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La voiture filait. Je n'avais mon permis que depuis un mois, mais plus d'un an de conduite accompagnée. Les choses étaient allées très vite. Après toutes les péripéties du confinement, nous avions emménagé de justesse fin août et j'avais fait immédiatement la connaissance de Nicolas. Tonno, notre saint-bernard, avait dévasté leurs parterres dans ce lotissement huppé à l’anglaise. Il était allé ensuite se faire câliner par la jardinière. La mère de Nicolas lui avait pardonné. Nicolas avait mon âge et d’emblée le courant est passé. Quelques jours plus tard, je le retrouvai à Notre-Dame : nous étions dans la même classe. Il me prit sous son aile et j’intégrai simplement sa petite bande, tous enfants de bonne famille à la grâce innée. J'étais basketteur, mais leur équipe était volley. Je n'étais pas trop mauvais et je les rejoignis.

C'est ainsi que nous nous sommes retrouvés à quatre, déjà amis, à partir pour la Toussaint dans notre maison en Normandie. Comme il n'y avait pas de fille, et donc que je ne risquai pas d'en engrosser une, mes parents avaient accepté facilement. Le chauffage avait été lancé à distance, la maison nous attendait, douillette et accueillante.

L’ambiance était chaleureuse, les vannes couraient gentiment. Après un silence, intrigué par les bruits à l'arrière, je demandais à Nicolas ce qui se passait.

— Rien ! Ce sont Louis et Henri qui s'embrassent !

— Quoi ? Qu'est-ce que c'est que cette affaire ? Ils sont pédés ?

— Même pas ! Ils s'amusent ! Ils le font de temps en temps ! Tu n'as jamais embrassé de garçon ?

— Non !

— Ni de fille ?

— Euh, Nicolas, c'est ma vie privée !

— Allez, Tobias, on se connait bien maintenant, dis-moi…

— Oui, j'ai embrassé une fille, enfin plusieurs, plusieurs fois…

— Du calme, Tobias ! Tu as vu ta vitesse ? Tu es troublé ? Si des copains de ton colonel de père nous flashent, ça va être ta fête !

Je m’étais emballé et la voiture avec. J’étais un peu honteux de cet élan non contrôlé.

L'arrivée et la découverte de la maison dans son panorama leur firent l'effet habituel. Louis et Henri prirent une chambre. Nicolas me proposa d'en partager une autre, pour ne pas tout mettre en branle. J'acceptai. J'aurais dû attendre, car il choisit la chambre de mes parents, avec un seul lit ! Difficile de jouer le timoré, et même de répondre négativement à sa gentille question sans le vexer :

— Ça te va ? Ça ne te gêne pas si on dort dans le même lit ?

Depuis deux mois, j’appréciais la délicatesse et les attentions de Nicolas. Il m’enveloppait d'une prévenance et d'une bienveillance permanentes qui me faisait flotter sur un petit nuage. C’est la première fois que je trouvais du charme à un garçon, sans bien discerner ce qui m’attirait chez lui. Partager le même lit nous permettrait de discuter plus intimement : je voulais devenir son ami, son grand ami.

Le diner fut joyeux. Cette bande de quatre me plaisait énormément. J'avais rencontré des camarades formidables. Les changements réguliers de garnisons m’avaient habitué à ces changements corrélés de camarades. Ma personnalité ouverte m’avait aussi beaucoup aidé. Les filles ajouteront que je ne suis pas dénué d’attraits, sans bien savoir, là aussi, ce qui leur plait chez moi. Je suis assez commun et semblable à tous les autres garçons de mon âge et de mon milieu.

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