Une bienveillance ferme

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J'aimais bien mon prof de physique lorsque j'étais au collège. Bon, il y a beaucoup de profs que j'aimais bien et auxquels je m'identifiais, forcément, vu les référents qui m'étaient proposés à la maison, ce n'était pas bien compliqué.

Mais j'aimais bien le prof de physique, parce qu'il était à la fois ferme et bienveillant, j'aimais cette forme de respect qui était à la fois celui du prof qui n'est pas dupe, qui connaît son monde et le monde, qui respecte et se fait respecter. Beaucoup le trouvaient trop dur, et sincèrement, je ne me souviens plus trop, mais ils étaient relous aussi, les élèves de mon collège. Je suis une des seules à avoir fait un lycée après, c'est dire, et le samedi matin, les rangs étaient raréfiés les jours où chez eux, on tuait les canards.Ma mère ne m'a pas spécialement donné une éducation exemplaire, mais au moins, elle m'a épargné de ça, de devoir rater l'école pour raison agricole.

Je me dis parfois que c'est sur ce prof que j'ai pris exemple, sans trop le vouloir.

Madame, vous nous aimez?

(Oh, putain, qu'est-ce qu'il me soûle lui avec ça, pendant tout le cours ...) Arthur, mon petit, vous avez fini votre exercice? Nooon? Mais vous attendez quoi? 

En fait, mes élèves, je les aime, certains plus que d'autres bien sûr, mais finalement, je préfère le démontrer dans les actes, et parfois, comme cela arrive avec les bons parents, ce qui passe pour du non-amour n'est rien d'autre que de l'amour en fait.

Un jour, pendant un contrôle, je faisais le contrôle et le prof de physique arrive dans mon dos, il regarde et de son doigt, en silence, il me montre quelque chose que j'étais en train d'écrire.

Et là, je vois.

L'erreur.

Je m'étais trompée dans l'application d'une formule.

Je ne dis rien, je remercie en silence, d'un geste de la tête.

En rentrant chez moi, j'ai pris mon cahier et j'ai commencé une autobiographie où je racontais cet événement et je me souviens très bien avoir écrit que je décrivais dans le détail cet épisode-là de ma vie, mais que sans doute, quelques années plus tard, dans quelques décennies plus tard, il serait noyé dans les méandres de la mémoire, au côté d'autres événements qui lui déroberaient la primauté.

Et bien, non. La preuve que non.


Je me souviens très bien aussi avoir pensé que le prof de physique, il avait été très sympa, trop sympa peut-être avec moi en me signalant cette erreur pendant un contrôle, et que c'est sûr que si un jour, je devenais prof, il est probable que je n'aide jamais aucun élève pendant un devoir, même mon élève préféré, même un élève que j'aime bien en secret. 

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