui lançais-je, tu peux marcher ?

— Pourquoi est-ce que tu te soucierais de moi ?

Je ne répondis pas. C'est vrai qu'il m'avait attaqué et paralysé mais j'avais le sentiment qu'il n'avait pas choisi de faire ça.

— Un merci suffira, soupirais-je.

Puis je le soutins alors qu'il essayait de se lever. Je récupérais mes affaires au passage et nous quittâmes la salle bondée qui encourageait les quatre bagarreurs.

En suivant le plan, je trouvais rapidement l'infirmerie. J'entrais sans frapper et l'infirmier, un grand homme plutôt jeune, environ la vingtaine, aux cheveux châtains clairs et à la longue blouse blanche leva la tête.

— Euh, commençais-je, il s'est fait poignarder...

L'infirmier se leva précipitamment.

— Comment c'est arrivé ? questionna-t-il en faisant asseoir Éden sur une table d'auscultation.

— Laisse... tomber Mika, répondit le blessé.

L'infirmier secoua la tête.

— Éden, qu'est-ce que t'as encore fait ?

Il ne répondit pas. Mika découpa son pull et pansa la plaie qui dégoulinait encore. Il prit un linge propre d'une armoire et le posa sur la plaie.

— Jeune fille, tu peux appuyer ?

J'écarquillais les yeux :

— Quoi ?!

— Je peux pas appuyer et activer ma capacité alors aide-moi.

Je soupirais silencieusement avant d'obéir. Mika retira ses mains et les joignit ensemble. Lorsqu'il les sépara un pinceau apparut entre ses paumes. Il l'attrapa et dessina un cercle magique sur le dos du blessé qui gémit. Lorsqu'il eut fini, le sang arrêta de couler. Il refit les mêmes gestes en sens inverse et le pinceau disparut. Je retirais le linge devenu rouge.

— Merci jeune fille, me lança-t-il.

Puis il attrapa Éden et alla le déposer sur un lit avant de tirer un rideau pour le cacher. Ce dernier avait perdu connaissance.

— Ne t'inquiète pas, me rassura-t-il, ce n'est qu'un effet de ma magie.

— Magie ? répétais-je.

Il souria.

— Tu es nouvelle non ?

J'acquiesçais.

— Tu vas le découvrir un peu plus tard, mais nous sommes liés à la magie du monde. Les capacités que nous avons ne sont qu'une conséquence. Et certains d'entres nous pouvont l'utiliser.

Il regarda ses mains quelques secondes. Je remarquais que sa paume droite possédait un tatouage ressemblant exactement au pinceau qu'il avait dans les mains quelques minutes plus tôt.

— C'est votre pinceau ? demandais-je pour en être sûre.

— Oui, pour ma part, je ne peux utiliser que des sorts de guérisons et quelques sorts défensifs mineurs.

J'allais récupérer mon sac lorsqu'il me demanda :

— Tu n'es pas blessée au fait ? Naïm peut être vraiment brutal.

Je secouais la tête.

— Je ne suis pas blessée même si j'ai encore l'épaule engourdie à cause du pouvoir d'Éden.

Mika passa une main dans ses cheveux châtains en soupirant.

— Ne lui en veux pas, il ne fais pas ça de gaieté de coeur.

Je fronçais les sourcils :

— Et pourquoi alors ?

L'infirmier posa des yeux étonnament doux sur Éden. Je mis mon sac sur mon épaule. Même sans qu'il ne me le dise, j'avais compris où il voulait en venir

— Monsieur, soupirais-je en jouant avec les lanières de mon sac.

— Mika, me corrigea-t-il.

— Ecoutez, je ne sais pas pourquoi il traîne avec ces gars-là ni... pourquoi ils les laissent lui parler comme ça mais il n'a pas l'air décidé de s'en sortir. Et de toute façon je ne vois pas ce que je pourrais faire.

L'infirmier eut un petit sourire que je ne compris pas. J'allais sortir puis me rendis compte de quelque chose.

— Comme vous savez que c'est ce Naïm qui l'a blessé ? questionnais-je.

Il leva les mains d'un air innocent, un petit sourire malicieux sur le visage.

— Je suis infirmier, répondit-il comme si c'était évident.

Puis je sortis de la salle et me rendis à mon cours qui avait déjà commencé.

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