Surprises-Partie(s...)

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La chaleureuse ambiance du petit chalet inspira donc les deux tourtereaux. Pourtant, ils ne faisaient rien pour consommer leurs envies. Raymond conclut donc assez vite qu'il y avait encore un problème. S'il avait su de quoi il était question, il aurait tout foutu à la poubelle. Tous ses projets divins foutaient le camp, lui semblait-il.

Une idée lui vint pour tenter de sauver les meubles : il allait ouvrir un canal, une sorte de fréquence mentale, adaptée au désert intellectuel de ses enfants. Il faudra attendre quelques millénaires pour retrouver un tel système de communication, d'ailleurs. Cette invention était de toute façon bien trop avancée pour Adam et Eve. Pourtant, ils surent s'en servir, presque naturellement.
Comme dans un ballet appris de longue date, et sans concertation aucune, Adam et Eve s'agenouillèrent en même temps l'un à côté de l'autre. Ils joignirent leurs mains, les yeux levés vers les cieux. En fait, ils regardaient le ventilateur qui ronronnait au plafond... Mais, bref ! L'important consistait en ce premier moment de confession mutuelle, non ?
Ils marmonnèrent des trucs et des bidules, se jetant parfois un petit regard en coin pour s'assurer qu'ils restaient incompréhensibles l'un pour l'autre. Eve semblait bien plus douée qu'Adam à ce petit jeu. En effet, elle glissait ponctuellement quelques mots sans rapport avec l'objet réel de ses phrases.
Raymond apprécia bougrement. A tel point qu'il baptisa ce système de communication "prière". C'était une sorte de message silencieux qui lui arrivait directement dans les oreilles, sans faire le moindre effort. De l'absence d'effort ou du privilège d'un direct-live, il ne sut jamais trop ce qu'il préférait mais il se félicita de cette heureuse initiative.

Donc, Eve et Adam (j'inverse un peu les prénoms pour pas me faire taxer de machisme inutilement. Le texte présente déjà tellement de choses ineptes que je ne voudrais pas y mettre mon grain de sel... Je vous rappelle que l'histoire que vous lisez, ou que vous supportez, m'est dictée par le dernier homme de la Terre. Sachant que je ne suis pas Raymond, non plus, vous conviendrez et garderez en mémoire, s'il vous plait, que je ne suis que le modeste narrateur, le scribe attentif et méticuleux chargé de retranscrire les ultimes paroles d'un être perdu, seul au monde... Je reprends :)

Donc, Eve et Adam marmonnaient des trucs. Non, pardon : ils priaient. Raymond-Prométhée ne se sentait plus pisser de joie ! Ils venaient de se soumettre, comme ça, sans raison apparente ! Décidément, les humains le surprendraient toujours. Alors, fier de lui, un peu condescendant aussi, il fit de ses oreilles vaporeuses deux écouteurs stéréo high-tech. Dieu écouta ses enfants prier, pour éclater en sanglots quelques secondes plus tard...

Il avait écouté les prières d'Adam et Eve. Pour le contenu général, les messages se ressemblaient étrangement. Raymond prit cela pour une sorte de communauté de pensée, une preuve indirecte qu'homme et femme pensaient de la même manière, qu'ils formulaient ensemble des demandes à peu près similaires. Parce qu'il s'agissait de demandes. Un peu particulières, bien sûr.

- Dis-donc, Dieu, si tu voudrerais bien faire une chose sympatoche pour moi, ben que je m'engagera par la présente à te vouer une passion sans limite et même que je me pliererai à tes volontés, même les plus balaises... priait Adam en guise de préambule.

Certes, la diction n'était pas parfaite, la maitrise des accords et du reste laissait encore à désirer mais le plus important fut qu'Adam se montra prêt dès cet instant à se soumettre, à servir son Dieu. Et Raymond trouva que cela était bien.
Eve priait, elle aussi.

- Cher petit papounet didoudinet qui fait son ro-dodo tout là-haut dans les nuages, je m'adresse à toi, mais en secret. Faudra pas le répéter à l'autre branquignol à côté de moi, sinon, eh ben ça sera plus un secret. Tu sais, il fait rien qu'à m'embêter et à me mater le fion, les roploplos et le reste. Et ça me brise la vulve, si tu vois ce que je veux dire. J'aime pas ça, je sens bien. Alors, voilà, si je me permets une petite missive en direct avec toi, mon papounet céleste, c'est que j'aimerais bien que tu me rendes un petit service. Oh, pas grand-chose, tu sais ! Mais si tu pouvais faire quelque chose pour moi, eh bien tu serais mon Dieu pour toujours. Et je ferai bâtir des baraques rien que pour toi, avec une grande enseigne sur les toits pour que tout le monde te reconnaisse. Ce serait gentil, non ? Alors...tu pourrais bien faire un petit truc pour moi, tu vois bien...

Eve se débrouillait déjà bien mieux avec les mots pendant qu'Adam se contentait d'un parler bref et direct. Elle, plus fine d'esprit, savait d'instinct qu'il ne fallait jamais aborder un Dieu directement. Il lui fallait aussi user de promesses faciles à faire, sans grande consistance, de celles qu'elle pourrait oublier sitôt faites. Alors qu'elle ne faisait que ses premiers pas dans l'art délicat du mensonge et de la manipulation, elle montrait des capacités tout à fait extraordinaires. Raymond-Dieu espéra alors que tout n'était pas perdu pour l'humanité. C'était peut-être ce petit bout de femme qui sauverait le monde un jour !
Pourtant, Raymond se mit lui même à prier parce que, franchement, ce qu'il entendit tout de suite après le laissa comme deux ronds de flan...

- Tu sais, Dieu, reprit Adam, je me fais chier tout seul dans le jardin. J'ai bien rencontré l'autre à côté de moi, que je sais même pas son nom et que je m'en bats l’œil et le flanc gauche, mais je sens bien que je vais pas m'entendre avec. Alors, si tu voudrerais bien m'exécutionner les vouloirs que je te formulasse à l'instant qui vient, je serais enfin heureux. Voilà : je voudrerais que tu me fabriquasses un pote pareil que moi, sans les erreurs que t'as faites sur le con d'à côté. C'est vrai, quoi, tu devais être total bourré quand c'est que tu l'as pondu, celui-là ! Non mais regarde-le avec ses gros tétons sans poils sur le torse, son gros cul et tout le reste. En plus, je suis sûr que je lui mets les os d'un côté et la viande de l'autre à la moindre patate dans les dents. En plus, pouffe-t-il, t'as oublié de lui faire une zézette, comme à moi ! Non, mais t'imagines ? Pas de zé-zette ! Un pote qui sert à que dalle, quoi ! Vu que la mienne marche pas, ça m'aurait franchement intéressé de savoir à quoi ça sert, tu vois ? Franchement, je voudrerais que tu me refasses un mec comme moi. Un peu moins beau, hein, note bien. Et pis, je voudrais qu'il ait une méga banane entre les genoux, tu vois ce que je veux dire ? Comme ça, je pense qu'on pourrait faire joujou tous les deux... On pourrait se boucher les trous...de mémoire ! Je peux compter sur toi, Dieu ?

Raymond en resta bouche bée...
Adam était vraiment une tapette. Pas froid aux yeux, remarquez bien, puisqu'en plus il voulait s'enfiler un pote fait tout comme lui, avec une banane plus conséquente. Le problème de la taille était donc déjà un problème chez les mâles, même à cette époque...
Voilà qui ne faisait pas les affaires de Prométhée. Mais il n'en avait pas fini avec les surprises !
Eve formulait sa prière en même temps... Les joies insoupçonnées de la stéréo !

- Didoudinet...tu voudrais pas me donner une petite copine ? Tu sais, juste une... Pour commencer. Ensuite, on verra. Je voudrais bien une copine parce que l'autre nanard à côté de moi, il pue des pieds, du cul, de la gueule. Je suis sûre qu'il ronfle, qu'il picole comme un trou, et que, en parlant de trous, il ne rêve que de visiter les miens... Et puis, surtout, il n'a pas les yeux bleus. Moi, je préfère le bleu, tu vois. Et si tu pouvais me faire une copine avec du bleu dans les yeux, du blond dans les cheveux, et ailleurs, un peu plus bas, je suis sûre que je pourrais m'éclater comme une bête dans mon jardin à moi... Tu vois, quand je tentais de me cacher dans les moules, tout à l'heure, je me suis dit que j'aimerais bien en bouffer jusqu'à m'en faire péter les jarretelles... Alors, sois mignon, mon Dieu adoré à moi, donne-moi une copine avec une moule et je pourrai en bouffer sans compter, pour mon plus grand bonheur. Parce que tu veux que je sois heureuse, heiiiinnnn....?

Raymond, abattu comme un père pourrait l'être en apprenant la fin de toutes ses illusions, préféra couper la ligne. Adam et Eve ne s'en étaient pas aperçu et continuaient de prier comme des malades, espérant plein de choses, surtout des salaces.
Hors de lui, Raymond se jura de ne plus s'adresser directement à ses enfants : ils étaient vraiment trop cons, naturellement tordus, baisés de la caisse, fissurés de la pensarde, mous du bulbe.
Depuis ce jour-là, la communication ne se fit plus que par appels en pcv, et encore...
En fait, il se mâchouillait les choses de colère.
Voilà qu'Eve était aussi une gougnotte, une bouffeuse de pisse-au-lit !

Et comment ces deux cons-là pourraient peupler la Terre, faire des mômes et tout le tralala s'ils se contentaient de s'enfiler leurs parfaits semblables ?
Raymond soupira longuement, abasourdi par les aléas de merde de ses expériences foireuses. L'humanité était mal barrée.

Fallait qu'il y remédie. Ce qu'il fit, donc.





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