Quinze heures, Julie : En salle pour le nettoyage / « Il n’y a pas de bonheur dans la vie, seulement son mirage »

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Quinze heures, Julie : En Salle pour le nettoyage.

Carlos est en retard pour le nettoyage, je l’attends.

Depuis ce matin, j’hésite mais le regard consterné d’Emma, quand j’ai évoqué l’Allégorie, me décide.

J’appelle Maman :

« Julie ?

— Oui, c’est moi Maman, confirme la jeune fille, je ne te dérange pas ?

— Non, ma patiente a raté son train : un bel acte manqué !En tout cas, je facture la séance, elle déteste cela : elle va juste me haïr un peu plus !

— Maman le tableau , il est revenu.

— Vraiment, dit ma mère inquiète ?

— Oui maman, il faut que tu m’aides. »

Je lui raconte tout, enfin presque. Je glisse sur les « Kisses on the bottom », comme dirait McCartney. Mentir par omission ne change rien, maman a tout deviné.

C’est toujours comme cela, avec elle je me sens petite, toute petite.

Après un long silence, maman me répond :

« C’est vrai, cela ressemble à de la schizophrénie.

— Vraiment, ma voix s’étrangle au bout du fil ?

— Après, ce qui m’inquiète, c’est que tu n’en es plus au stade des hallucinations intra-psychiques affectivement neutres.

— Je te le confirme maman.

— Bon, avec ton type dans le métro , c’est plutôt le stade suivant : tu crois qu’on devine la pensée, tu crois dans la télépathie.

— Je te le confirme maman.

— Tu es donc au troisième stade : les actes inattendus, comme embrasser ce garçon.

— Cela va bien malgré tout, demande Julie ?

— Globalement tu es dans les symptômes positifs. L’allégorie semble toutefois ambivalente, elle risque de te persécuter. »

Je coupe court à la conversation : Carlos entre dans la salle du restaurant.

Il me fait signe d’attendre un peu, il a encore beaucoup à faire.

Je songe à cette phrase de Tolstoï : « Il n’y a pas de bonheur dans la vie, seulement son mirage ».

La famille de maman est d’origine russe, elle m’a légué en héritage des cheveux bonds, des yeux bleus et une nostalgie slave.

N’est-elle pas en train de me dire cela : « Ma fille, tu ne seras jamais heureuse, car pour l’éternité tu porteras le souvenir des souffrances du passé ? ».

J’ai lu Soljenitsyne, j’ai lu tout ce qui existait sur le goulag. Je ne suis jamais allé en Russie, les silences de maman m’ont dissuadé.

Un mirage, la vie ne serait donc qu’un mirage ?

Maman ne m’a donné en héritage qu’un seul mot de russe : Toska.

Elle a toujours ajouté : « cela ne se traduit pas, d’ailleurs je la lis dans tes yeux »

Je retiens mes larmes : Carlos va, enfin !, se mettre au travail !

Carlos est en retard pour le nettoyage, je l’attends.

Depuis ce matin, j’hésite mais le regard consterné d’Emma, quand j’ai évoqué l’Allégorie, me décide.

J’appelle Maman :

« Julie ?

— Oui, c’est moi Maman, confirme la jeune fille, je ne te dérange pas ?

— Non, ma patiente a raté son train : un bel acte manqué !En tout cas, je facture la séance, elle déteste cela : elle va juste me haïr un peu plus !

— Maman le tableau , il est revenu.

— Vraiment, dit ma mère inquiète ?

— Oui maman, il faut que tu m’aides. »

Je lui raconte tout, enfin presque. Je glisse sur les « Kisses on the bottom », comme dirait McCartney. Mentir par omission ne change rien, maman a tout deviné.

C’est toujours comme cela, avec elle je me sens petite, toute petite.

Après un long silence, maman me répond :

« C’est vrai, cela ressemble à de la schizophrénie.

— Vraiment, ma voix s’étrangle au bout du fil ?

— Après, ce qui m’inquiète, c’est que tu n’en es plus au stade des hallucinations intra-psychiques affectivement neutres.

— Je te le confirme maman.

— Bon, avec ton type dans le métro , c’est plutôt le stade suivant : tu crois qu’on devine la pensée, tu crois dans la télépathie.

— Je te le confirme maman.

— Tu es donc au troisième stade : les actes inattendus, comme embrasser ce garçon.

— Cela va bien malgré tout, demande Julie ?

— Globalement tu es dans les symptômes positifs. L’allégorie semble toutefois ambivalente, elle risque de te persécuter. »

Je coupe court à la conversation : Carlos entre dans la salle du restaurant.

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