Quatorze heures, Emma : au guichet, pour encaisser et papoter !
Quatorze heures, Emma : au guichet, pour encaisser et papoter !
Le restaurant est calme. C’est l’heure du répit, la plupart des clients sont retournés travailler. Il ne reste que quelques touristes qui sirotent leur café.
Pour la centième fois, je demande à Julie :
« Tu es sûre que la patronne n’a rien vu ?
— Cela s’est joué à une seconde, mais non, elle n’a rien vu, me répond la belle blonde !
— Mais comment as-tu fait ?
— Tu sais, précise mon amie, quand tu es musicienne, tu dois avoir l’oreille fine. Les talons de Frau GRR, c’est comme un roulement de tambours au milieu d’un pianissimo ! »
Je me tais et la regarde. J’aimerais l’entendre jouer, Julie a tant de de talent. Pour moi, elle est la fille idéale : belle, intelligente, drôle, sensible, gentille, cultivée.
Je suis jalouse, oui jalouse de ce beau blond qui a eu le droit de l’embrasser.
J’ai du mal à ne pas pouffer quand je dis :
« J’imagine la tête de la patronne si elle t’avait surprise en train de bécoter un client !
— Tu oublies, rectifie Julie, que ledit client avait relevé ma jupe et mis son doigt dans ma culotte.
— Vu ce que tu venais de lui faire, il était en légitime défense !
— Ce n’est pas de ma faute, c’est la fatalité, murmure mon amie : il avait un trop beau cul !
— Je ne comprends pas, habituellement, tu es plutôt…
— Coincée ? Sympa la copine, me répond la douce Julie.
— Non raisonnable, ici la fille qui saute sur les mecs, c’est moi !
— En fait, c’est l’Allégorie qui m’a provoquée. »
Je me tais, consternée. Je m’inquiète pour Julie, depuis l’épisode au musée d’Angers et le départ de son japonais, elle devient complètement folle !
En tout cas, elle n’a rien perdu de son charme : la petite belge, un peu fofolle, qui vient régler ne cesse de déshabiller la déesse blonde du regard.
La touriste sort du restaurant, je fais remarquer à Julie :
« Je parie qu’elle est lesbienne !
— Et alors, ce n’est pas un crime, rétorque mon amie.
— En tout cas, elle est habillée sacrément court.
— Oui, c’est mini, mini, mini, pouffe Julie.
— Et ses habits, style manga, c’est japonais ?
— Non c’est coréen, précise la belle blonde. D’ailleurs cela coûte la peau des fesses : elle a bien sûr payé avec une gold.
— Tu connais le principe : moins il y a du tissu, plus c’est cher ! »
On éclate de rire.
Quatorze heures trente : c’est fini, le restaurant est vide, je ferme.
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