Prologue

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L’auberge était chaleureuse, le feu nimbait la pièce de couleurs chatoyantes. Beaucoup de personnes s’étaient réuni ici à cause du mauvais temps qui s’était abattu d’un coup, déjà quelques heures plus tôt. Une tempête aussi violente que soudaine de grêle et de pluies violentes les avait contraints à rester à l’auberge alors qu’au dehors le jour déclinait. Pour l’aubergiste, ce mauvais temps fut une aubaine car cela lui permit de servir plus de clients qu’à l’accoutume. Ces derniers appréciaient un bon dîner et une bière fraîche à l’abri de la pluie diluvienne qu’on entendait battre contre les carreaux. A la douce chaleur du foyer régnait une ambiance bonne enfant, tout le monde bavassait les uns avec les autres. Les habitués étaient eux aussi au rendez-vous dont un vieil homme qui palabrait seul, accoudé au bar. Il était là, soir après soir, à raconter à qui voulait bien l’entendre des aventures invraisemblables. Ce soir-là, il parlait, seul, personne ne lui accordait de l’attention. Il racontait les rencontres qu’il avait faits de femmes aux courbures affriolantes et à la beauté inhumaine. Il expliquait que ces belles créatures souhaitaient qu’il donne de sa personne mais lui avait refusé parce qu’il était un chic type. L’aubergiste, ce soir-là, était, exaspéré par les racontars de l’homme et lui demanda, donc l’air presque innocent, s’il était gay pour refuser pareille avance. L’homme se tut en grommelant et tourna son regard sur deux magnifiques jeunes femmes qui lui adressèrent un sourire joyeux. Un homme se leva d’un bond et s’exclama :

—Je vais vous conter une histoire, moi aussi…

Et il se mit à donner les détails d’une aventure grotesque. Les rires s’élevèrent à presque chaque parole de l’homme. Le silence était encore imparfait mais chacun se taisait au mieux afin d’écouter l’histoire qui leur était offerte. La fin arriva bien tôt au goût de nombreuses personnes alors un autre individu pris le relais. Et ainsi de suite. Jusqu’à ce qu’un homme singulier se leva, afin de conter une fable qui avait naquit dans ses songes, lui sembla-t-il. Il était roux, mal-coiffé, mal-rasé, vêtu d’une chemise verte pomme tâchée de peinture et d’un jean noir abîmé par les ans. Il était différent, l’air songeur. Il avait même un petit peu de peinture au coin des lèvres. Il était souriant et semblait chaleureux, à ses côtés, était installée une frêle adolescente qui lui ressemblait trait pour trait.

—Je vais vous conter l’histoire de tout un monde, commença-t-il, le monde d’Ardya, le reflet de notre monde mais il n’était pas peuplé seulement d’humain. Dans ce monde, coexistaient moult créatures que l’on aurait pu croire sortie de nos contes de fées. Il se tut l’espace d’un instant et dans la salle, malgré sa voix captivante, les réactions étaient mitigées. Ses paroles avaient imprégné en chacun quelques images sorties tout droit de l’imagination d’un fou. Le silence était total. L’homme embrassa du regard la salle. Dans cette marée humaine, un visage lui sauta aux yeux, un visage qu’il n’avait de cesse de peindre sur chacune de ses toiles. Il détourna le regard dès que les doux yeux bleus de la jeune femme croisèrent les siens. Il avala avec difficulté sa salive. —Il y a bien longtemps, le monde d’Ardya naquit du Chaos. Chaos est l’origine de toute chose, de nous comme des Dieux. C’était un monde magnifique empreints de magie et de beauté. Tous les peuples cohabitaient dans une harmonie complète. La magie était innée, instinctive et régnait en maître sur chaque tâche que nous avions à faire. Néanmoins, le mal se nourrit de nos plus bas instincts et ce monde ne fit pas exception à la règle. Un dieu offrit à de nombreuses personnes le pouvoir, le pire fléau qui pouvait s’abattre sur ce monde. Ce dieu divisa en deux les peuples, autrefois, soudés. Une guerre éclata entre ses deux camps et de chaque côté, on dénombra des centaines de pertes qui se transformèrent bientôt en milliers. Personne ne fut épargné par la douleur de la perte. La guerre perdura encore et encore et encore, elle dura une vingtaine d’année. Elle se solda par la perte du Dieu de la Désolation et de la Mort, Ishmen. Les peuples qui ne l’avaient pas rejoint décidèrent de cacher ceux qui avaient perdu. Ils les enfermèrent dans une île, cachée derrière un brouillard infranchissable et recelant mille et un dangers. Ils espèrent ainsi oublier les horreurs de la guerre. Pourtant rien ne pourrait jamais effacer des images d’une telle violence.

Il reprit son souffle afin de donner plus de théâtralité à son récit. Chacun était suspendu à ses lèvres, sa voix intrigante faisait naître dans l’esprit des gens des souvenirs venu d’un autre temps. Ces visions étaient insoutenables pour quiconque les contemplaient. Cet homme avait le don de captiver ou de terrifier son public par la magie de ses mots. Le regard de l’homme fit le tour de la salle et se posa sur le visage de la jeune femme. Ses yeux frôlèrent sa peau comme une plume le ferait. Lorsque cette dernière plongea son regard dans le sien, un vertige le saisit. Son cœur s’emballa quand elle lui sourit. Il s’humecta les lèvres afin de reprendre contenance.

—La guerre était certes finit mais les peuples n’étaient plus en harmonie. Les uns accusant les autres d’être les alliés de ceux que l’on nomma les Ombres. Les peuples se battirent, des villages entiers furent rayés de la carte. Les Faes étaient étrangers à toute cette brutalité. Les Faes étaient un peuple simple mais ils ne pouvaient se mêler aux autres à cause de leurs ailes immenses. Aujourd’hui, nous les appellerions les Fées. Ils regardaient, donc, le monde se détruire, ils se sentaient impuissants. Ils eurent une idée. Ils firent éclater les continents et donnèrent une île à chacun des peuples afin de calmer les discordes. Cela n’eut aucun effet, les peuples s’envahirent. Alors ils décidèrent d’effacer tous les souvenirs néfastes de la guerre et de retirer la magie afin de la dissimuler. Les Faes se firent oublier, ils se cachèrent sur leur île. Ils attendaient le jour où la magie serait rendue et les peuples unifiés. Ils savaient que ce jour arriverait mais ils l’attendaient pourtant avec impatience. Leur vœu était que ce Dieu cruel soit vaincu par les Élus afin qu’ils ne soient plus obligés de vivre dans l’anonymat du monde.

Il acheva son histoire ainsi mais les clients de l’auberge ne l’entendirent pas de cette oreille. Ils réclamèrent la suite. La fille du conteur l’incita par son regard à continuer son récit. Elle avait toujours aimé cette histoire. Il soupira.

—Les années s’enchaînèrent à une vitesse folle, la paix était toute relative. Chaque peuple vivait en autarcie, ne commerçant avec les autres, seulement afin de survivre. Dans ce climat, une toute jeune fille naquit. Elle vivait dans les froides campagnes de Kervan’yë. Ce n’était qu’une simple paysanne. À un détail près, sur ses frêles épaules, reposait le destin de tout un monde et par ses choix, elle ne pouvait lui offrir que deux issues : la prospérité joyeuse et magique ou la fin tragique et glaçante. Lorsque notre récit débuta, elle n’avait que vingt-quatre ans.

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