Kévin, vous vous taisez s'il vous plaît.

Vous n'êtes pas mon père, et je n'obéis qu'à mon père.

Ah! Kévin est capable de faire le lien entre la loi et le père, il est moins bête que je ne pensais ... Le problème, c'est que quand on titille ma polarité masculine, les choses peuvent aller très loin ... 

Kévin, j'ai le regret de vous informer que tous les mardis, entre 15 et 16 heures, je suis votre mère ET votre père, et que votre père, en acceptant de vous envoyer à l'école, est tacitement d'accord avec ce transfert de responsabilité.

Kévin se calme.

Kévin, 1m80, antillais (oui, oui, vous avez parfaitement compris ce que je veux dire).

Moi, 1m56, 50 kilos, frêle et pâle comme un linge.

Je m'éloigne pour des raisons évidentes de sécurité, mais aussi pour faire retomber la tension et voir un peu où en est le reste de la classe.

Et là, j'entends, dit tout bas, mais dit quand même: "Elle n'a même pas de couilles".

Kévin, vous savez que j'ai des problèmes d'audition, je n'ai pas bien EN-TEN-DU ce que vous avez dit, vous pourriez répéter, s'il vous plait?

Un ange passe. Silence de plomb dans la classe. Kévin ne dit rien, mais continue à me toiser du regard.

Kévin, allez, répète ou excuse-toi, je te tends une perche là, prends-la ... pensai-je en moi-même ...

Kévin ne dit rien, mais continue à me toiser du regard.

Je ne peux pas m'empêcher de dire tout bas: "Il n'a pas même pas les couilles de répéter".

Kévin explose: Vous avez dit quoi, là? Vous avez dit quoi?

Et là, une fille, que je n'avais encore jamais entendue, vous savez, le genre d'élève à qui on écrit sur le bulletin: "vous gagneriez à davantage participer en classe", se lève et dit à Kévin: "Elle a rien dit, et maintenant tu la fermes!"

Et bien, voilà!

C'est comme ça que l'on parle aux garçons qui ne veulent pas écouter...

Enfin une élève digne de mon enseignement!

L'incident était clos, le cours pouvait reprendre.